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Cas pratique : La gestion de la connaissance en cabinet d’avocats.
Parution : lundi 11 mars 2013
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Le cabinet Barthelemy Avocats compte plus d’une centaine d’avocats dont 37 associés sur 16 bureaux en France. Tous les avocats y sont salariés. Le profil idéal de ceux qui tirent profit de la gestion de leur “patrimoine-savoir” à long terme. Enquête...
Bénédicte Glass est documentaliste au cabinet depuis 8 ans et a bien voulu nous parler de “la bible” du cabinet.

‘La bible juridique’ - car c’est ainsi que tout le monde nomme au cabinet notre outil de gestion de la connaissance ("knowledge management") [1] - est disponible pour chaque bureau. Les informations sont structurées par thème, chacun d’eux ayant son arborescence (notes, jurisprudences du cabinet, modèles créés en interne, textes).”

Cette bible existait déjà dans le cabinet au format papier dans les années 80, puis a basculé à la fin des années 90 sur informatique, sur un intranet [2] pour tous les bureaux.
Un moteur de recherche a été mis en place pour gérer l’important volume d’information.

C’est devenu un outil incontournable au sein du cabinet ; l’ensemble des avocats l’a intégré et l’utilise ; mais il faut toujours faire des rappels pour que les informations continuent à être intégrées, soit par les avocats, soit par les assistants : La collecte d’informations est envoyée à l’Associée responsable du service technique (documentation) qui gère l’intégration, ou bien un secrétariat collecte chaque mois les infos à intégrer.

On ne pourrait plus se passer de cet outil, qui est utilisé au quotidien par tous.

C’est autant un outil de documentation qu’un outil de mémoire, puisque nous l’utilisons souvent pour retrouver un document que l’on sait y être présent. Notre bible peut aussi servir de base de travail pour faire un point sur un sujet et créer une trame.”

Comme toute base de données, la question de l’actualisation - surtout en droit - est primordiale. Car que deviendrait une base de données non mise à jour au bout de 5 ans ?
Pour les mises à jour, le principal est fait sur les grands points importants consultés régulièrement par les avocats.
Sur d’autres sujets, c’est mis à jour au gré des besoins et consultations : L’engagement de chacun est de mettre à jour ce qu’il pense ne plus l’être, en fonction de sa connaissance de l’actualité de la législation.
La mutualisation de ce travail est réelle et vraiment efficace. ”
.

Une base de gestion de la connaissance ne peut suffire à un cabinet, puisque par définition elle traite de ce que le cabinet a déjà abordé (sphère déjà importante pour un cabinet de la taille de Barthélémy Avocats, depuis 30 ans).

Une autre base complémentaire est donc entretenue par le service technique, base actualisée sur les modèles et supports de formation notamment (le cabinet est formateur régulier de ses clients).
Mais ce n’est plus là un outil collaboratif.

De plus, l’existence d’une base de la connaissance du cabinet ne supprime pas le recours à des bases externes (pour être sûr de la fraîcheur des informations par exemple).
L’outil collaboratif est donc la “trame de fond”, complétée par des bases de données en ligne ou papier, du fait de l’actualisation fréquente (surtout en droit social, le domaine principal du cabinet), et pour personnaliser en fonction du dossier spécifique. C’est évidemment un point important, aucune base de données ne pouvant apporter une réponse complète pour chaque dossier. “Le rôle et le talent de l’avocat sont aussi là !”

Comme pour tout outil informatique se pose la question de l’appropriation par les utilisateurs.
Chez Barthélémy Avocats, “les avocats sont sensibilisés à cet outil dès l’entrée au cabinet, l’utilisation devient vite pour tous une évidence.
Les jeunes avocats ont parfois peur de l’évaluation par leurs confrères de leurs notes. Dans ce cas les notes peuvent être anonymisées, mais c’est assez rare, ce d’autant plus que les avocats sont salariés et non en collaboration libérale, ce qui réduit l’éventuel côté “individualiste” des avocats, qui travaillent vraiment pour le cabinet et non pour leur propre clientèle.”

La bible est donc utilisée en interne, mais parfois aussi pour alimenter une publication externe, “Le Mensuel” qui traite de l’actualité du droit pour les clients, et peut s’appuyer sur les informations de l’intranet, mais réécrites pour cette audience spécifique.

Un tout petit peu de technique...

Le système a été développé sous Lotus Notes au départ (précurseur des gestionnaires d’intranet), puis il a été développé spécifiquement par le prestataire informatique du cabinet, tout comme le logiciel de gestion des dossiers et en lien avec celui-ci.

Point intéressant, un forum permet d’échanger sur des questions de droit entre avocats, complétant donc l’aspect opérationnel et collaboratif de l’outil.

En terme de sécurité, “la bible” n’est accessible localement qu’à partir du logiciel Avocats au sein d’un bureau.
Le cabinet développe aussi un système de bureau virtuel, permettant un accès distant avec identification sécurisée, pour quelques personnes désignées (généralement les associés), pour permettre une mobilité importante.
Il y a une sensibilisation faîte régulièrement sur ce sujet, car la bible contient des données clients confidentielles.”

Quelques enseignements...

De plus grands cabinets n’ont pas tous encore un tel outil, car il n’est pas facile à mettre en place et à maintenir sur le long terme.

Pour que cela fonctionne, il faut au moins un associé qui soutienne et gère le projet, et pas seulement des documentalistes. L’associé sert de “locomotive”. Les avocats doivent être en première ligne pour l’appropriation, en lien avec la documentation pour l’organisation.”

Autre paramètre du succès, la technologie, si elle est bien rodée, “doit surtout servir l’alimentation de la base de données et utilisée très régulièrement pour maintenir une source d’informations fiable”.

Ajoutons un autre élément : le temps. Ce type d’outil, tel un bon vin, ne révélera tout son potentiel qu’à terme et si utilisé (conservé) dans de bonnes conditions... “C’est un travail de longue haleine qui nécessite régulièrement des rappels au partage...”.

Rédaction du village

[1La gestion de la connaissance a pour but d’assurer l’accès au savoir et à l’expérience des collaborateurs d’une entreprise, nouveaux et anciens. Comment partager les meilleures pratiques dans les domaines d’intervention du cabinet ? C’est le but de l’outil.

[2Un intranet est une Plateforme d’accès informatique, sécurisée.