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Gérer ses ressources humaines en temps de crise : Quelques réflexes pour anticiper la reprise, par Paul Buisson, Avocat associé
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Parution : lundi 25 mai 2009
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Le dirigeant d’entreprise n’est pas sans ignorer que son entreprise est à la merci d’un ralentissement de la demande, d’un bouleversement économique, d’un retournement du marché.
Ces changements sont d’autant plus fréquents dans des contextes de crise.
Le dirigeant doit donc être en mesure de réagir rapidement et efficacement afin d’adapter les coûts de structure de son entreprise et de ce fait, sauvegarder son activité, sa compétitivité et ses emplois.
Plusieurs moyens de réagir s’offrent au dirigeant :
Une modification peut être décidée unilatéralement par l’employeur si elle porte sur :
les conditions d’exécution des contrats modifiés ou
un élément non contractualisé et non essentiel aux contrats.
Le salarié ne peut refuser une telle modification ; un refus l’exposerait à une mesure disciplinaire.
Cependant, il convient d’avancer avec prudence afin de déterminer précisément au regard de la loi, des accords collectifs et de la jurisprudence, si la modification projetée par l’entreprise pour se restructurer peut être ou non imposée.
En effet, la modification d’un élément essentiel des conditions d’un contrat de travail ou d’un élément qui, même s’il n’est pas essentiel, a été institué comme étant un élément primordial dudit contrat de travail, suppose l’accord du salarié concerné et le respect d’une procédure stricte. Cette procédure passe par l’envoi d’une proposition de modification du contrat de travail et offre au salarié un délai d’un mois pour donner sa réponse.
Si la modification proposée est dictée par un motif économique réel et sérieux, le refus de la modification du contrat de travail par le salarié peut ensuite justifier une mesure de licenciement
Le licenciement économique peut malheureusement s’avérer indispensable et devenir pour le dirigeant un moyen d’action inévitable pour restructurer son entreprise.
Ce type de licenciement est extrêmement encadré par le Code du Travail et le contrôle opéré par les juridictions.
Il convient donc, à chaque fois, de :
s’assurer que la suppression de poste est réellement dictée par un motif économique reconnu comme tel par les textes et la jurisprudence et que,
l’entreprise a satisfait à toutes les obligations de fond et de forme à sa charge.
Parmi les obligations de fond et de forme à la charge de l’entreprise, nous pouvons citer :
la nécessité absolue de motiver la décision de licencier,
l’information des instances représentatives du personnel,
l’obligation de reclassement,
le respect des critères de l’ordre des licenciements,
la prise en compte du statut de certains salariés protégés (femmes enceintes, représentants du personnel).
Toute erreur exposerait l’entreprise à des sanctions financière lourdes et ce, alors même que sa survie est en cause.
Le respect de ces obligations impératives a pour conséquence une perte de temps précieux, de nombreux mois pouvant s’écouler entre le moment où l’entreprise constate qu’elle doit s’adapter et le celui où la restructuration devient effective.
Le souci de gagner un temps précieux peut donc inciter le dirigeant à privilégier la rupture conventionnelle.
Le mécanisme de rupture conventionnelle du contrat de travail a été mis en place par la loi du 25 juin 2008 dite portant modernisation du marché du travail et ne peut être imposé par l’une ou l’autre des parties.
La rupture conventionnelle passe par un ou plusieurs entretiens lors desquels le salarié peut se faire assister, puis par une convention signée par les parties.
Avec le recul des derniers mois, on peut toutefois penser que la rupture conventionnelle organisée par le législateur ne présente pas la souplesse espérée.
En effet, la convention doit être soumise à l’homologation de l’Inspection du Travail qui dispose d’un délai d’instruction de 15 jours ouvrables et, surtout, elle peut être remise en cause par l’exercice d’un droit de rétractation ouvert à chacune des parties pendant 15 jours à compter de la signature de la convention.
Certains privilégieront donc la négociation confidentielle entre l’employeur et le salarié et la signature d’un protocole d’accord consécutif au licenciement.
Ce type de protocole n’a pas à être homologué par l’administration et ne peut être remis en cause puisque les dispositions générales des articles 2044 et suivants du Code Civil lui confèrent autorité de la chose jugée entre les parties et interdisent même qu’il soit attaqué pour cause d’erreur de droit ou de lésion.
Il convient cependant d’être prudent dans la négociation d’un tel protocole et de s’assurer qu’il s’effectue de manière absolument confidentielle et que le principe de l’accord soit scellé avant la mise en œuvre de la procédure de licenciement.
Certaines entreprises peuvent chercher à se recentrer sur leur métier en « externalisant » les services qui n’en relèvent pas directement et ce, afin de rationaliser la gestion de leurs moyens techniques et/ou humains afin de se recentrer sur leur métier.
L’externalisation consiste à « faire faire », c’est-à-dire à sortir du périmètre de l’entreprise des activités non stratégiques, des services qui n’en relèvent pas directement.
L’externalisation peut concerner des activités périphériques telles que le gardiennage, la restauration collective, l’entretien des locaux mais également des fonctions plus centrales dans la dynamique de l’entreprise comme peuvent l’être la comptabilité, l’informatique, la logistique le conseil juridique.
Lors d’une opération de restructuration, les contrats de travail en cours sont automatiquement transférés au repreneur (article L 1224-1 et suivants du code du travail).
Pour être licite, cette pratique doit cependant obéir à un certain nombre de conditions strictes édictées par l’article L 1224-7 du code du travail.
En période difficile pour son entreprise le dirigeant peut également avoir à gérer d’autres sujets que les ressources humaines : renégociation de concours bancaires, prise d’accords concernant le passif fournisseurs, recherche de nouveaux financements, ouverture du capital de l’entreprise à des investisseurs ou encore réfléchir au développement de nouvelles activités.
L’intervention d’un cabinet d’avocats spécialisé dans le conseil aux entreprises, habitué à conseiller comme à plaider, est souhaitable pour mener des négociations sur les sujets précités, non seulement pour guider le dirigeant mais aussi parce que les pourparlers menés entre avocats sont couverts par la confidentialité.
Paul BUISSON
Avocat associé
Cabinet BUISSON & ASSOCIES
www.buissonavocats.com
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