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Le congé avec offre de renouvellement et rétractation. Par Joan Dray, Avocat.
Parution : mercredi 26 mars 2014
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Le bailleur peut consentir un congé avec offre de renouvellement.
Si le congé est acte unilatéral définitif, le bailleur est toujours libre de revenir sur sa décision.

Le statut des baux commerciaux prévoit des hypothèses de rétractation et un droit d’option au preneur et bailleur.

1/ Le congé est un acte unilatéral : une fois émis, il est définitif.

Le congé est un acte unilatéral : une fois émis, il est définitif.
Le congé est un acte unilatéral qui n’a pas besoin d’être accepté par celui qui le reçoit.
Il découle de cette nature juridique qu’il ne peut pas être rétracté sans l’accord de son destinataire.

Il est, depuis fort longtemps, admis par la jurisprudence que le congé est un acte unilatéral qui produit ses effets sans avoir à être accepté par son destinataire, et qu’il met donc fin au bail de manière irrévocable, sans pouvoir être rétracté par son auteur sans l’accord explicite de son destinataire [1], et ce même en présence d’un congé notifié à l’instigation du preneur lui-même.

En dehors d’une rétractation du congé acceptée par le locataire, ou non discutée [2], les cas de rétractation permise portent sur l’offre de renouvellement, ou sur l’offre d’indemnité d’éviction, ou encore sur le refus de
renouvellement, mais ne portent pas sur le congé proprement dit dont les effets continueront de se produire après qu’elle a été formulée.

Il existe des tempéraments et le statut des baux commerciaux reconnaît au bailleur un droit d’option.

2/ Le droit d’option du bailleur antérieurement et postérieurement à la saisine du juge des loyers commerciaux.

Le statut prévoit deux hypothèses de rétractation par le bailleur, celle de l’article L. 145-57 alinéa 2 du Code de commerce, si le loyer fixé pour le renouvellement ne lui convient pas, et celle de l’article L. 145-58, quand il a donné congé en offrant une
indemnité d’éviction qui se révélera trop onéreuse, ce deuxième cas ne nous intéresse pas.

Le droit d’option avant la saisine du juge

Le droit d’option est le droit pour le bailleur qui a initialement offert le renouvellement du bail de le refuser ensuite, ou pour le preneur qui avait d’abord demandé ou accepté le renouvellement d’y renoncer.

Le bailleur a toujours le droit de refuser le renouvellement pour reprendre les lieux loués sans motif particulier.

Il devra alors payer une indemnité d’éviction.

« Même en tenant pour acquis qu’il ait accepté le renouvellement du bail, le bailleur tire des dispositions de l’article 31, alinéa 2
(du décret du 30 sept. 1953, actuellement article L. 145-57 du Code de commerce) le droit de refuser ce renouvellement à charge pour lui de payer l’indemnité d’éviction
 [3].

Le délai prévu par l’art. 31 art. [4], al. 2, n’interdit pas au bailleur ou au preneur d’exercer leur droit d’option antérieurement. [5]

L’une des parties peut exercer son droit d’option avant la saisine du juge en fixation du montant du loyer. [6]

Le bailleur ayant offert le renouvellement du bail moyennant un nouveau loyer et le nouveau locataire n’ayant lui-même accepté que le principe du renouvellement du bail, les pourparlers concernant le nouveau loyer n’ayant pas abouti, aucune disposition légale n’interdit au bailleur d’exercer l’option que lui reconnaît l’art. 31 [7], al. 2, avant même la fixation judiciaire du montant du loyer.

Ce délai d’un mois est l’ultime délai pour exercer le droit d’option.

La jurisprudence a admis qu’il pouvait être exercé antérieurement « à tout moment, tant durant l’instance en fixation des conditions du nouveau bail qu’avant même l’introduction de cette instance » (même "avant la saisine du juge en fixation du
montant du loyer).

❍ Le droit d’option postérieure à la saisine du juge

Même après fixation définitive du loyer du bail renouvelé par la juridiction compétente,les parties disposent encore d’un ultime délai pour accepter le prix fixé judiciairement, ou au contraire pour se raviser : le bailleur peut encore décider de refuser le renouvellement, et le preneur peut finalement préférer y renoncer.

La Cour de cassation décide que l’acceptation du principe du renouvellement du bail n’a qu’un caractère provisoire et n’interdit pas au bailleur de refuser par la suite le renouvellement et que "tant que les conditions d’un bail ne sont pas définitivement fixées.

Un bailleur qui a offert le renouvellement du bail et qui a reçu une réponse du preneur déclarant accepter le principe du renouvellement, croit que ce dernier est lié et ne peut plus partir avant l’expiration d’une période triennale ; c’est une erreur ; le preneur peut renoncer au renouvellement à tout moment.

❍ Formes de l’option

L’exercice du droit d’option n’est soumis à aucune forme particulière, même s’il paraît préférable, en pratique, de le notifier par acte extrajudiciaire.
Le propriétaire qui exerce son droit d’option et refuse le renouvellement n’a pas d’avantage de formalités particulières à respecter.

On conseillera toutefois en pratique de signifier le refus de renouvellement par exploit d’huissier, et de rappeler au locataire le délai d’action de deux ans, par analogie avec le dernier alinéa de l’article L. 145-10 du Code de commerce.

❍ Condition de fond de l’option

Le droit d’option ne peut être exercé qu’à défaut d’accord des parties sur le prix du bail renouvelé.

Si un accord est intervenu sur le prix, le bail se trouve définitivement renouvelé quelles que soient d’ailleurs les formes utilisées pour matérialiser cet accord .

Il n’est alors plus possible de le remettre en cause.

Ainsi, lorsque le locataire accepte à la fois l’offre de renouvellement et le prix demandé par le bailleur, l’accord est parfait et le renouvellement définitivement acquis .

Les parties ne peuvent donc plus exercer le droit d’option.

En revanche, si les parties se sont mises d’accord sur le principe du renouvellement, mais non sur le prix, elles peuvent toujours exercer leur droit d’option.

Tant qu’aucun accord n’est intervenu sur le prix du bail, le bailleur peut revenir sur son offre.

Il en va de même si le bailleur a procédé aux augmentations contractuelles à compter de la date du renouvellement, tant qu’aucun accord ni aucune fixation définitive ne sont intervenus.

Joan DRAY Avocat à la Cour [mail->joanadray@gmail.com]

[1CA Versailles, 1° avr. 1993

[2v. par ex., Civ. 3e, 30 juin 1999

[3Cass. 3e civ., 9 oct. 1974

[4L. 145-57, C. com.

[5Civ. 3e, 15 févr. 1983

[6Civ. 3e, 23 mars 2011

[7art. L. 145-57,C. com.