Village de la Justice www.village-justice.com |
![]() Mise en demeure de l’URSSAF (ou de la MSA) : comment vérifier sa validité ? Par Nicolas Taquet et François Taquet, Avocats.
|
Parution : vendredi 3 janvier 2025
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/mise-demeure-urssaf-msa-comment-verifier-validite,51936.html Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur. |
La mise en demeure envoyée par un organisme de recouvrement, bien que simple en apparence, est un document essentiel dans le cadre d’une procédure de redressement. Selon l’article L. 244-2 du Code de la Sécurité sociale, toute action ou poursuite initiée par un organisme de recouvrement doit "obligatoirement" être précédée d’une mise en demeure. Voici les points clés à vérifier pour savoir si cette mise en demeure est valable ou nulle.
L’article L. 244-2 exige que la mise en demeure soit envoyée par lettre recommandée. En cas de contestation, il appartient à l’organisme de prouver la notification [1]. En revanche, si l’URSSAF justifie l’envoi par courrier recommandé, la non-réception effective n’affecte pas la validité du document ni de la procédure [2].
Conformément à l’article L. 212-1 du Code des relations entre le public et l’administration (CRPA), la mise en demeure doit comporter la signature ainsi que le nom, le prénom et la qualité de son auteur.
En l’absence de ces mentions, la jurisprudence la plus récente considère leur carence comme une cause de nullité [3].
En cas de contrôle, la mise en demeure doit obligatoirement mentionner :
Une absence ou imprécision de ces éléments peut conduire à l’annulation [4]. En outre, le cotisant doit être informé dans la mise en demeure de la qualité en vertu de laquelle ces cotisations lui sont réclamées, faute de quoi, le redressement est également nul [5].
L’article L. 244-2 impose que la mise en demeure précise un délai d’un mois pour régulariser la situation. Une mise en demeure sans précision de ce délai d’un mois pour régulariser est nulle [6].
Si la mise en demeure fait suite à un contrôle de cotisation, ladite mise en demeure peut éventuellement comporter un montant de redressement plus important que celui indiqué dans le courrier d’observations. Une différence inexpliquée entre la lettre d’observations et la mise en demeure peut être une cause de nullité si elle empêche le cotisant de comprendre l’étendue de son obligation [7].
La mise en demeure doit nécessairement indiquer :
Le document doit être « être précis et motivé » conformément à l’article L. 244-2 du code de la Sécurité sociale. Une mention vague comme « Régime général » est souvent incorrecte et peut entraîner la nullité (ex. : Aix-en-Provence, 9 décembre 2022, n° 21/08307).
En effet, le "régime général" est défini à l’article L. 200-1 du Code de la Sécurité sociale et couvre un certain nombre de risques : maladie, vieillesse, prestations familiales, protection universelle maladie, autonomie. En aucun cas par exemple, la contribution d’assurance chômage et l’AGS ne font ainsi partie du « Régime Général »... De même, la CSG est considérée par le Conseil constitutionnel comme un impôt et non pas comme une cotisation. La même logique est applicable pour la contribution FNAL, recouvrée par l’URSSAF, mais qui constitue un impôt.
Pour certaines juridictions, ces mentions inexactes rendent nulle la mise en demeure [8].
Cette dernière question est fondamentale et doit, au besoin, absolument être évoquée avec l’avocat ou le conseil du cotisant. En effet, pour éviter que l’URSSAF émette une nouvelle mise en demeure correcte, il est stratégique de soulever les irrégularités au bon moment, en tenant compte de la prescription des cotisations (article L. 244-3 du Code de la Sécurité sociale).
Nicolas Taquet Avocat au Barreau de Pau https://www.taquet-avocats.fr/ [->taquetnicolas@gmail.com] François Taquet Avocat au Barreau de Cambrai Professeur en droit social https://www.taquet-avocats.fr/ [->francoistaquet@orange.fr][1] Cass. soc. 15 février 1989. Bull. civ. n° 143.
[2] Cass. civ. 2°, 24 janvier 2019, pourvoi n° 17-28437.
[3] TJ de Vesoul, 8 septembre 2023, RG n° 23/00077 ; TJ de Nanterre. CTX Protection sociale. 3 décembre 2024. RG n° 23/02705, 23/02112, 23/02566.
[4] Ex : Aix-en-Provence, 21 juin 2024, RG n° 22/15436.
[5] Ex : pour une mise en demeure qui ne visait pas la qualité de conjoint collaborateur : Rennes, 9ème Ch Sécurité Sociale, 24 mai 2023, RG n° 21/04675.
[6] Cass. civ. 2°, 31 mai 2005, pourvoi n° 03-30658.
[7] Cass. civ. 2°, 9 octobre 2014, pourvoi n° 13-22039.
[8] Aix-en-Provence, 9 décembre 2022, n° 21/08307 - Tribunal Judiciaire de Lille. Pôle social. 12 juillet 2022. RG n° 20/01497- TJ Bobigny, Serv. contentieux social, 10 avril 2024, RG n° 23/00620 - TJ de Rennes, 7 juin 2024. RG n° 19/01099 - TJ de Besançon. Pôle social. 13 juin 2022. RG n° 21/00191.
Cet article est protégé par les droits d'auteur pour toute réutilisation ou diffusion, plus d'infos dans nos mentions légales ( https://www.village-justice.com/articles/Mentions-legales,16300.html#droits ).