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"Loi bancaire", assurance emprunteur et... IOBSP. Par Laurent Denis
Parution : jeudi 20 décembre 2012
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Le projet de loi « bancaire » présenté en Conseil des Ministres le 19 décembre 2012, envisage plusieurs mesures. La séparation des banques de détail et des banques de marché est la plus importante. Mais la question de l’efficacité de la liberté de choix de l’assurance emprunteur, en matière de crédits immobiliers, est également sensible, dans un autre registre. Le bilan publié en mars 2012 indiquait clairement des points d’amélioration. Sans une meilleure prise en compte des nouveaux équilibres de la distribution bancaire, en particulier, du rôle actif des Intermédiaires, les futures mesures pourraient avoir bien du mal à faire mieux que les précédentes.

(*) IOBSP : Intermédiaires en Opérations de Banque et en Services de Paiement.

La tentative de renouer, nationalement, avec le concept, pourtant daté, de "loi bancaire", ne semble applaudie qu’à dose modérée ; elle comprend différents volets, d’inégales ampleurs.

Le plus important est, sans aucun doute, la séparation entre la banque de détail et la banque de marché. Ou, plus subtilement, entre les activités de banque de détail et celles de banque de marché, concept qui laisse ainsi la porte cochère entièrement ouverte à toute étanchéité apparente entre activités, à l’intérieur d’un ensemble bien compact, et identique, en risques.

Un sujet lourd où la précipitation, en général, pourrait déjà sembler suspecte ; et où la volonté d’aller au-devant d’une solution européenne, homogène et concertée, renforce le doute. A quoi bon promouvoir "l’Union bancaire", d’un côté, avec sa supervision coordonnée, et, de l’autre main, soutenir des règles disparates, celles qui feront, justement, l’objet de ce contrôle concentré... Il serait certainement profitable que la France pense l’Union bancaire avec l’harmonisation des règles bancaires.

Mais le projet de loi, pour ce qui a été présenté, comporte des aspects touchant à la protection des consommateurs, domaine pour lequel la Réglementation impose aux Intermédiaires en Opérations de Banque (IOB / IOBSP/ Courtiers et Mandataires, en crédits), des règles de bonne conduite étoffées. Sujet auquel les Intermédiaires sont associés, par leur conception même de leur rôle auprès des emprunteurs.

Le projet de Loi présenté le 19 décembre 2012 entend ainsi "protéger le consommateur bancaire [...] et intensifier la concurrence en matière d’assurance pour les emprunteurs".

Quelle est la situation, en matière d’assurance emprunteur ?

Celle d’une liberté consumériste toute neuve. La Loi sur le crédit à la consommation, du 1er juillet 2010, a conjointement apporté la possibilité, pour tous les emprunteurs de crédits immobiliers, de choisir librement leur assurance emprunteur, autre, le cas échéant, que celle proposée par la banque prêteuse.

Cette possibilité s’appelle la « déliaison ».

Depuis cette loi de 2010, la liberté de choix de l’assurance du prêt est donc le principe.

Il en découle que le prêteur ne peut imposer l’assurance de son choix. Il ne peut refuser une assurance concurrente équivalente qu’en motivant sa décision. En présence d’assurance concurrente, il ne peut modifier en conséquence les caractéristiques de l’offre de prêt. Enfin, l’assureur retenu s’engage à informer le prêteur en cas d’irrégularités ou d’absence de paiement des primes d’assurance.
Pour faciliter sa recherche et déterminer son choix, le client dispose d’une fiche comparative, standardisant l’information remise par chaque Compagnie d’assurance.

Le Comité Consultatif du Secteur Financier a réalisé, à la demande du Ministère de l’économie, le bilan de cette mise en place. Il figure publiquement parmi les avis du CCSF, avec ceux émis le 20 mars 2012.

Ce bilan pose le constat de :

-  la remise parfois trop tardive de la fiche standardisée, nuisant à l’action comparative ;
-  des dérives dans le respect du standard de la fiche, la diversité nuisant de nouveau à la comparaison ;
-  l’effective mise en place de la déliaison par les banques ;
-  le délai souvent rapide de réponse des prêteurs (moins de 48 heures) ;
-  la pratique de frais (« de délégation »), parfois trop élevés, en cas d’assurance « externe » ;
-  la motivation trop faible des prêteurs, en cas de refus de l’assurance « externe ».

Pour les IOB, pour les Courtiers en crédit, il est clair que l’action en matière de crédits immobiliers s’étend aux garanties et aux assurances, selon le statut juridique et l’organisation interne retenue, soit directement, soit en collaboration avec un Intermédiaire en Assurances. Le travail de comparaisons, d’analyses et de conseil effectué à propos de l’opération de crédit inclut très naturellement l’assurance emprunteur. Bon connaisseur des principes de déliaison, l’Intermédiaire est très à même de favoriser la recherche de l’assurance présentant les garanties visées, requises, au prix le plus adapté.

En raison de leur rôle auprès des emprunteurs, les IOBSP ont déjà pris un rôle certain, dans l’application des nouvelles règles de commercialisation des assurances emprunteurs.

L’IOBSP est aussi un agent actif de la protection des consommateurs et de l’intensification équilibrée de la concurrence. La protection des consommateurs n’est pas seulement une question de normes juridiques ou réglementaires, elle réside aussi dans la bonne compréhension et dans les équilibres recherchés dans toute la chaîne de distribution des produits et des services bancaires.

Il sera donc précieux de découvrir au plus vite les propositions concrètes du projet de loi du 19 décembre 2012, en matière d’assurance emprunteur.

Laurent Denis Juriste - Droit bancaire et financier www.isfi.fr