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Google : entre le droit à l’oubli et le droit à l’information. Par Alexandra Charnois, Avocat.
Parution : jeudi 30 octobre 2014
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Obtenir le déréférencement des pages Google mentionnant ses données à caractère personnel est aujourd’hui possible.

Depuis une décision de la Cour de Justice de l’Union Européenne (ci-après « CJUE ») du 13 mai 2014, les particuliers se sont fait reconnaître un « droit à l’oubli ».

En effet, la CJUE a énoncé que « l’exploitant d’un moteur de recherche sur Internet est responsable du traitement qu’il effectue des données à caractère personnel qui apparaissent sur des pages Web publiées par des tiers ».

En bref, un internaute bénéficie du droit de faire déférencer des informations qui seraient « inadéquates, non pertinentes et excessives » au sens de la loi dite « Informatique et Libertés » du 6 janvier 1978.

Comment cela a-t-il commencé ?

C’est un ressortissant espagnol qu’il faut remercier ! Ce dernier faisait alors l’objet de plusieurs articles datant de 1998 et relatant son problème de saisie immobilière.

Arguant du temps écoulé depuis cet événement, cet homme a saisi la juridiction espagnole compétente.

Si celle-ci ne lui a pas donné raison concernant sa demande de suppression des articles litigieux, elle lui a tout de même accordé le droit d’être déférencé sur le moteur de recherche Google.

Depuis lors, de nombreuses demandes ont été effectuées jusqu’à la fameuse décision de la CJUE précitée.

Mais concrètement, comment se matérialise aujourd’hui cet avènement du droit à l’oubli ?

Google, tout comme Microsoft et son moteur de recherche Bing, ont mis en ligne un formulaire permettant de leur adresser directement une demande de déréférencement, la totalité de la procédure s’effectuant ainsi entièrement en ligne.

Dès lors, il suffit pour l’internaute mécontent de remplir le formulaire, de le signer et d’y joindre une copie de sa pièce d’identité.

Cette simplicité de mise en œuvre se retrouve par ailleurs dans les statistiques récemment annoncées.

Au 23 octobre dernier, la star des moteurs de recherche a indiqué qu’il avait déjà reçu 153.000 demandes dont environ 29.000 en France.

Les français, friands de cette procédure, arrivent en tête des demandeurs, devant l’Allemagne et le Royaume-Uni et, sans surprise, les sites les plus concernés restent les réseaux sociaux et le site Youtube.

Néanmoins, Google navigue en eaux troubles, se perdant dans les méandres du droit à l’oubli et du droit à l’information.
Essayant en effet de jongler entre ces deux grands principes, le moteur de recherche en arrive à refuser grand nombre de demandes.

En effet, la logique européenne, privilégiant la protection des données à caractère personnel s’oppose à la logique américaine, plus encline à la liberté absolue et pour laquelle seules les décisions de justice devraient être exécutées.

Pour les chiffres français, Google a annoncé avoir accepté 50 % des sollicitations, en avoir refusé 20 et faire des recherches complémentaires pour les 30 % restant.

Mais cela présente un effet « pervers » ! Les internautes français dont les demandes de droit à l’oubli ont été refusées se tournent de plus en plus fréquemment, et à juste titre, vers la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (ci-après « la CNIL »), qui a déjà enregistré environ 80 plaintes.

Cela apporte une conséquence logique : le G29 qui regroupe toutes les CNIL à l’échelle européenne travaille sur une prochaine recommandation qui mettra en lumière, de façon sans doute plus explicite, les critères posés par la CJUE en 2014.

La suite au prochain épisode !

Alexandra Charnois, Avocat
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