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Loi sur la formation professionnelle : ce qui change. Par Marie-Elisabeth George, Elève-Avocat.
Parution : lundi 10 mars 2014
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La loi n° 2014-288 relative à la formation professionnelle, l’emploi et la démocratie sociale a été définitivement adoptée le 27 février dernier, à l’issue d’une procédure accélérée, et publiée le 6 mars 2014 au JO. Les apports de cette loi sont nombreux et touchent divers domaines.

Ne figurent néanmoins pas dans la loi, le volet sur l’élargissement des pouvoirs et l’organisation de l’inspection du travail ainsi que la réforme des règles de désignation des conseillers prud’homaux.

Le compte personnel de formation (CPF), un dispositif nouveau.

Cette loi instaure un dispositif novateur : le compte personnel de formation (CPF), dont les droits sont transférables, en lieu et place du DIF, à compter du 1er janvier 2015. Ouvert à toute personne d’au moins 16 ans en situation d’emploi, en recherche d’emploi ou accompagnée dans un projet d’orientation et d’insertion, le CPF pourra faire l’objet d’abondements et sera alimenté de :

• 24 heures par année de travail à temps complet jusqu’à un plafond de 120 heures ; puis

• 12 heures par année de travail à temps complet jusqu’au plafond maximal de 150 heures.

Dans les entreprises d’au moins 300 salariés, les critères et modalités d’abondement du CPF devront être abordés lors de la négociation sur la GPEC. A défaut d’accord, le CE sera consulté sur l’ensemble des thèmes.

Par ailleurs, le comité d’entreprise devra à l’avenir être consulté non seulement sur le plan de formation de l’année précédente, mais également sur celui de l’année en cours et de l’année à venir.

L’entretien professionnel sur les perspectives d’évolution professionnelle, un apport utile.

Autre apport de cette loi, les entreprises devront dès à présent veiller à se conformer aux nouvelles dispositions qui rendent obligatoire un entretien professionnel sur les perspectives d’évolution professionnelle, tous les 2 ans et après une longue période d’absence. Il remplace notamment l’entretien de mi-carrière pour les salariés de plus de 45 ans.

Comment procéder ? Cet entretien doit donner lieu à la rédaction d’un document dont la copie est remise au salarié. Tous les 6 ans, l’entretien est axé sur l’établissement d’un bilan du parcours professionnel du salarié. Dans les entreprises d’au moins 50 salariés, en cas de non-respect de ces dispositions au cours des 6 dernières années et si le salarié n’a pas bénéficié d’au moins 2 mesures parmi les 3 visées (actions de formation, acquisition d’éléments de certification par la formation ou une VAE, progression salariale ou professionnelle), son CPF sera abondé de 100 heures et l’entreprise versera à l’OPCA une somme forfaitaire.

Quel financement ?

A partir de 2016, au titre des rémunérations qui seront versées en 2015, la contribution des entreprises au financement de la formation se trouvera facilitée et unifiée par le versement d’une contribution unique (0,55% de la masse salariale pour les entreprises de moins de 10 salariés ; 1% de la masse salariale pour les entreprises d’au moins 10 salariés) à un seul collecteur, l’OPCA. Est ainsi supprimée la contribution de 0,9% pour le plan de formation par les entreprises de plus de 300 salariés.

Dans les entreprises d’au moins 10 salariés, une exonération partielle sera possible si une quote-part de 0,2% est affectée au financement du CPF, à condition que cela soit prévu par un accord collectif d’entreprise ou à défaut de branche et que les fonds soient utilisés dans les 3 ans suivant la signature de l’accord.

L’apprentissage assoupli.

L’assouplissement de l’apprentissage constitue également un volet important de la loi. Les contrats d’apprentissage seront désormais gratuits et pourront être conclus pour une durée indéterminée. La loi prévoit également que le conseil de prud’hommes statuera en la forme des référés pour les demandes de résiliation du contrat d’apprentissage, ce qui est de nature à grandement accélérer la procédure.

La démocratie sociale complétée.

Le volet « démocratie sociale » de la loi a consacré la jurisprudence de la Cour de cassation. A titre d’exemple, un syndicat pourra désigner un DS même en l’absence de candidat ayant recueilli personnellement 10% des voix ; un accord collectif pourra définir un périmètre de désignation des DS plus restreint que le comité d’établissement et un syndicat n’aura plus à justifier de 2 élus au CE pour y désigner un représentant syndical, dans les entreprises d’au moins 300 salariés.

Dorénavant, un délai minimum de 15 jours devra être respecté entre l’invitation à négocier le protocole d’accord préélectoral (PAP) et la première réunion de négociation. Un effort d’anticipation supplémentaire sera nécessaire en cas de renouvellement des IRP : un délai de 2 mois minimum devra être respecté avant l’expiration des mandats en cours.

Il faut également noter que la saisine de l’autorité administrative suspend le processus électoral jusqu’à la décision et entraîne la prorogation des mandats des élus en cours jusqu’à la proclamation des résultats du scrutin.

La réforme de la représentativité patronale instaurée par la loi permettra une régularisation des structures des branches et une réelle mesure de la représentativité, calquée sur la représentativité des syndicats de salariés. L’audience, dont la première mesure s’effectuera en 2017, sera calculée selon le nombre d’entreprises adhérentes à jour de leur cotisation.

La loi apporte également des précisions sur l’entrée en vigueur de la durée minimale pour les temps partiels : les contrats conclus à partir du 1er juillet 2014 devront prévoir une durée minimum de 24 heures.

Enfin, la loi a voulu garantir une meilleure transparence financière des comptes des CE, en rendant obligatoires la désignation d’un trésorier et la conservation des documents comptables pendant 10 ans. Le CCE devra désormais adopter un règlement intérieur. Selon leurs ressources, les CE seront soumis à différentes obligations en matière d’établissement des comptes, qui devront être approuvés et publiés avec un rapport de gestion. Les CE qui seront, en raison de la taille de l’entreprise, des ressources annuelles et du bilan, soumis à une obligation d’établir des comptes de droit commun, devront également faire certifier leurs comptes à compter du 1er janvier 2016.

Tels sont les apports de cette nouvelle loi. L’on peut regretter qu’elle ne réforme qu’en surface certains volets des relations de travail notamment les institutions représentatives du personnel. Une loi est certes votée mais une réforme profonde dans la pratique est attendue.

Marie-Elisabeth George, Avocat Cabinet CASSIUS PARTNERS Département Droit Social Site : http://www.cassiuspartners.com/fr/index.php [mail->cabinet@cassiuspartners.com]
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