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Encadrement juridique de l’usage de l’intelligence artificielle (IA) en entreprise. Par Ludovic de La Monneraye, Avocat.
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Parution : mardi 20 mai 2025
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L’intelligence artificielle (IA) transforme le monde des affaires, offrant des opportunités majeures pour l’innovation et l’efficacité. Son déploiement soulève toutefois des défis éthiques et juridiques importants. Pour en tirer pleinement parti, les entreprises doivent adapter leurs pratiques pour garantir une utilisation responsable et conforme aux droits fondamentaux et aux normes en vigueur.
Les systèmes d’IA permettent l’automatisation de tâches répétitives et à faible valeur ajoutée, libérant ainsi les employés pour des missions plus créatives et stratégiques. Toutefois, cette automatisation doit être encadrée pour garantir la qualité du travail, la responsabilité en cas de dysfonctionnement et la protection des droits des employés. Les entreprises doivent mettre en place des mécanismes de contrôle pour assurer la conformité des systèmes d’automatisation aux normes en vigueur.
L’IA offre aux entreprises la capacité d’analyser de vastes quantités de données en temps réel, améliorant ainsi la qualité et la rapidité des décisions stratégiques. Cependant, pour qu’elles soient réellement fiables, il est impératif que ces décisions reposent sur des données exactes et pertinentes, dans le respect des règles en matière de protection des données personnelles et de transparence. Les entreprises doivent veiller à la traçabilité des décisions prises par les systèmes d’IA pour faciliter les audits internes et les vérifications réglementaires.
Les systèmes d’IA sont utilisés pour personnaliser les expériences clients, augmentant la satisfaction et la fidélité. Cependant, cette personnalisation repose souvent sur l’analyse de données personnelles, nécessitant des mesures strictes pour garantir leur protection et éviter toute violation des réglementations et notamment du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).
Les entreprises doivent garantir que les utilisateurs soient informés lorsqu’ils interagissent avec une IA et comprennent comment ces systèmes prennent leurs décisions. Cela inclut l’obligation de documenter les processus décisionnels automatisés et de fournir des explications claires en cas de contestation. Une certaine transparence algorithmique semble alors incontournable.
La maîtrise des données personnelles et des informations sensibles (stratégies, procédés de fabrication, inventions) est essentielle pour maintenir la confidentialité et l’intégrité des informations traitées. Les entreprises doivent respecter le cadre juridique et adopter des mesures de sécurité robustes pour prévenir les fuites de données.
Les systèmes d’IA peuvent, en reproduisant des biais présents dans les données d’entraînement, générer des décisions injustes ou discriminatoires. Les entreprises doivent donc mettre en place des mécanismes rigoureux pour identifier, surveiller et corriger ces biais afin de garantir des décisions justes et équitables.
Le dernier enjeu majeur relève bien entendu du droit d’auteur des créations incluant de l’IA.
Les contenus générés par l’IA posent des questions complexes en matière de droit d’auteur. En droit français, seules les œuvres originales créées par un humain peuvent être protégées par le droit d’auteur car elles doivent porter en elles l’empreinte de sa personnalité. L’enjeu demeure alors dans les apports substantiels de l’humain dans le processus de création (post-production, rédaction du prompt, etc.), afin que l’empreinte de sa personnalité transparaisse de l’œuvre finale.
Si un auteur souhaite que ses œuvres ne soient pas utilisées pour entraîner des systèmes d’IA, il doit exprimer clairement son refus auprès des exploitants de ces systèmes. En l’absence d’une telle opposition, ces œuvres peuvent être utilisées librement pour l’entraînement, conformément au droit de fouille de texte et de données.
En théorie, si un contenu généré par l’IA est identique ou similaire à un contenu protégé, l’auteur n’y ayant pas consenti, pourra intenter une action en contrefaçon classique. En pratique, cela est rendu complexe au vu du nombre démentiel de données utilisées pour alimenter les systèmes d’IA (45 téraoctets de données textuelles pour alimenter la version 3.5 de ChatGPT).
Les collaborateurs doivent être formés aux enjeux éthiques et juridiques liés à l’utilisation de l’IA, y compris les risques de confidentialité et les obligations en matière de respect du droit d’auteur.
Il semble peu pertinent d’interdire purement et simplement l’usage de l’IA au sein de sa structure. Il semble toutefois très risqué de ne pas l’encadrer.
Il est donc essentiel de faire évoluer la charte informatique et les contrats de travail, en définissant clairement les outils d’IA autorisés et leurs usages (ex : automatisation des emails, gestion des factures, création et design), ainsi que des interdictions (ex : l’utilisation de l’IA pour traiter des données sensibles ou confidentielles). Etant entendu que cela peut être contraignant pour les collaborateurs et donner lieu, le cas échéant, à des sanctions disciplinaires.
Les entreprises sont encouragées à adopter des chartes éthiques définissant les valeurs et les limites de l’utilisation de l’IA, incluant des engagements clairs sur le respect des droits des utilisateurs, la transparence des algorithmes et la prévention des biais, afin de renforcer la confiance des parties prenantes et promouvoir une utilisation responsable des technologies d’IA, afin de renforcer la confiance des parties prenantes et promouvoir une utilisation responsable des technologies d’IA.
L’adoption de l’IA en entreprise peut offrir des avantages considérables, mais impose également une responsabilité accrue en termes de conformité juridique et éthique. En adaptant leurs processus internes, en renforçant la formation de leurs équipes et en se dotant de mécanismes de contrôle rigoureux, les entreprises peuvent tirer pleinement parti de cette technologie tout en respectant les droits fondamentaux et les obligations légales.
Ludovic de La Monneraye Avocat associé IP / IT Barreau de RennesL'auteur déclare ne pas avoir utilisé l'IA générative pour la rédaction de cet article.
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