Village de la Justice www.village-justice.com

Ambush Marketing 1 - Fédération Française de Rugby 0 ! Par Juliette Robin, CPI.
Parution : jeudi 5 juin 2014
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/Ambush-Marketing-Federation,17076.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

A l’heure de la Coupe du Monde 2014 au Brésil, l’ambush marketing est le sujet brulant du moment.

En effet, pour les sociétés qui ne sont pas partenaires de cet évènement planétaire, il est toujours tentant, dans la période qui précède l’évènement, de surfer sur l’évènement en donnant un angle un plus « sportif » à sa publicité. Le drapeau du Brésil par-ci, un ballon de foot par là…

Les organisateurs veillent au grain pour protéger les précieux sponsors et les références à cet évènement sont clairement encadrées [1]

Mais voici qu’un arrêt de la Cour de Cassation du 20 mai 2014 vient ouvrir la porte aux adeptes de la communication embusquée en donnant le cadre de l’ambush marketing acceptable.

Les faits sont assez ordinaires en ces périodes d’euphorie sportive ….la société Fiat fait paraître dans le quotidien sportif l’Equipe, le 24 février 2008, une publicité faisant référence à deux matchs du tournoi des VI Nations, afin de promouvoir son nouveau modèle d’automobile Fiat 500 sur le marché français. La publicité était construite de la manière suivante :

*En grands caractères le résultat d’un match FRANCE 13 ANGLETERRE 24 suivie de la phrase : “La Fiat 500 félicite l’Angleterre pour sa victoire et donne rendez-vous à l’équipe de France le 9 mars pour France-Italie”
*En dessous, en grands caractères d’imprimerie “ITALIE 500”, et sous cette mention, à gauche la photographie en noir et blanc d’un véhicule Fiat 500, à droite le logo Fiat avec l’adresse de son site internet et les noms des concessionnaires de différents départements,

A noter que la société FIAT avait fait paraitre sa publicité en pleine page, à la suite des pages consacrées à l’actualité du Rugby sur lesquelles figuraient notamment des encarts des partenaires officiels.

Assignée pour violation de son monopole d’exploitation des évènements sportifs et agissements parasitaires par la FFR, la société FIAT se défendait d’avoir voulu tirer profit de l’évènement. Elle obtint d’ailleurs gain de cause jusque devant la Cour d’Appel.

C’est donc sur le pourvoi formé par la Fédération Francaise de Rugby, que la Cour de Cassation vient de se prononcer.

En résumé, la Fédération Française de Rugby soutient que seules les fédérations sportives (et organisations visées par l’article L. 333-1 du Code du sport) sont propriétaires du droit d’exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu’elles organisent et que la parution d’une publicité pour un nouveau modèle de voiture qui s’appuie sur un des matchs de cet évènement constitue un acte d’exploitation d’une compétition non autorisé.

Pour rappel, l’acte d’exploitation d’une compétition sportive est défini comme toute forme d’activité économique ayant pour finalité de générer un profit et qui n’aurait pas d’existence si la manifestation sportive qui en est le prétexte ou le support nécessaire n’existait pas.

La Cour de Cassation ne suit pas l’argumentation de la FFR et se rallie à la décision de la Cour d’appel.

Les éléments retenus par la Cour pour juger la publicité licite sont les suivants :

-  FIAT ne pas manifeste pas son soutien à l’équipe de France au sein de la publicité
-  le logo officiel de la FFR ou la dénomination FFR ne sont pas utilisés
-  la publicité s’est bornée à reproduite un résultat sportif d’actualité rendu public en première page et à faire état d’une future rencontre également connue

Que faut-il en tirer ?

-  qu’il n’est pas interdit de parler du sport et des résultats sportifs en rapport avec l’évènement à condition de se limiter aux faits d’actualités bruts, de le faire dans un contexte d’information en se raccrochant à un support d’actualités.

-  que la reproduction de tout élément officiel lié à un évènement sportif, tombe clairement sous le coup des dispositions de l’article L. 333-1 du Code du sport. Toute reprise de logo, dénominations officielles (nom de l’évènement, de la Fédération etc..), maillots de football etc… sont à bannir

-  que bien que dans ce cas, l’annonceur soit passé entre les gouttes, l’ambush marketing est un jeu dangereux, les fédérations sportives étant particulièrement attentives à préserver les investissements des sponsors.

Il y a donc fort à parier qu’entre les experts en marketing et les Fédérations sportives, le match ne fait que commencer …

Juliette ROBIN, INLEX IP EXPERTISE Conseil en Propriété Industrielle - Expert en Politique de Marque (www.LexPerform)