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Native advertising : quels enjeux ? Par Anne-Laure Moya-Plana, Avocat.
Parution : lundi 16 mars 2015
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Alors que le native advertising connaît un franc succès aux États-Unis , les professionnels de la publicité restent prudents en France et s’interrogent sur son avenir. En effet, le native advertising repousse les frontières classiques entre contenu éditorial et publicité et tente d’instaurer une nouvelle logique : celle d’un contenu publicitaire intégré à un flux d’actualité en ligne.

A l’instar du publi-reportage dans la presse papier, le native advertising permet de diffuser un message publicitaire (en faveur d’une marque, d’un produit ou d’un service) en rapport avec le thème d’un article et ainsi capter l’attention du lecteur.

Ad you like, pure player spécialiste du native advertising, met en avant trois règles essentielles : une publicité visuellement intégrée, un contenu éditorial pertinent, le respect de la navigation de l’internaute.

Dans son livre blanc , l’Interactive Advertising Bureau (IAB) attire l’attention des professionnels sur le fait que le terme « native advertising » ne recouvre pas une seule et même réalité et qu’il convient en tout état de cause de respecter les règles générales du droit de la publicité.

Des nouvelles pratiques de publicité ciblée

Le native advertising s’inscrit désormais comme un incontournable de la publicité ciblée sur internet et tous les acteurs du web y voient un nouvel axe de développement. Les avantages sont multiples : des nouveaux achats d’espaces pour les régies publicitaires spécialisées sur le web, des campagnes facilement mesurables en fonction du nombre de lectures de l’article par jour, des emplacements de communication supplémentaires pour les annonceurs et des offres protéiformes de publicité.

En effet, certains, comme la régie du groupe Le Monde, ont fait le choix de créer des pages dédiées, les « brand pages », pour publier des contenus propres à une marque, l’objectif étant d’assurer à l’annonceur une cohérence entre le support, le thème de l’article et son image de marque. C’est le cas notamment du site du journal Le Huffington Post qui propose en page d’accueil un article sous la mention « Contenu de marque ».

A titre d’exemple, la marque Longchamp a lancé une campagne de native advertising via le Journal des femmes, au sein de la rubrique « L’expression des marques ». Introduite par la baseline « Les marques s’adressent aux lecteurs du Journal des femmes », cette rubrique est présentée comme un espace communication privilégiée entre la marque et ses potentiels clients, au sein duquel sont publiés différents articles dédiés à la marque Longchamp et à ses produits, qui sont relayés sur la page d’accueil du site du journal et les newsletters.

D’autres en revanche proposent d’intégrer de manière automatique une publicité au sein d’un flux éditorial de plusieurs sites d’éditeurs ou au sein d’une page d’actualité d’un moteur de recherche, par exemple l’offre Yahoo Stream Ads, qui renvoie vers le site de la marque en question.

En fonction de l’offre choisie, le contenu de l’article est rédigé par le site éditeur ou par l’agence de communication, en collaboration ou non avec l’annonceur, ce qui laisse entrevoir un aléa certain quant au contrôle du contenu et sa crédibilité.

Le cadre juridique

Le native advertising doit respecter les règles classiques du droit de la publicité ainsi que les principes déontologiques posés par l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP), notamment sa recommandation « Communication publicitaire digitale ».

En effet, l’ARPP rappelle que : « La publicité doit pouvoir être clairement identifiée comme telle, et ce quelle que soit la forme sous laquelle elle se présente. Cette identification peut se faire par tout moyen nettement perceptible permettant de rendre d’emblée non équivoque pour le public la nature publicitaire du message ».

De même, l’annonceur doit être aisément identifiable par le lecteur afin d’éviter tout risque de confusion sur l’émetteur du message publicitaire.

Le respect de cette règle essentielle d’identification de la publicité est sans aucun doute la principale difficulté rencontrée par les acteurs du native advertising pour mettre en conformité cette nouvelle pratique avec le droit de la publicité.

Le fait d’intégrer une publicité au sein d’un article ou d’un flux d’actualité ne doit pas être un moyen de dissimuler aux yeux de l’internaute le caractère promotionnel du message, ce qui implique un effort de transparence de tous les acteurs du native advertising.

En effet, la publicité générée doit également être loyale, véridique et honnête afin d’assurer la confiance de l’internaute, protégé par les règles du droit de la consommation.

En effet, les articles L.120-1 et suivants du Code de la consommation prohibent toute pratique commerciale déloyale, dont la publicité trompeuse, qui altère, ou est susceptible d’altérer de manière substantielle, le comportement économique du consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, à l’égard d’un bien ou d’un service.

Dès lors, il importe que les mentions pertinentes relatives au native advertising soient lisibles et intelligibles, ce qui est le cas notamment des rubriques « L’expression des marques » (Le journal des femmes) et « Contenu de marque » (Le Huffington Post) au sein desquelles le nom de l’annonceur est clairement identifié.

Cabinet Vincent VARET