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[1] Cf. Macha Séry, « Droits d’auteur. Vous avez dit « Liberté » ? Eluard contre Cronenberg », Le Monde du 17 février 2016.
[2] Civ. 1re, 15 mai 2015, n° 13-27.391
[3] Le poème Liberté est constitué de vingt-et-un quatrains tous formés, à l’exception du dernier, sur une structure identique : les trois premiers vers débutent par l’anaphore « Sur... » suivie d’un complément de lieu, et le dernier vers est un leitmotiv : « J’écris ton nom », en référence à la liberté : « Sur mes cahiers d’écolier / Sur mon pupitre et les arbres/ Sur le sable sur la neige / J’écris ton nom » etc.). La vingt-et-unième strophe se termine par : « Pour te nommer ».
[4] Tourné avec des acteurs connus comme Julianne Moore, Mia Wasikowska et Robert Pattinson, ce film qui a été présenté au Festival de Cannes en mai 2014 propose une vision critique de la vie des stars du cinéma à Hollywood sur fond d’inceste et de drame familial.
[5] Il doit être souligné que le poème Liberté a donné lieu, dans le passé, à de nombreuses adaptations (ou utilisations) : certains vers du poème sont récités dans le film Mon oncle d’Amérique en 1980 ; une partie du poème est écrite par Fred sur la peau de Laurence dans le film Laurence Anyways en 2012.
Depuis la sortie du film, on peut mentionner en 2015, une pièce de 2 euros a été frappée du deuxième quatrain du poème en commémoration de la Fête de la Fédération ; en 2015 encore, le poème a été mis en chanson par Marc Lavoine pour l’édition 2016 des Enfoirés.
[6] Evalués à une somme de 350 000 euros toutes causes confondues : du poème Liberté et paiement de dommages et intérêts en raison du préjudice subi en France.
[7] Et évalué le préjudice du titulaire des droits à la somme de 10 000 euros.
[8] La motivation du tribunal est, sur ce dernier point quelque peu mystérieuse : « Comme le reconnaît son réalisateur, David Cronenberg, le scénario du film a pour thème la vie des stars à Hollywood et l’inceste ; il emprunte des extraits du poème Liberté sans qu’il soit question d’évoquer la Résistance. La reprise des extraits du poème « Liberté », qui a par ailleurs conduit certaines critiques à s’en étonner à la sortie du film, pourrait signifier selon les déclarations de son réalisateur publiées dans le dossier presse : « Je me suis demandé si le public français allait trouver offensant que l’on se serve d’un poème associé à la Résistance dans le contexte d’un film où il n ‘est nullement question de cela. Mais à vrai dire, un poème reste un poème, on peut lui donner plus d ‘un sens. Il est vrai que dans Maps to the Stars, à la fin, la récitation du poème devient un rite de passage. Pour ma part, j’aurais tendance à s’interpréter comme suit dans le monde d’Hollywood, c’est la gloire qui est la vraie liberté, votre image sort de l’écran et acquiert une vie propre. Comme dans la pensée religieuse où l’âme échappe au corps et parvient à une liberté suprême, l’immortalité. Le frère et la sœur associent clairement le poème à leur cérémonie nuptiale, qui rappelle celle de leurs parents, eux aussi frère et sœur. Ils tentent à la fois d’exorciser le mariage de leurs parents, mais aussi de le perpétrer ».
Il s’en suit que contrairement à ce qu’indiquent les demandeurs, le film Maps to the Stars n’est pas une adaptation du poème Liberté. La déclaration précitée le reconnaît expressément.
Néanmoins il fait apparaître à plusieurs reprises des extraits du poème qui sont prononcés ou lus par les personnages qui, pour les motifs exprimés précédemment, ont été repris sans autorisation des ayants droits de l’auteur,
Par conséquent les actes de contrefaçon de droit d’auteur par reproduction et représentation du poème sont établis à l’encontre des sociétés défenderesses.
[9] Le tribunal relève ainsi qu’« il ressort des tableaux de comparaison que de nombreuses modifications, substitutions ou ajouts qui ne sont pas contestés, figurent dans la plupart des apparitions des extraits du poème et notamment en français « sur le sable de neige » au lieu de « sur le sable sur la neige ». S’agissant d’un poème, il est manifeste que chaque mot revêt une importance particulière pour le sens et le rythme. Comme le relève l’analyse de Jean Michel Adam, chaque vers a une portée sémantique et phonétique (re-lire Liberté d’Eluard pièce 21). Le sable et la neige évoquent le chaud et le froid que le poète réunit pour recomposer un monde fraternel.
Il s’ensuit que la traduction dans les sous titres français « sur le sable de neige » dénaturent le sens du vers, tout comme les ajouts en altèrent le rythme. Ces erreurs sont suffisamment graves pour porter atteinte au respect de l’oeuvre de l’auteur »
[10] Alexandra Bensamoun et Pierre Sirinelli, « Droit d’auteur vs liberté d’expression : suite et pas fin. », D. 2015, p. 1672 - Pierre-Yves Gautier, « Contre la « balance des intérêts : hiérarchie des droits fondamentaux », D. 2015 p.2189 – RTD com. 2015. 509, et 515, obs. F. Pollaud-Dulian ; JCP 2015. 967, note C. Geiger ; Propr. intell. 2015. 281, obs. A. Lucas et J.-M. Bruguière ; CCE 2015. Comm. 55, note Caron, et Étude 17, obs. M. Vivant ; Légipresse 2015. 474, note V. Varet,
[11] Les faits de cette espèce méritent d’être rappelés en quelques mots : le peintre, Peter Klasen avait repris, pour les besoins de sa création, des éléments formels originaux d’œuvres préexistantes, et notamment de trois photographies originales réalisées par Alix Malka représentant un visage féminin très maquillé. L’arrêt de la cour d’appel de Paris qui avait classiquement sanctionné les agissements du peintre transformiste sur le terrain de la contrefaçon est censuré au visa de l’article 10, § 2, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la Cour de cassation reprochant à la cour d’appel d’avoir caractérisé et sanctionné la contrefaçon « sans expliquer de façon concrète en quoi la recherche d’un juste équilibre entre les droits en présence commandait la condamnation qu’elle prononçait », la première chambre civile de la Cour de cassation a en effet censuré un arrêt de la cour d’appel de Paris au motif que celle-ci ne s’était pas expliqué « de façon concrète en quoi la recherche d’un juste équilibre entre les droits en présence commandait la condamnation qu’elle prononçait ».
[12] Alexandra Bensamoun et Pierre Sirinelli, « Droit d’auteur vs liberté d’expression : suite et pas fin. », D. 2015, p. 1672
[13] Christophe Caron, « Droit d’auteur versus liberté d’expression : exigence d’un ‘juste équilibre’ », CCE 2015. Comm. 55