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Obsolescence programmée : réprimée dès septembre ? Par Mélanie Defoort et Coraline Favrel, Avocats.
Parution : mercredi 5 août 2015
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La loi sur la transition énergique vise notamment à réprimer l’obsolescence programmée des produits.

Pour doper les ventes, certains industriels provoquent délibérément la panne d’un bien de consommation. Une des tactiques consiste, au stade de la conception du produit, à y insérer un composant peu résistant ou à retirer du marché les pièces de rechange de ce composant, et ce, alors même que l’état de la technique permet de faire durer ledit bien.

Objectif : compenser la baisse du prix de vente des produits par une hausse de leur taux de remplacement.

Surconsommation et surproduction de déchets sont décriées. Les associations de consommateurs fustigent le phénomène, qu’elles estiment très répandu dans les secteurs de l’électroménager, de la téléphonie mobile et de l’informatique.
Les médias s’en font l’écho et encouragent les consommateurs à devenir « consomm’acteurs ».

La loi sur la transition énergétique, définitivement adoptée par les députés le 22 juillet dernier après 150 heures de débats, et aujourd’hui soumise au Conseil constitutionnel, mettra-t-elle fin à ce procédé ?

Cette loi, qui annonce un nouveau modèle énergétique, comprenant la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le développement des énergies vertes dont l’éolien, le solaire, l’hydroélectricité, la biomasse, la géothermie et les énergies marines, évoque l’obsolescence programmée.

Elle prévoit sa définition et sa répression, dans un nouvel article L.213-4-1 du Code de la consommation, inséré au sein du livre relatif à la Conformité et à la sécurité des produits et des services.

Aussi, l’« ensemble des techniques par lesquelles un metteur sur le marché vise à raccourcir délibérément la durée de vie d’un produit pour en augmenter le taux de remplacement » serait passible d’une peine de 2 ans d’emprisonnement et d’une amende de 300.000 euros.

Le montant de l’amende pourrait même être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 5 % du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits.

Toutefois, et concrètement, le demandeur à une telle action devra alors démontrer aux magistrats la durée de vie théorique du produit qu’il stigmatise, sa durée de vie raccourcie par le fabricant, grâce à une technique spécifique, qu’il a délibérément mise en place… ce qui en pratique semble délicat à prouver.

Cette nouvelle interdiction s’inscrit dans un mouvement tendant à lutter efficacement contre l’obsolescence programmée en renforçant l’information des consommateurs, ce qui avait déjà été discuté à l’occasion des débats sur le projet de loi dite « Hamon ».

Rappelons que la loi Hamon du 17 mars 2014 comporte déjà quelques dispositions qui font écho à la volonté des pouvoirs publics d’endiguer la pratique de l’obsolescence programmée (obligation d’information sur la période de disponibilité des pièces de rechange, allongement de 6 à 24 mois de la présomption dont bénéficie le consommateur au titre la garantie légale de conformité). En outre, l’action de groupe créée par cette loi apparaît comme une procédure à même de sanctionner ces pratiques.

Et certains préconisent déjà de compléter cet arsenal juridique par l’obligation pour le professionnel de préciser la durée de vie théorique du produit, ou encore par l’instauration d’une durée minimum impérative de disponibilité des pièces de rechange…

Mélanie DEFOORT et Coraline FAVREL Avocats BRM AVOCATS
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