Village de la Justice www.village-justice.com

L’employeur peut demander à son salarié de conclure une rupture conventionnelle ! Il le peut même si un différend existe avec ce salarié ! Par Nadine Regnier Rouet, Avocat.
Parution : mardi 20 mai 2014
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/employeur-peut-demander-son,16933.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Voilà deux bonnes nouvelles pour les employeurs dans la même décision de la Cour de cassation. Elles concernent les ruptures conventionnelles.

Voilà deux bonnes nouvelles pour les employeurs sur les ruptures conventionnelles qui viennent les sécuriser un peu plus encore pour faire de ce nouveau mode de rupture du contrat de travail un vrai « joker » pour les employeurs et les salariés décidés à « en finir » sans démission ni licenciement.

Règle 1 : Demander au salarié de négocier ensemble une rupture conventionnelle : un droit pour l’employeur

Règle 2 : Initier une rupture conventionnelle même s’il existe un conflit avec le salarié ? C’est possible pour l’employeur

Dans cette affaire, un salarié engagé comme peintre automobile par un garage est, après plusieurs années, en conflit avec son employeur qui lui adresse deux avertissements. Puis, après encore de nouveaux reproches, l’employeur lui propose de signer une rupture conventionnelle, ce que le peintre accepte. La rupture conventionnelle est homologuée par l’Administration. Par la suite, le salarié attaque son ex-employeur et conteste la rupture conventionnelle qu’il a signée en soutenant qu’elle doit être requalifiée en un licenciement abusif car sans cause réelle et sérieuse.

Les juges d’appel jugent dans le sens de la demande du salarié et requalifient la rupture conventionnelle en licenciement abusif en s’appuyant sur les faits : il existait un différend entre l’employeur et le salarié, l’employeur ayant infligé deux avertissement au salarié pour travail de mauvaise qualité et ayant formulé de nouveaux reproches juste avant de le convoquer à deux entretiens pour évoquer une possible rupture conventionnelle et en définir les composantes

La Cour de cassation juge, le 15 janvier 2014 (n° 12-23942), que ces faits ne sont pas de nature à permettre aux juges de condamner l’employeur car ils contreviennent aux dispositions légales de l’article L1237-11 du Code du travail.

Cet article prévoit :
« L’employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie.
La rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties.
Elle résulte d’une convention signée par les parties au contrat. Elle est soumise aux dispositions de la présente section destinées à garantir la liberté du consentement des parties. »

Sur cette base légale qui met en avant un accord consensuel sur les conditions dans lesquelles la rupture va intervenir, la Cour de cassation a maintes fois déjà affirmé que « l’existence, au moment de sa conclusion, d’un différend entre les parties au contrat de travail n’affecte pas par elle-même la validité de la convention de rupture conventionnelle. »

Elle le rappelle dans cette décision.

Par conséquent, même si l’employeur avait adressé au salarié deux avertissements dans les mois précédant la signature de la convention de rupture et même s’il lui avait encore fait des reproches juste avant d’entamer la négociation de la convention de rupture conventionnelle, il lui était loisible de la proposer au salarié et de la négocier avec lui et ces faits, par eux seuls, ne pouvaient empêcher qu’un accord soit noué entre les parties.

Pour nier la réalité de cet accord, il aurait fallu que d’autres faits soient apportés aux juges de façon à faire présumer que le consentement du salarié n’était pas réel (menaces, violence, tromperie, par exemple). Ce qui n’était pas le cas.

Nadine Regnier Rouet Avocat au Barreau de Paris spécialisé en droit du travail Site internet : www.n2r-avocats.com [Email->contact@n2r-avocats.com]
Comentaires: