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Des avocats du Conseil de l’Ordre de Paris impliqués dans l’affaire des écoutes Sarkozy-Herzog ?
Parution : mardi 11 mars 2014
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Depuis les révélations de l’affaire des écoutes entre Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog, membre du Conseil de l’Ordre de Paris, les avocats se montrent particulièrement choqués par ce nouveau scandale qui porte atteinte à leur profession. Mais il semblerait qu’elle ne soit pas tout « blanche ».

D’après l’article « Ecoutes : la justice soupçonne le conseil de l’ordre d’avoir prévenu Sarkozy » de Libération , la Justice serait en possession d’éléments qui prouveraient que Thierry Herzog et son client étaient au courant de la surveillance dont faisaient l’objet leur téléphone respectif grâce à « une fuite provenant du Conseil de l’Ordre du Barreau de Paris ».

En effet, l’information judiciaire déclenchée par le parquet financier fin février a été ouverte pour trafic d’influence mettant en cause le juge Azibert mais également pour violation du secret de l’instruction. Le second motif de cette enquête viserait des avocats du Conseil de l’Ordre de Paris qui auraient averti leurs confrères [1] au sujet de leur mise sur écoute.

Comment le Conseil de l’Ordre de Paris aurait-il pu être au courant de la mise sur écoute de Thierry Herzog et de Nicolas Sarkozy ?

Un formalisme très précis doit être respecté pour placer un avocat sur écoute. Les interceptions téléphoniques judiciaires sont régies par les lois du 10 juillet 1991, 8 février 1995 et 9 mars 2004. Elles sont possibles pour les délits réprimés d’une peine de deux ans minimum. Dans ce cas, chacun peut être écouté sur décision d’un juge, mais des restrictions existent pour les parlementaires, les magistrats, les avocats et les journalistes.

Lorsqu’un avocat est mis sur écoute, son bâtonnier doit obligatoirement en être informé. Les écoutes décidées par un juge ne peuvent excéder quatre mois, délai qui peut être renouvelé par une nouvelle décision du juge. Le procès-verbal de ces écoutes ne doit faire état que ce qui concerne la commission d’une infraction. De plus, les écoutes et leurs retranscriptions peuvent faire l’objet de demandes d’annulation devant la Chambre de l’instruction, puis devant la Cour de cassation.

C’est ce qu’a rappelé Christiane Taubira, Ministre de la Justice, en déclarant que « les interceptions judiciaires sont encadrées par des lois qui permettent de veiller à la préservation des droits de la défense ».
Elle a en outre rappelé que « nous avons un droit qui dit très précisément que les interceptions judiciaires sont encadrées et que, dans le cadre des avocats, le bâtonnier doit être prévenu. D’autre part, il assiste aux perquisitions éventuelles, donc le droit prévoit cela ».

Le bâtonnier de Paris était donc au courant de la mise sur écoute de ses confrères mais ne pouvait la dévoiler car elle est soumise au secret de l’instruction.

Alors qui aurait révélé à Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog qu’ils avaient été mis sur écoute ?

Pierre Olivier Sur, Bâtonnier de Paris, joint par Libération, a refusé de confirmer ou d’infirmer s’il était effectivement au courant ou non de ces écoutes.

Il a toutefois déclaré, au sujet des soupçons qui pèse sur le Conseil de l’ordre de Paris, que ces accusations sont « hypothétiques et dubitatives ». « Hypothétique car des centaines de personnes étaient au courant que Nicolas Sarkozy était écouté. Je répondrai donc aux questions des juges, je coopérerai avec la justice, comme je l’espère les cent autres personnes qui étaient au courant de l’enquête. Ces accusations sont également dubitatives car rien de matériel, de concret ne vient les soutenir » précise le bâtonnier de Paris.

Par ailleurs, Pierre-Olivier Sur, a annoncé avoir écrit au Président de la République pour lui demander « d’arbitrer dans cette affaire » et de prendre « les mesures qu’ils conviennent » dans la mesure où les juges seraient « sortis de leur saisine ».

Cela peut sembler curieux dans la mesure où la profession d’avocat ne cesse d’affirmer que la Justice se doit d’être indépendante vis à vis de l’Etat.

Réginald Le Plénier _ Rédaction du Village de la justice

[1Nicolas Sarkozy est membre du Barreau de Paris

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