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Google Adwords : pas de contrefaçon en l’absence de confusion sur l’origine des produits. Par Yann Lorang, Avocat.
Parution : jeudi 18 octobre 2012
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La question de l’utilisation sur Internet par un acteur économique d’une marque concurrente est source de nombreux conflits et reste indiscutablement un sujet brûlant du webmarketing. Les solutions récentes confirment certes qu’un usage de la marque d’un tiers peut heurter les fondements de la libre concurrence sur Internet.

Luc-Marie Augagneur avait déjà évoqué ici les évolutions jurisprudentielles incitant à l’usage comparatif de la marque d’autrui comme mot-clé AdWords.

Pourtant, l’achat auprès de Google Adwords de mots-clés déposés à titre de marque par un tiers concurrent ne constitue pas une contrefaçon (au sens de l’article L. 713-2 du Code de la propriété intellectuelle) si cette reprise n’induit pas une confusion chez l’internaute dans sa capacité de distinguer les deux entités utilisant la marque.

Telle est désormais la solution déjà classique, dégagée par la Cour de Justice de l’Union Européenne dans son arrêt du 23 mars 2010 et confirmée par celui de la Cour d’appel de Paris en date du 2 février 2011.

Plus récemment, le Tribunal de Grande Instance de Nanterre du 6 septembre 2012 a approuvé cette solution, énonçant qu’il n’y a atteinte à la fonction d’indication d’origine de la marque « que lorsque l’annonce ne permet pas ou permet seulement difficilement à l’internaute normalement informé et raisonnablement attentif de savoir si les produits ou services visés par l’annonce proviennent du titulaire de la marque ou d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers ».

Il sera remarqué que cette solution est également profitable aux prestataires d’un service de référencement sur Internet tels que Google, que la Cour d’appel de Lyon a reprise dans un arrêt du 22 mars 2012 en concluant en l’absence de contrefaçon de marque par ce dernier, qui n’en faisait pas usage, et subordonnant la contrefaçon par l’annonceur à une atteinte portée à l’une des fonctions de la marque, conformément à la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne.

Dans le même sens, un arrêt du 25 septembre 2012 de la Cour de Cassation avait estimé qu’il n’y avait pas d’atteinte à la fonction d’indication d’origine pouvant induire en erreur l’internaute dans le cas où chaque annonce était suffisamment précise pour permettre à un internaute moyen de savoir que les produits ou services visés par ces annonces provenaient d’un tiers par rapport au titulaire de la marque, concluant ainsi à l’absence d’atteinte à la fonction d’identification d’origine de la marque.

Ainsi, dans ce type de pratiques, il est important avant d’intenter une action en contrefaçon de procéder à une étude de l’annonce déclenchée par la saisie d’une marque concurrente en tant que mot clef.

Pour écarter la qualification de contrefaçon, le Juge prendra en compte non seulement l’affichage clair du caractère publicitaire de l’annonce mais aussi le fait qu’il n’y soit fait aucune référence à la marque et à son titulaire.

A défaut de caractère publicitaire, un concurrent utilisant la marque d’un concurrent serait considéré comme contrefacteur en cas de reproduction de la marque protégée dans la liste des résultats de Google, même en présence d’une annonce publicitaire, ou dans le descriptif des pages Internet dans les balises méta-tag title ou description.

Toute autre reproduction est par définition susceptible d’engager la responsabilité d’une société ayant utilisé la marque d’un concurrent dans le cadre d’une reproduction qui ne respecterait pas les principes énoncés ci-dessus.

Google Adwords met d’ailleurs en garde ses clients dans ses conditions générales, ce dernier déclarant que “l’Utilisation des Publicités (…) ne portent pas atteinte aux droits de tiers et notamment aux droits de propriété intellectuelle et au droit des marques”.

Des mises en garde bien souvent non suivies d’effet…

Yann LORANG Cabinet Jakubowicz Mallet-Guy & Associés www.jmga.fr http://blog.jmga.fr/