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Confirmation de l’évolution de la jurisprudence sur la mise en cause de la responsabilité pénale des personnes morales. Par Laurent Vovard, Avocat.
Parution : mercredi 17 juillet 2013
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Aux termes d’un arrêt du 19 juin 2013, publié au bulletin, la chambre criminelle de la Cour de cassation confirme l’évolution de sa jurisprudence exigeant, pour que la responsabilité pénale d’une personne morale soit engagée, que les juges du fond caractérisent l’organe ou le représentant qui a agi pour son compte.

Ce retour à une interprétation plus stricte des conditions posées par l’article 121-2 du Code pénal avait été amorcée le 11 octobre 2011, puis confirmée par plusieurs arrêts, notamment les 12 avril 2012, 2 octobre 2012…

Pour mémoire, aux termes de sa jurisprudence antérieure, la Cour de cassation s’affranchissait, dans certaines hypothèses, de la nécessité de caractériser l’organe ou le représentant qui avait agit pour le compte de la personne morale. La Cour s’appuyait également parfois sur des présomptions d’imputation de l’infraction à la personne morale (jurisprudence Sollac).

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Par cet arrêt du 19 juin 2013, la Chambre criminelle de la Cour de cassation réaffirme ainsi la nouvelle orientation et la nécessité de caractériser l’organe ou le représentant qui avait agi pour le compte de la personne morale.

En l’espèce, la caisse des dépôts et consignations avait été condamnée en première instance et en appel des chefs d’escroquerie notamment par la production, en justice, d’un rapport, et la dissimulation d’autres éléments aux fins d’obtenir une décision favorable.

La Cour d’appel de Paris, aux termes de sa décision du 28 mars 2012 avait indiqué : « il est constant que l’infraction a été commise pour le compte de la CDC par ses représentants qui avaient intérêts à dissimuler un tel rapport, mettant en cause leur gestion dans les opérations de prêts-emprunts conclus entre la CDC et le "Groupement privé de gestion" ; que, dès lors, le délit visé à la prévention est établi à l’égard de la CDC… »

Le pourvoi faisait notamment valoir que la Cour d’appel avait méconnu l’article 121-2 du Code pénal en indiquant, de façon générale, que le délit avait été commis par les « représentants » de la CDC sans rechercher plus précisément l’organe ou le représentant auteur de l’infraction.

Au visa des articles 121-2 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, la Chambre criminelle de la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel au motif que :

« en prononçant ainsi, sans mieux rechercher si les faits reprochés avaient été commis, pour le compte de la personne morale poursuivie, par l’un de ses organes ou représentants, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision… »

La décision ici se justifie d’autant plus qu’était en cause le délit d’escroquerie (art. 313-1 du Code pénal), qui repose sur une faute intentionnelle.

Laurent Vovard Avocat au Barreau de Paris https://vovard-avocat.com/