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De l’évolution des professions juridiques. Comment gérer et se démarquer ?
Parution : jeudi 5 mai 2011
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Un article de Kristofer Moisan qui concerne les moyennes et grandes structures du droit des affaires essentiellement.

La fonction évolue. Les cabinets d’avocats traversent depuis peu une tempête majeure amenée avec la crise et qui ébranle considérablement leur mode de fonctionnement en les incitant à sortir de leur traditionnel et historique conservatisme pour repenser leur stratégie, en affinant notamment leur positionnement, leur politique de prix ou encore en redéfinissant leur business model.

Ces termes, jusque là très entrepreneuriaux et réservés aux seules industries, touchent de plein fouet les professions juridiques et les cabinets qui souhaitent se développer, que ce soit les cabinets internationnaux à l’instar des Freshfield, Clifford-Chance, Linklaters, Allen&Overy ou encore Bird&Bird, ou les plus petites structures agissant sur le plan local.

Ces derniers ont pris conscience de l’importance de se doter de Chargés de Développement & Communication afin d’intégrer à leur expertise une politique commerciale qui se doit d’être de plus en plus concurentielle en intégrant notamment des outils du marketing mix (Pricing, positionnement). L’analyse du marché devient quasi obligatoire et la segmentation devient une priorité afin d’être compétitif. Le client lui-même devient de plus en plus exigent et il est nécessaire de développer une approche plus ciblée basée sur la communication et les outils hors-média.

En interne, nous avons vu apparaître des divisions ’Contrôle de gestion’, jusqu’alors également réservées au monde de l’entreprise et plus particulièrement au secteur de la grande distribution.

Conséquence ; le collaborateur doit désormais penser en terme de performance financière individuelle et de productivité ; termes encore une fois jusque là peu connus et peu appréciés dans la profession. Or, force est de constater que le collaborateur est aujourd’hui un apporteur d’affaires et doit savoir jongler avec les outils du marketing et de la communication s’il veut rester compétitif.

Il doit être aussi et surtout un business developper. On lui demande d’être un expert du droit et un bon vendeur. Les termes sont volontairement choisis parcequ’ils traduisent la modification qui s’opère au sein de la profession, rattrapée par le culte de la rentabilité et par la mondialisation du commerce dans le secteur juridique. Les avocats reconnaissent de plus en plus eux-mêmes que leur champ de compétence dépasse largement l’étendue de leurs connaissances en droit.

Ils s’avouent être de véritables chefs de projets et de fins négociateurs quand il s’agit d’aborder la question importante du prix de la prestation et des forfaits de plus en plus imposés par les grandes entreprises aux cabinets. Tout comme l’industrie, l’avocat doit aussi s’interroger sur ce qu’il vend dans ses heures de travail (une analyse juridique, une prestation orale, une gestion de projet ?)… Là se trouve la clé d’un nouveau business model selon Richard Sussking, auteur du livre "The end of lawyers ?".

Par conséquent, comment le jeune collaborateur peut-il faire pour coupler ces deux métiers ? Etre un bon juriste est déjà une tâche difficile, comment alors connaître les leviers nécessaires pour optimiser sa productivité et devenir compétitif sur un marché du droit où il faut absolument
se démarquer.

Que l’on soit avocat dans une law firm, futur fondateur d’un cabinet ou encore juriste en entreprise, il est nécessaire d’accompagner efficacement ces professionnels du droit en développant leur aptitude à la conduite de projets. En ce sens, il me paraît opportun de développer une approche spécialisée visant à répondre à un besoin nouveau dans la profession. En effet, je suis intimement convaincu qu’apporter aux cabinets un soutien en développement marketing & commercial est le challenge d’aujourd’hui mais aussi et surtout de demain.

Cette conviction est d’ailleurs renforcée par la récente loi du 24 mars 2011 sur l’interprofessionnalité capitalistique des professions libérales, qui introduit un rayon d’action plus large et donc plus libérale des SPFPL (Société de Participation Financière des Professions Libérales).

Il reste à prévoir que bientôt, nous nous rapprocherons, dans une obligation de compétitivité, de nos voisins anglosaxons qui ont récemment introduit la possibilité pour des investisseurs autres que ceux relevants de professions libérales, d’entrer au capital…

La mise en place de stratégies de développement sera alors au cœur des débats et deviendra, à mon sens, une priorité qu’il ne faudra pas négliger, sous peine de perdre un avantage concurrentiel certain.

Kristofer Moisan _ www.kristofer-moisan.com