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Faut-il assigner en liquidation de communauté ? Par Guy Narran, Avocat.
Parution : lundi 3 février 2014
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La loi du 12 mai 2009, telle qu’elle est interprétée par la Cour de cassation, mérite l’attention du praticien en ce qui concerne la saisine du juge de la liquidation de la communauté.

L’intention du législateur dans sa loi du 12 mai 2009 était de scinder les deux instances, en divorce et en liquidation, le juge aux affaires familiales vidant sa saisine au moment du prononcé du divorce, et ce pour favoriser le partage amiable.

Selon la circulaire du 16 juin 2010, qui n’a aucune valeur normative, seule une assignation en partage peut saisir le juge aux fins d’un partage judiciaire.

Le juge vidant sa saisine en prononçant le divorce ne peut en effet désigner un notaire aux fins de procéder aux opérations de liquidation et de partage des intérêts patrimoniaux des époux, ni commettre un juge.

Le juge ne peut donc être saisi que par une assignation contenant un descriptif sommaire du patrimoine à partager et préciser les intentions du demandeur quant à la répartition des biens, ainsi que les diligences entreprises en vue de parvenir à un partage amiable (art. 1360 du CPC).

Il ne peut être saisi par un procès-verbal de difficultés établi par un notaire, puisque le prononcé du divorce vide, selon la circulaire, la saisine du juge aux affaires familiales et ouvre obligatoirement une phase de partage amiable.

Mais, la Cour de Cassation a donné son interprétation de la loi du 12 mai 2009 en indiquant dans deux arrêts des 12 avril et 7 novembre 2012 que le juge aux affaires familiales devait en même temps qu’il prononce le divorce ordonner le partage de communauté et procéder le cas échéant à la désignation du notaire pour y procéder sur la base de l’article 267 al. 1.

Cependant, la Cour de cassation semble considérer que la désignation d’un notaire, si elle est possible, n’est que facultative.

Elle estime donc que la décision de divorce ouvre la phase de partage judiciaire et que le juge du divorce reste saisi en tant que juge de la liquidation jusqu’à la fin de la procédure de partage, un procès-verbal de difficultés pouvant le saisir d’une contestation.

De ce fait, le juge du divorce n’épuise pas sa saisine par le prononcé du divorce et l’assignation en divorce vaut assignation en partage judiciaire.

En conséquence, compte tenu de l’interprétation qu’en fait la Cour de cassation, le juge aux affaires familiales ne pourrait être saisi que par un procès-verbal de difficultés et non pas par une assignation.

En conclusion, lorsque aucun notaire n’aura été désigné par le jugement de divorce, il sera parfaitement possible de faire délivrer une assignation en partage judiciaire.

Par contre, lorsqu’un notaire aura été désigné, le juge sera saisi de la liquidation par un procès-verbal de difficultés.

Cependant, dans un arrêt du 5 décembre 2013, la Cour d’appel d’Agen a considéré, que ce soit sous l’empire de la précédente loi ou de la loi actuelle, que l’établissement par le notaire liquidateur d’un procès-verbal de difficultés préalablement à la saisine de la juridiction n’avait jamais été une obligation et que les parties ayant toujours la possibilité d’assigner à cette fin, même si un notaire a été désigné, cette assignation n’était donc pas irrecevable.

En fait, le juge du divorce reste saisi en tant que juge de la liquidation jusqu’à la fin de la procédure de partage.

Il a la possibilité de désigner un notaire soit sur le fondement de l’article 1361 al.2 (partage simple, soit sur celui de l’article 1364 du CPC (partage complexe).

Il est donc nécessaire dans les conclusions de préciser le fondement légal de la demande et par voie de conséquence le partage que l’on demande au notaire désigné de faire.

Guy NARRAN Avocat, ancien avoué à la Cour d'Appel d'Agen www.narran.fr
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