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Salarié protégé : modalités d’appréciation du harcèlement moral et de la gravité de la faute. Par Mathilde Peraldi, Avocat.
Parution : vendredi 20 février 2015
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Dans une affaire récente [1], le Conseil d’Etat est revenu sur les modalités du contrôle de l’inspecteur du travail du comportement d’un salarié protégé dont le licenciement était sollicité.

Le licenciement de ce salarié était sollicité au motif tiré de la faute tenant à une situation de harcèlement moral.

L’inspecteur du travail et le ministre, sur recours hiérarchique, ont refusé de prononcer le licenciement, décisions confirmées par la Cour administrative d’appel.

En premier lieu, le Conseil d’Etat rappelle le considérant de principe en la matière :

« que dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l’inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si les faits reprochés au médecin du travail sont d’une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé et des exigences propres à l’exécution normale de la mission dont il est investi ; ».

Et le Conseil d’Etat de juger que :

« qu’il s’en déduit que, pour apprécier si des agissements sont constitutifs d’un harcèlement moral, l’inspecteur du travail doit, sous le contrôle du juge administratif, tenir compte des comportements respectifs du salarié auquel il est reproché d’avoir exercé de tels agissements et du salarié susceptible d’en être victime, indépendamment du comportement de l’employeur ; qu’il appartient, en revanche, à l’inspecteur du travail, lorsqu’il estime, par l’appréciation ainsi portée, qu’un comportement de harcèlement moral est caractérisé, de prendre en compte le comportement de l’employeur pour apprécier si la faute résultant d’un tel comportement est d’une gravité suffisante pour justifier un licenciement ; qu’il s’ensuit que la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit en tenant compte, pour écarter en l’espèce la qualification de harcèlement, du système de management mis en place par l’employeur ainsi que de l’inaction prolongée de ce dernier face aux agissements de sa salariée ».

Cela signifie que l’appréciation de la faute – il y-a-til harcèlement moral ou pas – se fait à la lumière du comportement du salarié soupçonné de harcèlement et du comportement du salarié victime. Le comportement de l’employeur n’entre pas en ligne de compte à ce stade.

Ce n’est qu’une fois la faute caractérisée que l’inspecteur saisi sur le point de savoir si la faute est d’une gravité suffisante pour justifier un licenciement, prend en compte le comportement de l’employeur.

Employeurs soyez vigilants !

Mathilde PERALDI Avocat Droit public - Barreau de Clermont-Ferrand http://www.peraldi-avocat.fr/

[1CE, 10 décembre 2014, n°362663

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