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Les élections du CHSCT : quels intérêts, au profit de qui ? Par Gildas Neger, Docteur en droit.
Parution : lundi 5 mai 2014
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L’élection des représentants du personnel au Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CHSCT) est faite par un « collège désignatif » constitué de l’ensemble des élus DP et/ou CE.

Par analogie avec les élections sénatoriales, ce sont les « Grands Électeurs » qui sont chargés de désigner les membres du CHSCT.

Ce mode de désignation soulève toutefois moult questions.

En premier lieu, l’objectivité de la désignation (Les copains d’abord...)

Il va sans dire que le pouvoir donné aux Grands Électeurs pour procéder à l’élection des membres du CHSCT leur permets une latitude telle qu’il est bien légitime de se demander si les choix effectués le sont en fonction de la compétence des prétendants ou bien des liens qui existent entre électeurs et « soupirants ».

Il est humain de favoriser ceux d’entre nous dont les positions nous sont similaires. En ce sens, il est d’évidence que le choix des prétendants sera teinté d’objectivité, nonobstant les éventuelles compétences existantes parmi les prétendants.

Ce copinage est proche de la corruption, dans la mesure où le risque est fort que le nouveau nommé, ni compétent, ni préoccupé de l’intérêt général, soit par contre surtout prêt à rendre des services (renvoyer l’ascenseur) à celui qui l’a nommé, voire à pratiquer lui-même le copinage.

En deuxième lieu, la question de la compétence des personnes désignées.

Comme nous venons de le préciser, la compétence est, dans un tel contexte, ignorée. En effet, il appartiendra aux nouveaux élus, de se former a posteriori. Situation pour le moins curieuse puisqu’en effet les compétences requises seront réputées acquises dans le cadre d’une formation qui sera dispensée après la prise de fonctions ! Et nul ne peux préjuger de la capacité des nouveaux élus à appréhender de façon efficiente les éléments constitutifs de ladite formation afin de remplir leurs missions de manière optimale.

En troisième lieu, l’existence d’une « mainmise » du CE sur le CHSCT (Je te tiens, tu me tiens...).
Là encore, il est logique de se poser la question de l’éventuelle existence d’un lien invisible de subordination entre les électeurs et les élus. Élus par les Grands Électeurs, les membres du CHSCT apparaissent en effet « redevables » de leur mandat. Dès lors, l’existence d’une « emprise » des premiers sur les seconds ne semble pas relever d’une imagination débridée.

Last but not least, la possibilité, pour les IRP de jouer un rôle métabloquant dans le cadre des décisions de l’entreprise (On se sert du droit pour se serrer les coudes – Népotisme entrepreneurial).

Si l’on considère la possibilité de concaténation des fonctions du CE et du CHSCT, le second élu par le premier, le risque est fort pour le chef d’entreprise de subir les conséquences de l’agrégation des droits des deux instances en cas de conflit.

Critiquer les CE, le CHSCT, les modalités d’élection de ce dernier comité… Voilà de quoi s’attirer les foudres de quelques bienpensants et « bienprofitants » des systèmes existants.

Qu’importe.

Il est aujourd’hui décisif, à l’heure où les responsabilités civiles, voire pénales, pèsent de plus en plus sur les épaules des chefs d’entreprises, au fallacieux motif qu’il leur est imposé des obligations de résultats en matière de sécurité (également pour ce qui relève des risques psycho-sociaux que personne à ce jour ne sais définir, hors quelques élues désireuses de laisser leur nom à une loi plutôt que de réfléchir en bonne intelligence), de dénoncer l’absence de responsabilité des comités et, plus précisément, du CHSCT.

Gildas Neger Docteur en Droit Public
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