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La CNIL simplifie les démarches en matière d’écoutes et d’enregistrements de conversations téléphoniques sur le lieu de travail avec la NS57. Par Florent Gastaud, Juriste.
Parution : vendredi 16 janvier 2015
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Publiée au journal officiel du 6 janvier 2015, la délibération n° 2014-474 de la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (CNIL) vient porter adoption de la norme simplifiée n°57 (NS57) relative aux traitements de données à caractère personnel relatifs aux écoutes et enregistrements téléphoniques sur le lieu de travail.

La fiche pratique devenue norme simplifiée

L’essor des relations commerciales à distance et des normes qualité au sein des entreprises ont rendu courant les traitements d’écoutes et enregistrements de conversations téléphoniques sur le lieu de travail. Que ce soit dans le cadre de l’amélioration d’un service client ou pour des besoins de formation, la majorité des entités disposant d’un point de contact téléphonique sont équipées de tels dispositifs d’enregistrement.

Depuis plusieurs années, la CNIL a pu identifier ce besoin et y consacrait jusqu’alors une fiche pratique destinée aux responsables de traitement. Cette dernière reprend de manière synthétique les grands principes de la loi de 78, à savoir dans le cas d’espèce les nécessités de proportionnalité du traitement, sa légitimité, l’information devant être procurée aux différentes personnes concernées (bien souvent les salariés et clients), les mesures de sécurité devant être garanties, etc.

A défaut de norme simplifiée concernant ces traitements, tout responsable de traitement souhaitant mettre en place un dispositif d’écoute et d’enregistrement des conversations sur le lieu de travail, devait réaliser une déclaration normale auprès de la Commission afin d’assurer la légalité de son traitement. Une exception était tout de même à relever, celle des entités ayant désigné un Correspondant Informatique et Libertés (CIL) et pour lesquelles une inscription au registre du CIL suffisait.

Suite à la publication de la NS57, fidèlement calquée sur la fiche pratique jusqu’alors publiée sur le site de la CNIL, les démarches administratives deviennent simplifiées pour les entités n’ayant pas désigné de CIL. Un traitement conforme aux dispositions de la norme simplifiée dispense ses entités de déclaration normale auprès de la CNIL. Jumelée avec la NS39 relative aux autocommutateurs téléphoniques, les entreprises disposent désormais d’un duo de normes simplifiées leur permettant de cadrer leurs traitements de DCP relatifs à la téléphonie tout en réduisant leurs démarches administratives.

Le régime de la norme simplifiée n°57

Champs d’application
Loin d’être innovante, la norme simplifiée n°57 se veut restrictive. Elle concerne tant les organismes publics que privés souhaitant mettre en place un système d’écoute et/ou d’enregistrement téléphonique sur leur lieu de travail.

Tous les dispositifs de ce type ne peuvent prétendre à bénéficier de la NS puisque la délibération exclut stricto sensu les enregistrements de collecte de données sensibles (origines raciales ou ethniques, opinions politiques, philosophiques, religieuses, appartenance syndicale, données de santé ou relatives à la vie sexuelle), les enregistrements permanents ou systématiques des appels, les écoutes et enregistrements faisant l’objet d’un couplage avec des données provenant d’une capture d’écran du poste informatique de l’employé ou encore les enregistrements audiovisuels.

La norme simplifiée n°57 reste donc cantonnée aux très traditionnels enregistrements téléphoniques non systématiques utilisés dans le cadre de la formation et/ou de l’évaluation des employés ou dans celui de l’amélioration de la qualité du service proposé par l’entreprise. Typiquement, cette norme peut concerner le traitement opéré par le SAV téléphonique d’une marque répondant aux appels de ses clients.

Les dispositifs plus modernes, à l’instar du service SAV fourni par la société "AutoLib" sur ses bornes installées en ville et permettant notamment des conversations audiovisuelles s’en trouvent donc exclus.

En ce qui concerne les notions de « permanent ou systématique », il est important de signaler qu’elles ne concernent que les enregistrements. Dans le cadre la norme simplifiée n°57, 100% des conversations pourront donc être écoutées. Egalement, un traitement recensant 90% des appels téléphoniques ne pourrait, à priori, être considéré comme étant permanent ou systématique et intègrerait ainsi le champ de cette NS.

Données collectées
A l’instar de cette norme, les données pouvant être collectées sont également restreintes. Peuvent ainsi faire l’objet d’un traitement les enregistrements sonores mais également des données d’analyse que sont les données d’identification de l’employé et de l’évaluateur (à défaut de précision, cela peut être le nom/prénom, un numéro RH interne ou tout autre moyen d’identification), la date, l’heure et la durée de l’appel ainsi que l’évaluation professionnelle du salarié.

Il est notable de constater l’absence des retranscriptions écrites des conversations orales qui sont dès lors exclues du champ de cette norme simplifiée. Une entreprise souhaitant tout de même collecter ces données devra donc réaliser une déclaration normale. Egalement, les numéros de téléphone ne peuvent figurer dans le traitement mis en œuvre sur le fondement de la NS57 ; ces derniers sont en effet régis par la NS47 constituant un traitement distinct aux finalités distinctes.

En matière de durée de conservation, la position de la CNIL n’a pas évolué depuis la parution de sa fiche pratique puisque les enregistrements sonores peuvent être conservés au maximum 6 mois tandis que les documents d’analyse peuvent eux être conservés au maximum 1 an.

Information et consultation des IRP
En vertu de l’article L.2323-32 du Code du travail, la mise en place d’un traitement contrôlant l’activité d’un salarié, comme le prévoit la norme simplifiée n°57, suppose une information préalable des Instances Représentatives du Personnel (IRP).

Les employés doivent également être informés des habituelles informations exigées par la mise en place d’un traitement de données à caractère personnel. Cette information est essentielle puisqu’à défaut, les enregistrements ne peuvent être opposables au salarié par son employeur dans le cadre d’une procédure disciplinaire.

Enfin, les interlocuteurs des salariés doivent être informés des habituelles informations exigées par la mise en place d’un traitement de données à caractère personnel. La norme simplifiée précise par ailleurs par renvoi que ces personnes doivent spécifiquement être informées de leur droit d’opposition avant la fin de la collecte des données les concernant.

Data Protection Officer - OVH Group @florentgastaud www.florentgastaud.fr
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