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Les droits de réservation et de préférence aux marchés publics au profit des PME innovantes. Par Sophie-Laurence Roy-Clémandot, Avocate
Parution : vendredi 25 juin 2010
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La réforme en profondeur les structures de l’économie française et le développement des PME innovantes étaient parmi les principaux objectifs de la Loi de Modernisation de l’Économie.

Ainsi, l’article 26 prévoit, pendant 5 ans et à titre expérimental, que les acheteurs publics peuvent réserver une partie de leurs marchés de haute technologie, de recherche et développement et d’études technologiques aux PME innovantes ou leur accorder un traitement préférentiel en cas d’offres équivalentes.

Ce mécanisme de réservation ou de traitement préférentiel est désormais opérationnel, tous les décrets et arrêtés nécessaires ayant été publiés.

Ils s’appliquent dans les cas suivants :
- Les marchés de fourniture et de service dont le montant est inférieur à 133 000 € ou à 412 000 €, selon l’acheteur.
- Les marchés de travaux, dont le montant est inférieur à 5 150 000 €.

Les entreprises qui peuvent prétendre à ces droits de réservation ou de préférence sont les :
- JEI (1), les entreprises labellisées par OSEO ou,
- Les entreprises ayant un effectif inférieur à 2 000 personnes, indépendantes et consacrant au moins 15 % de leurs dépenses à la recherche (10 % pour les entreprises industrielles).

L’acheteur public qui décide de réserver un marché aux PME innovantes doit obligatoirement indiquer le recours à l’article 26 de la LME dans les documents qu’il émet et ce, dès la 1ère étape de consultation.

La mesure s’applique sur les marchés concernés, dans la limite de 15 % du montant total moyen des trois années précédentes, pour des marchés similaires.

Les marchés de haute technologie, de recherche et développement et d’études technologiques auxquels s’applique ce droit de préférence doivent répondre à deux critères :

-  Faire appel au dernier état de l’art des technologies ou des connaissances en science et en ingénierie à la date du lancement de la procédure et,
-  Intervenir dans les domaines identifiés comme présentant une part des dépenses de recherche et développement de valeur ajoutée élevée, définis par arrêté des ministres chargés de l’économie et de la recherche.

Le décret du 16 mars 2009, publié le 25 mars 2009, a fixé une liste des 62 domaines d’activité pour lesquels ce droit de préférence peut être mis en œuvre. La variété des domaines concernés est à souligner : informatique, énergie, télécommunications, environnement, défense, électricité, chauffage, vêtements professionnels, vêtements de travail spéciaux et accessoires…

Dans ce cas, le prix n’est plus le critère d’attribution et les offres doivent être regardées comme équivalentes :
-  Si l’on procède une pondération chiffrée, l’écart du nombre de points obtenus par rapport à l’offre la mieux classée ne doit pas excéder 10 %,
-  Si l’on procède par hiérarchisation des critères, l’écart de prix entre les offres restantes ne doit pas excéder 10%, après l’application des critères.

Il s’agit donc d’une brèche ouverte dans le fonctionnement rigide des modes de passation des marchés publics. C’est toutefois une expérimentation qui a encore 4 ans devant elle.

Le gouvernement ayant pris des mesures pour évaluer l’efficacité de ce traitement préférentiel, toutes les PME innovantes ont tout intérêt à participer à cette expérimentation, quitte à en assurer elles-mêmes la promotion.

Les praticiens quant à eux constatent l’existence de deux obstacles psychologiques à la mise en œuvre de ces mesures et émanent des acheteurs publics eux-mêmes qui soit ne connaissent pas cette disposition soit la connaisse mais sont réticents quant à son utilisation qui vient s’inscrire comme une exception aux principes d’égalité absolue et de neutralité totale qui président à la passation des marchés publics.

A défaut, cette mesure qui avait pour objectif de permettre la promotion des innovations et des PME qui la recherchent restera vaine.

Sophie-Laurence Roy-Clémandot
Avocate Associée, Co-fondatrice
RCS & Associés
www.rcs-associes.com

(1) Peut prétendre au statut de JEI, toute entreprise de moins de 250 personnes, avec un CA < 50 M€ ou un total de bilan inférieur à 40 M€, créée entre le 01/01/2004 et le 31/12/2013, de moins de 8 ans à la clôture de l’exercice, avec des dépenses de R&D représentant au moins 15% des charges fiscalement déductibles et engagées au titre de l’exercice, dont le capital est détenu de manière continue à 50% au moins par des personnes physiques ou une PME détenue au moins à 50% par des personnes physiques, dont l’activité est réellement nouvelle.

Rédaction du village

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