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Loi Chatel et syndicat des copropriétaires. Par Christophe Buffet, Avocat
Parution : samedi 21 avril 2012
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Le syndicat des copropriétaires peut-il invoquer la loi Chatel ?

La loi Chatel commence à être bien connue des particuliers, qui songent désormais régulièrement à l’invoquer face aux professionnels.

On sait que cette loi, qui a été transposé à l’article L.136-1 du code de la consommation dispose que :

Le professionnel prestataire de services informe le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat qu’il a conclu avec une clause de reconduction tacite.
Lorsque cette information ne lui a pas été adressée conformément aux dispositions du premier alinéa, le consommateur peut mettre gratuitement un terme au contrat, à tout moment à compter de la date de reconduction. Les avances effectuées après la dernière date de reconduction ou, s’agissant des contrats à durée indéterminée, après la date de transformation du contrat initial à durée déterminée, sont dans ce cas remboursées dans un délai de trente jours à compter de la date de résiliation, déduction faite des sommes correspondant, jusqu’à celle-ci, à l’exécution du contrat. A défaut de remboursement dans les conditions prévues ci-dessus, les sommes dues sont productives d’intérêts au taux légal.
Les dispositions du présent article s’appliquent sans préjudice de celles qui soumettent légalement certains contrats à des règles particulières en ce qui concerne l’information du consommateur.
Les trois alinéas précédents ne sont pas applicables aux exploitants des services d’eau potable et d’assainissement. Ils sont applicables aux consommateurs et aux non-professionnels.

On s’est demandé si cette disposition pouvait être invoquée par les personnes morales, et en particulier par un syndicat des copropriétaires, qui aurait par son syndic signé un contrat reconductible tacitement, et ne souhaiterait pas subir les conséquences de son renouvellement.

On songe en particulier en contrat d’entretien des installations de chauffage ou d’ascenseur, ces contrats étant souvent conclus pour une durée longue, aggravée encore par la reconduction tacite sauf dénonciation par le syndicat des copropriétaires dans un délai qu’il laisse le plus souvent passer.

Par une décision rendue en juin 2011, la Cour de Cassation a considéré que rien dans le texte du code de la consommation ne s’opposait à ce que ce texte s’applique à une personne morale et elle a jugé que c’est en violation de la loi qu’un juge de proximité avait refusé de l’appliquer un syndicat des copropriétaires.

Il est donc désormais acquis qu’un syndicat des copropriétaires peut désormais invoquer le bénéfice de cette loi.

Voici le texte de l’arrêt :

Vu l’article L. 136-1 du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008 ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé 68 rue Albert à Paris (le SDC) a conclu avec la société Somainnet, un contrat d’entretien prenant effet le 2 août 2004, pour une durée d’un an, reconductible de plein droit à l’expiration de chaque période ; que par lettre recommandée du 30 juin 2008, son syndic, la société Pargest, faisant application des dispositions susvisées, a informé la société Somainnet de la résiliation de ce contrat au 1er août 2008 ; qu’estimant cette résiliation irrégulière, celle-ci a demandé paiement de factures pour les mois suivants ;

Attendu que pour accueillir cette demande, la juridiction de proximité, saisie à la suite de l’opposition formée à l’encontre de l’injonction de payer qu’avait obtenue la société Somainnet, s’est bornée à énoncer que le SDC, qui est une personne morale, ne pouvait se prévaloir de l’article L. 136-1 du code de la consommation qui "vise exclusivement les personnes physiques" ;

Qu’en se déterminant ainsi alors que les personnes morales ne sont pas exclues de la catégorie des non-professionnels bénéficiant des dispositions susvisées, applicables à la reconduction des contrats concernés, dès lors que le délai imparti au prestataire de services par le premier alinéa pour donner l’information requise n’avait pas commencé à courir à la date d’entrée en vigueur de l’article 33 de la loi du 3 janvier 2008, la juridiction de proximité qui, en l’absence de mention de la durée du préavis déterminant, en l’espèce, le point de départ du délai précité, n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 1er décembre 2009, entre les parties, par la juridiction de proximité de Paris 13e ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Paris 14e.

Christophe BUFFET Avocat spécialiste en droit immobilier et en droit public. SCP ACR Avocats Angers Nantes Paris 02.41.81.16.16 http://www.bdidu.fr/ Twitter : https://twitter.com/CBuffetAvocat
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