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L’appel d’un jugement rendu par le Tribunal Correctionnel. Par Ali Chellat, Avocat.
Parution : lundi 26 décembre 2022
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L’appel est une voie de recours de droit commun contre un jugement rendu en première instance. Il permet, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, de le réformer ou vise à l’annuler. Il donne lieu à un nouvel examen de la cause sur le plan du droit et des faits devant la Cour d’appel. Si aucun appel n’est formé dans le délai légal, le jugement est définitif.
Article mis à jour par son auteur en septembre 2023.

L’appel peut être effectué en matière contraventionnelle, correctionnelle ou criminelle.

D’autres voies de recours sont prévues par le Code de procédure pénale, notamment l’opposition et la cassation.

La question qui se pose est de savoir quel est la portée de l’appel (I) et quels sont ses effets juridique et ses conséquences (II).

I. La portée de l’appel.

Nous examinerons dans un premier temps les personnes qui peuvent faire appel (A), dans un second temps, le délai de l’appel et le point de départ ce délai (B) ; enfin comment enregistrer la déclaration d’appel (C).

A) Les personnes qui peuvent faire appel.

La réponse se trouve dans l’article 497 du Code de procédure pénale qui dispose que :

« La faculté d’appeler appartient :
1° Au prévenu ;
2° A la personne civilement responsable quant aux intérêts civils seulement ;
3° A la partie civile, quant à ses intérêts civils seulement ;
4° Au procureur de la République ;
5° Aux administrations publiques, dans les cas où celles-ci exercent l’action publique ;
6° Au procureur général près la cour d’appel
 ».

B) Délai de l’appel et le point de départ du délai d’appel.

Avant d’aborder le point de départ du délai d’appel (2), il faut expliquer quels sont les délais pour interjeter appel d’un jugement (1).

1°- Délai.

S’agissant du jugement contradictoire, le délai d’appel au pénal doit être formé dans les 10 jours.

Dans le cas d’un jugement « par défaut », l’appel principal est formé dans le délai de dix jours.

En cas d’appel de l’une des parties dans le délai de 10 jours, les autres parties au procès bénéficient d’un délai de 5 jours pour interjeter appel. Il s’agit d’un appel incident.

L’appel incident est formé dans un délai de cinq jours. Contrairement à l’appel principal qui est définitif, l’appel incident tombe automatiquement si l’appelant principal se désiste dans les trente jours [1].

Lorsque le tribunal statue sur une demande de mise en liberté conformément aux articles 148-1 et 148-2 ainsi que lorsqu’il statue sur une demande de mainlevée ou de modification de contrôle judiciaire, le délai d’appel au pénal doit être formé dans les 24 heures.

2°- Point de départ du délai d’appel.

Le principe est que le point de départ du délai d’appel court à compter du prononcé de la décision contradictoire. 

En cas de jugement par défaut, le délai d’appel court à compter de la signification du jugement faite quelqu’un soit le mode [2].

L’appel incident court à compter de la déclaration d’appel.

S’agissant de la computation de ces délais, l’article 801 du Code de Procédure Pénale dispose que :

« Tout délai expire le dernier jour à vingt-quatre heures ;
Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant. Le calcul du délai d’appel en pénal se fait en jours ouvrés
 ».

C) Forme de la déclaration d’appel.

L’article 502 du Code de Procédure Pénale dispose que :

« La déclaration d’appel doit être faite au greffier de la juridiction qui a rendu la décision attaquée.
Elle doit être signée par le greffier et par l’appelant lui-même, ou par un avoué près la juridiction qui a statué, ou par un avocat, ou par un fondé de pouvoir spécial ; dans ce dernier cas, le pouvoir est annexé à l’acte dressé par le greffier. Si l’appelant ne peut signer, il en sera fait mention par le greffier. Elle est inscrite sur un registre public à ce destiné et toute personne a le droit de s’en faire délivrer une copie
 ».

Il ressort de cet article que la déclaration d’appel doit être formée au greffe de la juridiction qui a rendu la décision de condamnation.

L’acte d’appel doit être signé par le ou la greffier(e) et la personne qui décide de former appel, ou par son avocat, ou par une personne fondée d’un pouvoir spécial.

Dans ce dernier cas, le pouvoir est annexé à l’acte dressé par le greffier.

Si la personne ne peut signer, il en sera fait mention par le greffier. Elle est inscrite sur un registre public.

Par ailleurs, aucun texte n’impose au greffier d’examiner la recevabilité d’un appel. Si l’acte d’appel est irrégulier, le greffier demande au prévenu ou à l’avocat du prévenu de le renouveler dans les formes prescrites par la loi.

Lorsque l’appelant est détenu, l’appel peut être fait au moyen d’une déclaration auprès du chef de l’établissement pénitentiaire. Cette déclaration est constatée, datée et signée par le chef de l’établissement pénitentiaire. Elle est également signée par l’appelant. Si celui-ci ne peut signer, il en est fait mention par le chef de l’établissement.

Ce document est communiqué sans délai, en original ou en copie, au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée. Il est transcrit sur le registre prévu par le troisième alinéa de l’article 502 du Code de Procédure Pénale annexé à l’acte dressé par le greffier.

Toutefois, même si l’appel est recevable il est toujours possible de se désister.

Le désistement de l’appel en pénal n’est pas soumis à des conditions de forme ou de délai. Il peut être fait par tout moyen : courrier, ou même directement lors de l’audience.

Le désistement est constaté par ordonnance rendue par le Président de la Chambre des appels correctionnels.

II. Les conséquences et les effets juridiques de l’appel.

L’article 515 du Code de procédure pénale dispose que :

« La cour peut, sur l’appel du ministère public, soit confirmer le jugement, soit l’infirmer en tout ou en partie dans un sens favorable ou défavorable au prévenu.
La cour ne peut, sur le seul appel du prévenu, du civilement responsable, de la partie civile ou de l’assureur de l’une de ces personnes, aggraver le sort de l’appelant.
La partie civile ne peut, en cause d’appel, former aucune demande nouvelle ; toutefois elle peut demander une augmentation des dommages-intérêts pour le préjudice souffert depuis la décision de première instance
 ».

Le prévenu peut faire appel sur la peine pénale et ou sur les intérêts civils accordés à la partie civile.

Le premier effet est que l’appel sera suspensif d’exécution des peines prononcées et du versement des dommages et intérêts sauf si le tribunal assorti la décision de l’exécution provisoire. Autrement dit, que le jugement de première instance frappé d’appel ne pourra faire l’objet d’une exécution forcée, à moins qu’il ne soit revêtu de l’exécution provisoire.

L’appelant peut préciser sur quelles dispositions du jugement il entend limiter son appel.

L’appelante comme le Parquet peut faire un appel total.

Le second effet est intitulé « effet dévolutif », car il saisit la cour d’appel de l’intégralité du litige.

En application des articles 509 et 515 du Code de Procédure Pénale, l’affaire est dévolue à la cour d’appel dans la limite fixée par l’acte d’appel et par la qualité de l’appelant.

En cas d ’absence d’indication dans l’acte d’appel, le recours de l’appelant porte à la fois sur l’action pénale et civile. De même l’appel, principal ou incident, du Procureur de la République, sans effet sur les intérêts civils, saisit la juridiction d’appel de l’intégralité de l’action publique.

L’appel doit être utilisé avec précaution et doit être longuement réfléchi avec son avocat afin de savoir s’il est opportun d’exercer ce droit. Il convient dès lors prendre un conseil éclairé auprès de son conseil.

Les conséquences d’un appel pénal peuvent être graves pour l’appelant. Le risque est de voir sa peine aggravée. 

A. Le sort de l’appel sur le seul appel du prévenu.

Si le prévenu interjette appel et le parquet n’a pas formé d’appel, la cour d’appel ne peut que confirmer la peine, la diminuer ou relaxer. Elle ne peut pas l’aggraver.

La cour d’appel ne pourra de ce fait allonger la durée d’emprisonnement, même en l’assortissant du sursis.

La cour d ’appel ne peut, sur le seul appel du prévenu, du civilement responsable, de la partie civile ou de l’assureur de l’une de ces personnes, aggraver le sort de l’appelant.

En pratique, lorsque le prévenu fait appel, le Parquet dépose un appel incident afin que la cour d’appel rejuge de nouveau l’action publique afin de soit confirmer le jugement, soit l’infirmer en tout ou en partie dans un sens favorable ou défavorable au prévenu.

En cas d’appel du parquet, la cour d’appel ne peut que confirmer la peine ou l’infirmer dans la limite du maximum légal.

B. L’appel de la partie civile et la relaxe du prévenu.

Dès le début de la procédure, l’avocat va conseiller à la victime à se constituer partie civile. Si la victime n’est pas représentée devant la juridiction, elle n’aura pas accès au dossier pénal.

En outre, l’avocat va l’assister et veiller à ce qu’elle obtienne réparation de ses préjudices.

Il ne requiert pas de peine car c’est le rôle du ministère public qui s’occupe de l’action publique et veille à la protection des intérêts de la société.

La partie civile ou son conseil peut interjeter appel à l’encontre de la décision seulement sur la partie concernant les intérêts civils. Cela veut dire que si la partie civile n’est pas satisfaite des dommages et intérêts qui lui ont été alloués en première instance, elle a la possibilité de faire appel uniquement sur les sommes allouées aux préjudices subies. Elle ne peut, en cause d’appel, former aucune demande nouvelle.

La partie civile n’a aucun droit d’appel concernant la culpabilité et la peine prononcée à l’encontre du prévenu.

En cas de relaxe du prévenu, si la partie civile interjette appel, la cour d’appel est saisie de l’action civile et ne peut se prononcer sur l’action publique. Elle peut apprécier les faits et les qualifier pour vérifier sa compétence et condamner, s’il y a lieu, le prévenu relaxé à des dommages-intérêts envers la partie civile.

L’avocat a un rôle majeur dans le procès pénal soit pour le prévenu soit pour la victime car celui-ci établira des écritures qu’il déposera au tribunal et à la cour d’appel. Il donne un avis sur les chances de succès de l’appel.

Pour la partie civile, il chiffre le préjudice. En cas de difficulté, il veille à ce qu’un expert soit désigné.

La question qui se pose est de savoir faut-il interjeter appel du jugement pénal ?

Lorsque l’une des parties n’est pas satisfaite du jugement rendu en première instance par une juridiction pénale, elle a la possibilité d’interjeter appel afin que l’affaire soit rejugée.

Il s’agit d’une décision difficile compte tenu des avantages et les inconvénients spécifiques dans ce type de décision. Il faut bien réfléchir avant de faire appel car si le parquet fait également appel la peine pourra être aggravée. Si le parquet ne fait pas appel la peine ne pourra pas être aggravée.

Le jugement pénal rendu par le tribunal Correctionnel statue sur l’action publique d’une part et, lorsqu’une personne considérée comme victime s’est constituée partie civile, sur l’action civile d’autre part.

L’action publique est une action engagée par le Ministère Public à l’encontre de la ou des personne (s) soupçonnée d’avoir commis une infraction. Dans la partie du jugement relative à l’action publique, Le Tribunal rend une décision sur la culpabilité de la personne jugée ainsi que sur la peine. La décision rendue par le Tribunal sur l’action publique est appelée : « dispositions pénales ».

L’action civile est action engagée par la victime d’une infraction devant la juridiction pénale de dont le but d’obtenir une indemnisation pour le préjudice qu’elle a subi. La décision rendue par le Tribunal sur l’action civile est appelée :« dispositions pénales ».

Le droit d’interjeter appel est accordé aux parties par le Code de procédure pénale en fonction des dispositions du jugement qui sont contestées.

La raison de l’appel est la première question qui est posée à l’appelant par la Cour d’appel le jour de l’audience. Il est primordial de formuler clairement le motif de l’appel.

Du côté du prévenu, les raisons principale qui peuvent motiver d’interjeter appel un appel d’une condamnation pénale.

La première concerne la contestation par la personne condamnée de sa culpabilité.

La personne condamnée considère qu’il n’est pas coupable de l’infraction et souhaite que son dossier soit rejugé afin que son innocence soit reconnue par la Cour d’appel.

La seconde concerne la peine prononcée par la juridiction de première instance. Dans ce cas, la personne condamnée, sans contester sa culpabilité estime que la peine prononcée n’est pas adaptée aux faits, à sa personnalité et souhaite que celle-ci soit réformée par la Cour.

La troisième raison concerne la condamnation aux dommages et intérêts que le condamné doit verser à la partie civile.

Du côté du Procureur de la République, ce dernier considère soit que la juridiction a relaxé la personne poursuivie, soit que la peine prononcée lui semble inadaptée par rapport aux faits poursuivis.

Du côté de la partie civile, le motif d’appel concernera les dommages et intérêts alloués par la juridiction.

Maître Ali Chellat Avocat au Barreau de Rennes Docteur en Droit E-mail: [->chellat-avocat@laposte.net]

[1Article 500-1 du Code de Procédure Pénale.

[2Article 499 du Code de procédure pénale.

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