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Assurance-vie et succession. Par Réda Bey, Juriste.
Parution : mercredi 19 février 2014
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L’assurance-vie obéit à un régime dérogatoire au droit commun des successions. Elle échappe en principe aux règles du rapport à succession et à celles de la réduction pour atteinte à la réserve héréditaire (article L. 132-13 du Code des assurances).
Compte tenu de ce régime dérogatoire, l’assurance-vie risque d’être utilisée pour contourner la réserve héréditaire. La loi et la jurisprudence posent néanmoins certains garde-fous.

Requalification en donation indirecte

Un contrat d’assurance-vie peut être requalifié en donation si les circonstances de fait dans lesquelles le bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable (en ce sens, Cass. ch. Mixte, 21 décembre 2007, n° 06-12.769 : Bull. civ. ch. mixte, n° 258 ; Cass. com., 26 octobre 2010, n° 09-70.927 ; Cass. 1re civ., 16 octobre 2011, n° 10-24.608).
Les juges tiennent compte d’éléments tels que l’âge du souscripteur, son état de santé, sa situation patrimoniale, etc.

En cas de requalification d’un contrat d’assurance-vie en donation indirecte, l’intégralité des sommes retombe dans le giron du droit des successions pour être soumise aux règles de droit commun du rapport et de la réduction.

Interprétation de la volonté du souscripteur

Lorsque le souscripteur fait référence à des contrats d’assurance-vie dans son testament, les juges peuvent parfois en déduire qu’il a voulu intégrer les sommes garanties par ces contrats dans sa succession et les soumettre de ce fait aux règles de droit commun du rapport et de la réduction. Tel est le cas lorsque le souscripteur déclare "léguer" les sommes garanties par des contrats d’assurance-vie (Cass. 1re civ., 10 octobre 2012, n° 11-17.891 : Bull. civ. I, n° 200) ou lorsqu’il indique que les contrats devront figurer dans le lot d’un légataire (Cass. 1re civ., 8 juillet 2010, n° 09-12.491 : Bull. civ. I, n° 170).

Primes exagérées

Les sommes versées par le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie à titre de primes sont néanmoins soumises au rapport et à la réduction lorsqu’elles sont manifestement exagérées eu égard à ses facultés (article L. 132-13, alinéa 2, du code des assurances). Selon la jurisprudence, le caractère exagéré des primes s’apprécie au moment de leur versement, au regard de l’âge, des situations patrimoniale et familiale du souscripteur et de l’utilité du contrat pour ce dernier (en ce sens, Cass. 2e civ., 7 février 2008, n° 06-16.373 ; Cass. 2e civ., 4 décembre 2008, n° 07-20.544).

Maître Réda Bey Notaire Les Artisans Notaires http://an.notaires.fr