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Assurance en crédit immobilier : conseil pour l’assureur, mais sincérité pour l’emprunteur. Par Laurent Denis, Juriste.
Parution : vendredi 28 mars 2014
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La fausse déclaration, par omission, d’informations médicales importantes pourtant connues de l’assuré entraîne la nullité du contrat d’assurance emprunteur.
Cet acte déloyal lui fait ainsi perdre le bénéfice de la protection assurantielle qu’il recherchait, alors que, devenu invalide, il avait pourtant grand besoin de l’assurance emprunteur pour prendre en charge les mensualités du crédit immobilier.
Cet arrêt rappelle que le devoir de conseil des professionnels de l’assurance, tout comme de la banque ou de la finance, assureurs, banques, mais aussi intermédiaires et courtiers distributeurs, ne trouve à s’exercer qu’à condition que le client apporte loyalement les informations nécessaire à ce conseil.
(Cour de cassation, Civ. 2e 6 mars 2014, n°13-12.136)

Le client souscrit un crédit immobilier en mars 2001 et, simultanément, à l’assurance emprunteur proposé par le contrat de groupe de la banque prêteuse.

Déclaré en incapacité de travail en 2005, un examen médical fait apparaître que le client n’avait pas déclaré, à la souscription, un traitement médical en rapport avec l’accident de santé subi par l’emprunteur. Or, le client suivait ce traitement depuis 1995.

L’assureur refuse à l’assuré-emprunteur la prise en charge d’une partie des mensualités du crédit, et réclame le remboursement de celles déjà payées par lui.

L’enjeu financier du litige dépasse 60.000 euros, ce qui n’est pas rien.

Le Tribunal de grande instance, puis la Cour d’appel de Lyon confirment l’analyse de l’assureur. Le Code des assurances sanctionne en effet toute fausse déclaration intentionnelle de l’assuré (art. L. 113-8).

L’assuré doit répondre "exactement aux questions posées par l’assureur" (art. L. 113-2 2° du même Code).

L’emprunteur se pourvoit en cassation, soutenant que cette fausse déclaration n’avait pas modifié l’appréciation du risque par l’assureur et que sa mauvaise foi n’était pas démontrée.

Peine perdue.

Le questionnaire de santé est jugé parfaitement clair. Les questions posées sont de nature fermée (oui/non) et le candidat à l’assurance y répond à l’inverse de la réalité, qu’il ne peut ignorer. L’omission d’une information demandée, cruciale, entraîne donc une perception erronée du risque, par l’assureur.

Cette "fausse déclaration intentionnelle de la part de l’assuré [qui] change l’objet du risque", selon les termes de l’article L. 113-8 du Codes des assurances.

La Cour de cassation ne peut que confirmer la nullité du contrat pour fausse déclaration, en application des dispositions du Code des assurances.

Cet arrêt invite à placer en parallèle les obligations des professionnels, assureur porteur de risques, fournisseur du contrat, ou intermédiaire en assurance, tel qu’un courtier, par exemple (en l’espèce, il s’agissait d’une vente directe du fournisseur, passé par une agence bancaire de son réseau) et celles du client, bénéficiaire des obligations d’information et de conseil.

La clarté du processus de souscription, en regard des obligations de conseil de l’assureur (ou du distributeur) fait échec à l’omission, volontaire, d’informations substantielles de la part du client.

Dans ce cas d’espèce, la stricte démarche de conformité se révèle hautement protectrice du professionnel.

La sincérité et la bonne foi ont encore leur place dans le contrat : pour les particuliers, elles sont le gage d’une bonne protection.

Laurent Denis Juriste - Droit bancaire et financier - Droit et Conformité des Intermédiaires www.isfi.fr www.droit-distribution-bancaire.fr