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Le RSI : compétences, méthodes et obligations pré-contentieuses, Par Perrine Athon-Perez, Avocate.
Parution : jeudi 4 juin 2015
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Alors que le 9 mars dernier s’organisait une nouvelle manifestation « Anti-RSI », que des associations dont l’objet est de « lutter contre le RSI et ses dérives » voient le jour, et alors que le Premier Ministre déclarait récemment à la presse que la suppression du Régime Social des Indépendants (RSI) était une hypothèse à envisager, le temps est venu de faire un point sur les compétences de cet organisme, ses méthodes souvent décriées et de rappeler par la même occasion quelques éléments clés à vérifier en cas de litige avec l’organisme social.

Pour mémoire, on rappellera que le RSI est en charge du régime social de la majorité des professions indépendantes (artisans, commerçants, libéraux, chefs d’entreprises, autoentrepreneurs,..). A ce titre, ses affiliés doivent verser au RSI des cotisations calculées selon un système de barème assez complexe ayant pour base le revenu encaissé.

Ces cotisations concernent :
-  Pour la partie sociale, le RSI est susceptible de récolter les cotisations maladie-maternité, indemnités journalières, allocations familiales, l’invalidité-décès, la contribution à la formation professionnelle, CSG-CRDS et CASA.
Attention toutefois, afin de ne pas trop simplifier la situation, la loi prévoit des exceptions auxquelles il faut veiller. En effet, selon que l’affilié est artisan, libéral, commerçant ou autoentrepreneur, toutes ses cotisations ne relèvent pas toujours exclusivement du RSI. L’URSSAF peut être compétent en certaines hypothèses (par exemple pour les professions libérales, l’URSSAF recouvre les cotisations allocations familiales, formation professionnelle et CSG-CRDS).

-  Pour la partie vieillesse, le RSI peut, selon les cas, recouvrir les cotisations retraite de base et retraite complémentaire. Attention, ici aussi, la compétence n’est pas toujours dévolue au RSI selon que l’affilié est artisan, commerçant, libéral ou autoentrepreneur.

Il sera utilement rappelé que l’affilié est soumis à une obligation de déclarer annuellement ses revenus (la fameuse Déclaration Sociale des Indépendants dite DSI). En cas d’oubli, il s’expose à devoir payer des cotisations plus importantes que celles réellement dues puisqu’elles sont, le cas échéant, calculées forfaitairement et volontairement à la hausse afin d’inciter les affiliés à déclarer… C’est d’ailleurs une des hypothèses assez fréquentes qui poussent un indépendant à consulter un avocat, lorsqu’il reçoit des appels à cotisation qu’il juge –à juste titre- excessifs et non explicité par rapport au revenu perçu. Il reste possible de régulariser la situation mais gare aux majorations et pénalités qui sont appliquées très rapidement.

Si le fonctionnement du RSI est si souvent et fortement critiqué c’est essentiellement pour deux raisons. Outre, la question passionnante – mais plus théorique- relative à sa légitimité juridique (CA Limoges, 20 octobre 2014, n° 13/00341, TGI de Nice, ordonnance des référés,11 décembre 2014), les opposants du RSI semblent généralement être victimes de deux phénomènes récurrents.

Il s’agit d’une part de l’approximation, de la lenteur voire de l’inertie qui caractérisent parfois la réponse apportée par le RSI dans ses dossiers. C’est ainsi que de nombreux affiliés sont obligés de se battre, parfois durant des années et avec le concours d’un avocat, contre l’organisme social pour –seulement – faire entendre leur position.

Cette situation est d’autant plus regrettable lorsque les arguments opposés par l’assuré sont justes, clairs et évidents. S’il est parfaitement entendable que les agents du RSI puissent de temps à autre commettre une erreur, il l’est en revanche beaucoup moins qu’en pareille hypothèse la situation ne soit pas plus rapidement régularisée et qu’elle ne reçoive pas une meilleure attention. La lecture des doléances des associations et les dossiers qui sont soumis aux avocats semblent permettre de penser que c’est encore trop souvent le cas.

D’autre part, ce sont les méthodes contentieuses du RSI qui sont régulièrement dénoncées. Il n’est pas rare qu’un affilié reçoive, par le biais d’un huissier, une contrainte ou même une mesure de recouvrement (saisie, saisie attribution,…). Si ces voies d’exécution restent utiles lorsque le contentieux et la résistance du débiteur le justifient, il faut bien reconnaitre qu’elles sont assez violentes lorsque l’affilié découvre seulement à cette occasion qu’il a un litige avec le RSI.

Il est un fait qu’en certaines hypothèses, le RSI déploie l’arsenal contentieux avant d’avoir essayé de recouvrir ses cotisations amiablement. C’est, selon notre expérience d’avocat, un des motifs de contestation des plus importants.

A ce titre, il sera alors rappelé que le RSI, s’il est en droit de recouvrir les cotisations dues, n’en est pas moins soumis à certaines obligations précontentieuses. Ainsi, il lui est parfaitement interdit de délivrer une contrainte ou de faire signifier toute mesure d’exécution avant d’avoir mis en demeure l’intéressé de régler les cotisations dues. La mise en demeure, pour être considérée comme un préalable acceptable, doit être adressée par courrier recommandé et doit être suffisamment détaillée pour que l’affilié comprenne comment les sommes réclamées ont été calculées. Si aucune mise en demeure n’a été envoyée par le RSI, la contrainte, et encore moins la saisie, n’est pas valable. A cela s’ajoutent par ailleurs divers délais de prescription qui enferment strictement l’action du RSI. Il convient alors de former opposition à contrainte, le cas échéant, dans un délai de 15 jours à compter de sa signification auprès du Tribunal des affaires de la sécurité sociale, selon les modalités prévues par le code de la sécurité sociale et normalement exposées sur l’acte d’huissier. Le juge de l’exécution peut également être utilement saisi en certaines hypothèses.

En définitive, la multiplication des actions et manifestations contre le RSI ainsi que le contentieux qui concerne l’organisme social auprès des tribunaux des affaires de la sécurité sociale, ne permettent pas de douter sur ses difficultés de fonctionnement. Néanmoins, quelque-soit la gestion de son contentieux que fait le RSI, il ne faut pas perdre de vue que le code de la sécurité sociale et la jurisprudence encadrent ses prérogatives de recouvrement et permettent à toute personne en litige avec l’organisme de faire valoir efficacement ses droits. Le parcours est parfois un peu long mais le juge n’hésitera pas à réformer les prétentions du RSI lorsqu’elles ne sont pas légitimes.

Reste maintenant à espérer que le juge soit de plus en plus ouvert à prononcer des condamnations pécuniaires à l’égard de l’organisme lorsque celui-ci, par une gestion fautive, à mis à mal inutilement la patience ou même l’activité de son affilié. A ce jour malheureusement, les décisions condamnant le RSI à verser des dommages et intérêts ne sont pas encore assez nombreuses. Sous l’impulsion des réformes et contestations, cela est-il peut être voué à évoluer…

Me Perrine ATHON-PEREZ Avocate à la Cour Cabinet ATHON-PEREZ contact@padp.fr www.athon-perez-avocat.com
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