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L’article 24 de l’ANI du 11 janvier 2013 : une vaine tentative de parvenir à la sécurisation des actes juridiques. Par Marie Caron, Juriste.
Parution : mercredi 23 octobre 2013
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En France, le modèle social souffre d’une mauvaise réputation auprès des français : « hausse du chômage », « taux de cotisations élevés », « conflits sociaux » ou encore « manque de sécurité juridique » sont souvent évoqués.

Si nous nous penchons plus particulièrement sur le sentiment d’insécurité, nous pouvons constater qu’il n’est pas perçu de la même manière par les salariés et les employeurs. Pour une grande partie de ces premiers, l’insécurité résulte de l’incertitude de l’avenir professionnel, l’augmentation du chômage pouvant en partie l’expliquer. L’insécurité est alors d’ordre économique. Du côté employeur, celle-ci est d’abord juridique puis économique de par la complexité croissante du droit et les sanctions pécuniaires attachées aux nombreuses règles juridiques, qu’elles soient légales ou jurisprudentielles.

Dans l’article 24 de l’ANI du 11 janvier 2013, qui constitue un accord négocié couvrant certains secteurs d’activité, les partenaires sociaux font un point sur la sécurité juridique dans les relations de travail. Cet accord, signé par trois syndicats représentatifs, a été le fruit de quatre mois d’intenses négociations engagées sur la base de la feuille de route sociale à l’issue de la Grande conférence sociale du 20 et 21 juin 2013.

L’article 24 dispose : «  Les signataires conviennent que la sécurité juridique des relations de travail peut être compromise si des irrégularités de forme sont assimilées à des irrégularités de fond. Dès lors, ils conviennent d’examiner, avec le concours des pouvoirs publics, les cas dans lesquels les irrégularités de forme risquent de primer sur le fond. Au vue de cette expertise les signataires se retrouveront pour se saisir des éventuels aménagements nécessaires dans le respect des principes généraux du droit et de la Constitution  ».

Cette position de principe entre les signataires n’entrainera aucune modification du droit car son objet est de faire un constat et fixer un objectif (parvenir à une sécurisation des actes juridiques) en des termes généraux et imprécis. Aucune disposition de mise en œuvre n’a donc lieu d’être prévue à ce sujet. C’est donc logiquement que le projet de loi et la loi de sécurisation de l’emploi du 16 juin 2013, ont mis à l’écart l’énigmatique article 24.

Afin de mieux cerner cet article 24, une précision des termes utilisés s’impose.

La référence à « sécurité juridique » est séduisante mais elle reste une « notion vague ». Une définition est donc nécessaire. Selon le Conseil d’État cette notion implique «  que les citoyens soient, sans que cela appelle de leur part des efforts insurmontables, en mesure de déterminer ce qui est permis et ce qui est défendu par le droit applicable. Pour parvenir à ce résultat, les normes édictées doivent être claires et intelligibles, et ne pas être soumises, dans le temps, à des variations trop fréquentes, ni surtout imprévisibles ». Ainsi, la doctrine semble unanime pour considérer que la sécurité juridique est en « somme tout à la fois : savoir et prévoir ». Si la sécurité juridique est un résultat, les moyens pour y parvenir sont des normes claires et intelligibles. L’insécurité résulte justement de l’imprécision des lois obligeant les juges à les interpréter. Cela a alors pour conséquence de « brouiller » le paysage juridique.

Concernant les règles de forme et de fond, celles-ci font l’objet de régimes différents.

Une règle de forme a trait aux conditions d’un acte et aux modes de son élaboration. A l’opposé, une règle de fond renvoie à tout ce qui, dans un acte juridique, touche à la personne de ses auteurs, à la valeur de leur consentement, au contenu de l’acte (objet, cause), à l’exclusion du mode d’expression des volontés . Ces règles constituent les conditions de validité d’un acte juridique sous peine de nullité .
En ce qui concerne la forme, la loi impose des formalités tantôt pour permettre la validité même de certains actes juridiques comme les contrats solennels (formalisme ad validitatem), tantôt pour en établir la preuve (formalisme ad probationem). Le non-respect de la forme imposée au titre de la validité entraînera la nullité du contrat ; en cas de formalisme ad probationem, l’existence d’un acte écrit permettra de prouver l’échange des consentements. Au regard du droit du travail les exigences de forme sont requises ad probationem et non ad solemnitatem en l’absence de disposition contraire.

Cependant, dans l’article 24, les partenaires sociaux font un constat qui compromet la sécurité juridique : les juges sanctionnent parfois par la nullité le non-respect d’une règle de forme non imposée par la loi ou ne portant pas sur un élément essentiel de l’acte ou de la procédure.

Ils établissent alors un diagnostic : en étant sanctionnées par la nullité, des irrégularités de forme sont assimilées à des irrégularités de fond (Chapitre 1). L’article 24 préconise ensuite aux signataires de faire une expertise des « assimilations » avec le concours des pouvoirs publics (Chapitre 2), afin d’envisager un traitement dans le respect des principes généraux du droit et de la Constitution (Chapitre 3).

Chapitre 1 - Le diagnostic : des irrégularités de forme sont assimilées à des irrégularités de fond

Comme précisé dans le projet de la loi relatif à la sécurisation de l’emploi, cet accord plonge ses racines dans les constats partagés avec tous les partenaires sociaux lors de la Grande conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012. Du côté patronal, les procédures de licenciement sont jugées trop longues et trop risquées juridiquement. Aussi, l’un des points visé dans la feuille de route sociale a été d’« améliorer et sécuriser juridiquement les procédures de licenciements collectifs » . Plus largement, l’insécurité liée au licenciement (collectif et individuel) a été l’un des points « durs » du MEDEF, si bien que sa proposition initiale visait à insérer dans le Code du travail une formule consacrant la prévalence du fond sur la forme .

Derrière cet article se cache donc la volonté de faire pression sur les pouvoirs publics pour revenir sur les obligations imposées aux employeurs lors des procédures de licenciement, afin que le fond soit privilégié sur la forme souvent sanctionnée par la nullité de la part les juges. L’article 24 établit alors le constat que des irrégularités de forme sont assimilées à des irrégularités de fond (I). Cette « dérive » peut cependant être expliquée par la tendance protectrice du législateur et du juge à l’égard du salarié (II), si bien que la distinction règle de forme / règle de fond est contestable (III).

I. Le constat : des irrégularités de formes assimilées à des irrégularités de fond dans les licenciements

Les juges disposent d’un pouvoir de contrôle très étendu pour apprécier tant la régularité de la procédure de licenciement que le motif du licenciement lui-même .
Nous nous efforcerons de donner des exemples de règles de forme sanctionnées par la nullité dans les licenciements économiques et individuels.

Le licenciement pour motif économique doit répondre à un formalisme très contraignant et des sanctions lourdes y sont parfois attachées en cas de non-respect, comme c’est le cas du plan de sauvegarde de l’emploi (PSE). L’affaire « Continental » en est encore une preuve.
Aux termes de l’article L. 1235-10 du Code du travail : « la procédure de licenciement est nulle tant que le reclassement des salariés (…) n’est pas présenté par l’employeur aux représentants du personnel (…) ». Par cet article, le législateur a consacré la fameuse jurisprudence « Samaritaine » selon laquelle la nullité qui affecte le plan social s’étend à tous les actes subséquents. L’annulation du licenciement a alors pour conséquence significative de donner le droit au salarié d’obtenir la réintégration dans son emploi si elle possible. Dès lors, si la réintégration est demandée, la nullité du licenciement produit ses pleins effets, entraînant la disparition rétroactive non seulement de la rupture elle-même mais encore de toutes les conséquences qui en découlent. Le salarié pourra ainsi prétendre au paiement d’une somme correspondant à la réparation de la totalité du préjudice subi pendant la période qui s’est écoulée entre son licenciement et sa réintégration.

Depuis la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013, les procédures de licenciement économique d’au moins 10 salariés sur 30 jours, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, doivent donner lieu à un accord collectif validé par l’administration ou à un document unilatéral de l’employeur homologué par cette dernière.
Une telle procédure d’homologation peut avoir plusieurs avantages : déplacer le contentieux du juge judiciaire vers le juge administratif, et ce faisant remplacer le contentieux d’une contestation directe de la procédure suivie et du plan devant le juge judiciaire par celui d’une contestation de l’homologation de l’administration. En déplaçant le contentieux, le PSE sera moins exposé à la nullité.

Concernant le licenciement individuel, la jurisprudence a également œuvré pour accroître le champ de la nullité. A titre d’exemple, l’absence d’énonciation des motifs dans la lettre de licenciement où leur imprécision prive celui-ci de motif réel et sérieux, tout comme l’absence même de lettre de licenciement, ou encore une simple erreur d’adresse entraînant sa non-réception. De même, une telle sanction est prononcée lorsque le licenciement intervient plus d’un mois après l’entretien disciplinaire. Enfin, par un arrêt en date du 10 janvier 1995, la chambre commerciale de la Cour de cassation a précisé que le licenciement d’un salarié prononcé sans autorisation ou après le refus de l’inspection du travail est nul.

Cette « dérive » peut cependant s’expliquer par la tendance protectrice du droit du droit à l’égard du salarié.

II. Explications de la « dérive » : la tendance protectrice du droit à l’égard du salarié

L’élaboration des règles du droit du travail s’appuie en partie sur le droit civil. Toutefois, d’un point de vue général, le droit civil et le droit du travail ont des finalités différentes. En effet, le droit civil serait ainsi un droit conservateur et aurait vocation à s’appliquer de manière stricte et rigide , alors que le droit du travail serait un droit « progressiste » et aurait une finalité plus humaine et sociale . De ce point de vue, le droit du travail aurait alors vocation à « adapter la sanction des conditions de formation des actes juridiques, issue de la théorie générale des contrats, à la finalité protectrice du droit du travail » .
Dès lors, le législateur et les juges ont multiplié les règles de forme et de procédure. Le formalisme pourra ainsi remplir des fonctions variées : permettre à l’administration de contrôler certaines procédures, informer le salarié, respecter la finalité du contrat etc.

Il est alors possible d’affirmer que sous une règle de forme se cache une finalité tendant à la protection du salarié. Aussi, la distinction faite règles de forme/règle de fond telle que faites par les partenaires sociaux apparaît discutable.

III. La remise en cause de la distinction règle de forme/règle de fond

Le droit du travail gagnerait à mettre en cohérence son système de sanctions, comme l’a fait le droit administratif. Ce dernier distingue les formalités « non substantielles » (formalité prévue essentiellement dans l’intérêt de l’administration etc.) des formalités « substantielles » (par exemple, la contradiction et l’information préalable des administrés , la motivation de l’acte). Les formalités « substantielles », qui sont sanctionnées par la nullité, sont entendues comme ayant une incidence sur le sens et sur le contenu de l’acte, qui visent à garantir l’exercice d’un droit .

En regardant de plus près, il possible de considérer que les règles de forme imposées, sous peine de nullité, pour les procédures de licenciement sont pour la plupart « substantielles ». En effet, elles visent à garantir l’exercice d’un droit : faciliter le droit au travail pour les PSE qui ont pour but de mieux accompagner les salariés dans leur retour à l’emploi , les droits de la défense pour les règles de procédure (délais, absence de lettre de licenciement, non-réception de la lettre etc.) et celles relatives à la motivation des actes.

Chapitre 2 – Une expertise des assimilations avec le concours des pouvoirs publics

L’article 24 de l’ANI précise que les différentes assimilations doivent être examinées par les partenaires sociaux avec le concours des pouvoirs publics qui sont composés du Gouvernement, du Parlement et de l’Administration (II). Il est cependant possible de constater que la volonté d’une sécurisation juridique dans la rupture du contrat de travail a déjà commencé (II).

I. Le concours des pouvoirs publics

La question actuelle sur la sécurité juridique dans les relations de travail concerne environ un million d’entreprises françaises employant au moins un salarié .
Il est alors essentiel pour les partenaires sociaux de faire intervenir les pouvoirs publics dans le débat relatif à la sécurisation des actes juridiques, puisque ceux-ci sont garants de l’intérêt général (A). De plus, les relations de travail sont notamment organisées par ces derniers (B). En effet, le droit du travail est marqué par l’importance de son caractère réglementaire et conventionnel. Un dialogue est donc nécessaire entre les deux protagonistes.

A. Les pouvoirs publics, garants de l’intérêt général

En principe, l’État et les pouvoirs publics prennent de la hauteur. Ils synthétisent le bien commun en se situant au-dessus des conflits de personnes ou de groupes et sont en ce sens, dépositaires de l’intérêt commun et non des intérêts particuliers. Ils prennent en charge tous les besoins qui relèvent du bien-être de la société, que l’initiative privée ne veut ou ne peut combler. En d’autres termes, ils sont les garants du « bien public ».

Afin de garantir l’intérêt général dans les relations de travail, les pouvoirs publics doivent donc combiner avec les intérêts divergents des salariés et dirigeants représentés. La loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 en est une illustration : le législateur s’est efforcé de concilier les capacités d’adaptation des entreprises avec les nouveaux droits des salariés.

B. Les pouvoirs publics et les partenaires sociaux, régulateurs des relations de travail

Les pouvoirs publics élaborent, suscitent et accompagnent la production de normes qui encadrent et définissent les conditions de travail.
L’ administration, et plus précisément la Direction des relations de travail et de la Direction générale de l’administration et de la Fonction publique ont un pouvoir réglementaire. Le Parlement vote des textes relatifs à la relation de travail résultant de la négociation avec les partenaires sociaux (comme c’est le cas de la loi de sécurisation de l’emploi de 2013) ou incitant à la négociation .

Aussi, si les pouvoirs publics ne détiennent pas le monopole de la production des normes sociales, ils ont néanmoins un rôle pivot dans leur élaboration et dans l’application des accords collectifs. Il est alors nécessaire de les faire intervenir dans la recherche des « aménagements ».

Cependant, le concours de pouvoirs publics ne risque-t-il pas d’entraîner un « renvoi de balle » entre les ceux-ci et les partenaires sociaux ?

II. Une volonté de sécurisation juridique de la rupture du contrat de travail qui a déjà commencé

Le législateur est intervenu à plusieurs reprises afin de faciliter et sécuriser juridiquement la rupture du contrat de travail.

Le Contrat Nouvelle Embauche (CNE) de 2005 en est une illustration. En effet, le CNE, finalement abrogé par la loi du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail, avait pour objectif de faciliter les embauches de salariés pour les petites PME en assouplissant les règles de rupture du contrat.

La rupture conventionnelle des CDI permet au salarié et à l’employeur de mettre fin au contrat de travail d’un commun accord sans passer par la voie d’un licenciement, dont la procédure est très encadrée. Cependant, malgré les apparences, la sécurité juridique recherchée est relative si on constate les nombreux contentieux qui se sont multipliés autour celle-ci.

Récemment, la loi de sécurisation de l’emploi de 2013 s’est penchée sur cette question de sécurisation de la rupture du contrat de travail.
D’une part, elle a prévu de nouvelles modalités pour le licenciement économique (cf : Chap. 1 I.), qui ont notamment pour objectif d’améliorer le contenu des plans de sauvegarde de l’emploi, et ainsi de sécuriser les procédures par la diminution des contentieux.
D’autre part, cette loi a limité le pouvoir d’appréciation des juges en matière de contestation d’un licenciement, par la modification de l’article L. 1235-1 du Code du travail. En effet, l’employeur et le salarié peuvent convenir d’un accord devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud’hommes prévoyant le versement par l’employeur d’une indemnité forfaitaire dont le montant est déterminé, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles, en référence à un barème fixé par décret. Ce barème est donné à titre indicatif, c’est-à-dire que les parties peuvent s’accorder sur des montants supérieurs. Ceci n’est pas très surprenant puisque l’article L. 1235-3 du Code du travail, qui impose le versement, par l’employeur, d’une somme équivalente aux 6 derniers mois de salaire lorsque le licenciement prononcé est jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse, n’a pas été modifié. Mais si le salarié accepte un accord sur ces bases forfaitaires, il est certain d’obtenir une indemnité rapidement alors qu’en l’absence de conciliation, l’indemnisation peut être plus importante mais elle est aléatoire et il faut attendre la fin de la procédure qui peut durer plusieurs années. Cet article réduit l’aléa sur le montant des indemnisations et l’insécurité juridique et financière subséquentes. Cela est favorable à l’employeur qui pourra ainsi « provisionner » une somme presque certaine pour un litige ayant des chances d’être réglé par un accord.

Enfin, malgré certains délais de prescription qui restent inchangées , celui relatif à la contestation de la rupture du contrat de travail engagé après le 16 juin 2013 a été raccourci : il est de 2 ans, contre 5 ans auparavant . Cette réduction permet de diminuer les risques de contentieux tardifs et d’alléger les passifs sociaux.

On le voit, la sécurisation juridique de la rupture du contrat de travail a déjà commencé.

Chapitre 3 – Un traitement dans le respect des principes généraux du droit et de la Constitution

Suite à l’examen des « assimilations », les éventuels aménagements devront se faire dans le respect des principes généraux du droit et de la Constitution.

Cette précision des partenaires est superflue et renvoie à la question de la « théorie de hiérarchie des normes », qui est une notion qui « siège au Panthéon des notions dominantes sur le sol français ». Cette théorie se résume à l’exigence que les normes inférieures soient conformes aux normes supérieures. Les conventions et accords collectifs se trouvant à l’extrémité inférieure de la hiérarchie, un nouvel accord des partenaires sociaux en vue d’ « aménagements » devra obligatoirement respecter la Constitution , ainsi que les principes généraux du droit.

Un point mérite d’être plus amplement développé concernant la Constitution de 1958 : l’article 34 relatif à la répartition des compétences entre le pouvoir législatif et les partenaires sociaux.
Le préambule de la Constitution de 1946 pose largement, en son alinéa 8, le « principe de participation » des salariés. Le Conseil constitutionnel se fonde sur ce texte pour reconnaître un droit à la négociation collective. D’un point de vue matériel, la répartition du champ de compétences est néanmoins dominée par l’article 34 de la Constitution, aux termes duquel : « La loi détermine les principes fondamentaux (...) du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale  ». Le Conseil constitutionnel a toujours fait prévaloir une lecture extensive de la détermination de ces « principes fondamentaux », seules les règles de mise en œuvre relevant du domaine réglementaire.
Or, dans sa jurisprudence, le Conseil constitutionnel n’a jamais considéré que l’alinéa 8 du préambule précité puisse restreindre le domaine de compétence du législateur fixé par l’article 34. En revanche, il ressort clairement de la jurisprudence constitutionnelle que le législateur peut confier aux partenaires sociaux le soin de préciser les modalités d’application des dispositions législatives.

Les « signataires » de l’ANI devront donc faire des propositions de réformes au législateur qui reste tenu de fixer les règles concernant le droit du travail, le droit syndical et celui de la sécurité sociale, à moins que d’ici là, la Constitution soit modifiée afin de prévoir que le législateur est lié par la volonté des partenaires sociaux.

Au final, cette volonté des partenaires sociaux de faire intervenir le législateur pour parvenir à la sécurité juridique menacée par les interprétations jurisprudentielles, est-elle possible ? La réponse est négative. Chaque disposition législative et conventionnelle reste et restera sujette à interprétation par les juges.
La sécurité juridique reste un idéal et donc par définition une idée difficilement réalisable.

Marie Caron Juriste