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Le harcèlement sexuel ambiant : notion désormais consacrée par la jurisprudence en droit du travail et reconnue par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Par Benjamine Guillermain, Avocate.
Parution : lundi 12 mai 2025
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Si la définition légale du harcèlement sexuel repose sur des actes dirigés contre une personne déterminée, la réalité du terrain révèle parfois des formes de violence plus diffuses, insidieuses, mais tout aussi destructrices. Le harcèlement sexuel ambiant, déjà identifié en droit du travail, vient d’être expressément reconnu par la chambre criminelle de la Cour de cassation. Cette avancée majeure consacre juridiquement une atmosphère délétère nourrie de propos et comportements sexistes répétés, même en l’absence de victime ciblée, et renforce ainsi les moyens de lutte contre les violences sexistes systémiques en milieu professionnel.

I. L’apparition de la notion de harcèlement sexuel ambiant en droit du travail.

La notion de harcèlement sexuel a connu différentes évolutions avant d’être définie par l’article 1153-1 du Code du travail comme étant constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés qui portent atteinte à la dignité de la victime ou créent à son encontre une situation intimidante, hostile, ou offensante. Ce même article précise que des faits isolés, mais graves, exercés pour obtenir un acte de nature sexuelle, peuvent également être qualifiés de harcèlement sexuel.

Cette définition ne permettait toutefois pas de sanctionner l’ensemble des situations.

La jurisprudence a donc progressivement reconnu une forme particulière de harcèlement sexuel, qualifiée de « harcèlement sexuel ambiant », également désignée sous les termes de « harcèlement d’ambiance à caractère sexuel », « harcèlement sexuel d’environnement hostile » ou encore de « harcèlement sexuel de meute ».

Concrètement, le harcèlement sexuel ambiant se caractérise par des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste répétés qui, sans viser directement une personne, créent un environnement de travail intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant.

Ainsi, ont été qualifiés de harcèlement sexuel ambiant :

Plus récemment, la Cour d’appel de Paris a retenu l’existence d’un harcèlement d’ambiance à caractère sexuel dans un open space où circulaient librement des images et propos sexistes. Elle a souligné que l’employeur avait manqué à son obligation de prévention, en ne contrôlant pas les échanges informatiques et en restant passif face aux alertes des salariées [3].

A son tour, la Cour de cassation s’empare de cette notion et en précise les contours.

II. La consécration du harcèlement sexuel ambiant par la Cour de cassation.

Dans un arrêt du 12 mars 2025 (n° 24-81644), la chambre criminelle de la Cour de cassation consacre pour la première fois la notion de harcèlement sexuel ambiant.

Elle considère que des propos à connotation sexuelle ou sexiste, bien que tenus devant ou adressés à plusieurs personnes, peuvent être subis individuellement par chacune d’elles et suffisent à caractériser le délit de harcèlement sexuel.

Cette position constitue une avancée majeure, dans la mesure où l’article 222-33 du Code pénal impose que les faits soient « imposés à une personne ». Désormais, la création d’un climat sexiste ou sexualisé suffit, même sans ciblage individuel.

En l’espèce, un maître de conférences en droit public était poursuivi notamment pour harcèlement sexuel par personne abusant de l’autorité que lui conféraient ses fonctions, au préjudice de quinze étudiants.

La répétition de propos sexistes ou sexualisés visant une personne déterminée ne constitue donc plus un prérequis. Cette décision traduit une volonté de faire évoluer les mentalités face à une forme insidieuse de harcèlement, parfois tolérée dans les milieux professionnels, sous couvert d’« humour ».

Les entreprises doivent dès lors redoubler de vigilance. Des faits qui, pris isolément, pourraient paraître anodins, peuvent désormais être constitutifs de harcèlement sexuel ambiant, engageant la responsabilité de l’employeur au titre de l’obligation de sécurité prévue à l’article L4121-2 du Code du travail.

Benjamine Guillermain, Avocate au barreau de Paris et fondatrice du cabinet Rhétorik https://rhetorik-avocat.com

[1CA Orléans, ch. soc., 7 févr. 2017, n° 15/02566.

[2CA Agen, ch. soc., 13 déc. 2022, n° 21/00653.

[3CA Paris, 26 nov. 2024, n° 21/10408.

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