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GPA : la Cour de Cassation dit oui à la transcription mais... Par Brigitte Bogucki, Avocat.
Parution : mercredi 8 juillet 2015
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C’est un grand soulagement de voir la Cour de Cassation reconnaitre le droit à la transcription de l’état civil des enfants nés de GPA (gestation pour autrui), pour autant les décisions ne sont pas universelles et des questions restent ouvertes

Par deux arrêts du 3 juillet 2015 dont la presse s’est largement fait l’écho, la Cour de Cassation a considéré, ainsi qu’elle le rappelle dans son communiqué de presse que
"Les actes de naissance dont la transcription est demandée mentionnent comme père celui qui a effectué une reconnaissance de paternité et comme mère la femme ayant accouché. Dès lors, les règles de transcription sur les actes de l’état civil français, interprétées à la lumière de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, doivent s’appliquer au cas d’espèce. La théorie de la fraude ne peut donc faire échec à la transcription de l’acte de naissance."

Il s’agit là clairement d’un revirement de jurisprudence, la Cour de Cassation a pris note de la condamnation de la France par la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

En effet rappelons qu’en 2013, la Cour de Cassation avait refusé la transcription de l’acte de naissance d’un enfant né de GPA au motif principal que selon l’adage juridique "la fraude corrompt tout", il ne pouvait y avoir de conséquence à une convention de GPA illégale par nature.

Cet arrêt était choquant en ce qu’il mettait au second plan l’intérêt supérieur de l’enfant, issu de la Convention Internationale des droits de l’enfant et j’avais à l’époque attiré l’attention sur l’irréalisme d’une telle jurisprudence.

Un recours avait été engagé devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme et en juin 2014, la France avait été condamnée rappelant l’importance des droits de l’enfant. Je m’étais à l’époque interrogée sur les conséquences pratiques de cette décision en France.

La réalité a dépassé mes prévisions puisqu’alors que le tribunal de grande Instance de Nantes (qui traite des questions concernant l’inscription à l’état civil des enfants nés hors de France) avait validé la transcription des actes de naissance d’enfants nés de GPA à l’étranger, l’Etat a fait appel... puis s’est pourvu en cassation.

C’est donc dans ces conditions que la Cour de Cassation vient de rendre les deux arrêts précités, par un revirement complet de jurisprudence elle précise désormais, dans des arrêts de principe, que dès lors que l’état civil a été établi régulièrement à l’étranger et n’est pas contraire à la réalité alors la transcription doit être ordonnée nonobstant la GPA.

Il convient toutefois d’être particulièrement attentif à la rédaction de ces arrêts qui s’appuient sur l’article 47 du Code civil : : « L’acte d’état civil d’un Français fait dans un pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. »

Dans les deux cas objets des arrêts, les parents déclarés sur l’Etat civil était le père génétique de l’enfant et la mère porteuse.

En aucun cas la Cour de Cassation ne s’est prononcé à l’égard d’une filiation établie à l’étranger qui mentionnerait les parents d’intention.

Autrement dit en ce qui concerne les couples qui ont eut un enfant par GPA et ont obtenu un acte de filiation portant exclusivement le nom des parents d’intention, la solution n’est pas acquise, loin de là.

En effet, au regard de l’article 47 sus-cité, si les faits déclarés dans l’acte de naissance ne correspondent pas à la réalité alors l’état civil dont question ne fait pas foi et ne peut être transcrit...

La question est de déterminer ce qu’est la réalité en matière de filiation...

En outre ces décisions de la Cour de Cassation posent trois problèmes :

Me Brigitte BOGUCKI, spécialiste en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine, Professionnel collaboratif Avocat à Paris et Lille http://www.adr-avocats.com
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