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Les principales mesures à retenir de la loi Macron. Par Arnaud Boix, Avocat.
Parution : vendredi 7 août 2015
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La Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « Loi Macron » a été adoptée définitivement au Parlement le 10 juillet 2015. Dans l’attente des décrets d’application et au vue de la décision du Conseil Constitutionnel, les principales dispositions à retenir sont les suivantes :

1. Prud’hommes (CPH)

Une formation initiale commune aux conseillers employeurs et salariés du CPH est mise en place, avec des sanctions disciplinaires qui leur seraient revues. Une réorganisation de la procédure, soit en cas d’accord des parties ou en raison de la nature de l’affaire, permettra de passer directement de la phase de conciliation à la formation de départage. Il est instauré une procédure accélérée lorsque le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire en cas échec de la conciliation et d’accord des deux parties, permettant de passer devant un bureau de jugement en formation restreinte, qui statuerait dans un délai de 3 mois. Il est enfin créé un « vrai » statut du défenseur syndical, qui assiste ou représente le salarié ou l’employeur devant les prud’hommes.

2. Travail du dimanche et en soirée

Le travail du dimanche et le travail en soirée (jusqu’à minuit) est autorisé sans restriction dans certaines zones : dans les 12 gares à forte affluence, dans des zones commerciales, dans les ex-PUCE, et "dans des zones touristiques et dans des zones touristiques internationales" (ZTI). En dehors de ces zones spécifiques, le nombre de dimanche « de maire » passera de 5 à 12 à compter de 2016. Ce dispositif est accompagné de compensations financières pour les salariés déterminées obligatoirement par accord de branche, d’entreprise, ou accord territorial. Le régime est le suivant : le travail de nuit commence à 21h (et non plus minuit), la rémunération du salarié y est doublée, le tout étant soumis à un accord de groupe, d’entreprise, d’établissement ou territorial.

3. Résidence Principale de l’entrepreneur

La résidence principale de l’entrepreneur devient de droit insaisissable, pour les créances professionnelles nées après la promulgation de la loi Macron et à l’exclusion de toute fraude fiscale.

4. Epargne salariale

Il est instauré une obligation pour les branches professionnelles de négocier un accord d’intéressement et un accord de participation avant le 30 Décembre 2017. La contribution de l’employeur « forfait social » sur les sommes versées au titre de l’intéressement ou de la participation est de 8% pendant 6 ans pour les entreprises de moins de cinquante salariés mettant en place pour la première fois un accord d’intéressement ou de participation. La Participation et la prime d’intéressement doivent être versées avant une date limite unique : le dernier jour du cinquième mois suivant l’exercice de calcul au titre duquel les droits sont nés. Dans les entreprises sans délégué syndical ou comité d’entreprise, un Perco peut être mis en place par ratification aux 2/3 des salariés (à l’instar des PEE préalablement).

5. Actionnariat salarié

Les cotisations patronales sur les attributions gratuites d’action (AGA) sont abaissées au taux de 20% et dues lors de l’acquisition du titre par le salarié. Une franchise de cotisations est créée dans la limite de 38 040 euros par salarié sur quatre ans, pour les entreprises n’ayant jamais versé de dividende.

6. « Suramortissement » des investissements

En cas de réalisation d’investissements entre le 15 avril 2015 et le 14 avril 2016, un "suramortissement" à hauteur de 140% de leur valeur est créé permettant une économie d’IS d’environ 10% du montant de l’investissement et ce pour certaines catégories de biens.

7. Cession d’entreprise

L’obligation d’information des salariés est désormais limitée à la cession-vente d’un fonds de commerce ou d’au moins 50% des parts d’une SARL ou titres d’une SA/SAS et non en cas de donation, échange, ou d’apport. A défaut de respecter cette obligation, seule une sanction civile de 2% du montant de la vente maximum est désormais encourue (exit la nullité !)

8. Cession forcée

Pour les entreprises d’au moins 150 salariés et/ou si leur disparition serait de nature à causer un trouble grave à l’économie et au bassin d’emploi, le tribunal de commerce pourra désormais, en cas de procédure de redressement judiciaire, imposer une augmentation de capital ou une cession forcée aux associés ou actionnaires majoritaires, préférant une liquidation judiciaire et qui s’opposeraient à faire rentrer au capital de l’entreprise des créanciers souhaitant entrer au capital afin de poursuivre l’activité, le dispositif s’accompagnant d’un droit de retrait pour les autres associés.

9. Tribunaux de commerce spécialisés

Dans le cadre de procédures collectives, les tribunaux de commerce seront désormais compétents pour les entreprises dont l’effectif est inférieur à 250 salariés et le chiffre d’affaires net inférieur à 20 millions d’euros.Au-delà de ces seuils, des tribunaux de commerce spécialisés seront seuls compétents.

10. Accords de maintien de l’emploi

Un accord de maintien de l’emploi va pouvoir être conclu pour une durée de 5 ans au lieu de 2 ans.

11. Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE)

Les entreprises devant établir un Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) peuvent fixer le périmètre d’application des critères d’ordre des licenciements par accord collectif ou par document unilatéral. L’administration se prononce désormais sur la validité du PSE au regard des seuls moyens dont dispose l’entreprise, et non plus du groupe auquel elle appartient. En cas d’annulation par le tribunal administratif d’une décision, insuffisamment motivée, de validation ou d’homologation d’un plan social par la DIRECCTE, et dans l’attente d’une nouvelle décision, la validité de licenciement ne sera pas remise en cause, aucune réintégration ou indemnité par l’employeur au salarié ne sera due.

12. Prêts de trésorerie entre entreprises (donneur d’ordre/sous-traitant)
Une entreprise pourra proposer un crédit à une autre (PME ou ETI) sur 2 ans maximum, à condition d’entretenir une relation économique entre elles.

13. Bourses régionales

Il est (à nouveau) créé des bourses régionales de sorte à assurer en local des circuits courts de financement pour les PME et PMI, en actions ou en obligations, régulées par l’autorité des marchés financiers, et animées par les collectivités locales et également par la Caisse des dépôts et Bpifrance.

14. Recouvrement des petites créances par huissier

Il est créé une procédure simplifiée de recouvrement de « petites créances » (1000/2000 euros) permettant à l’huissier d’émettre un titre exécutoire, à l’instar actuellement en cas de chèques sans provision, sur demande du créancier et à condition que le débiteur reconnaisse sa dette en acceptant de participer à la procédure après avoir reçu un courrier recommandé l’y invitant. L’accord du débiteur suspendra la prescription. Les frais de 25 euros seront à la charge du créancier.

15. Délit d’entrave

Le délit d’entrave n’est plus puni que par une amende de 7500 euros (exit l’emprisonnement !) sauf en cas de refus de l’élection d’un comité d’entreprise ou de délégués du personnel, ou en cas de licenciement illégal d’un représentant du personnel.

16. Obligation d’embauche de travailleurs handicapés

Cette obligation est à hauteur d’au moins 6% de personnes handicapées dans l’effectif, sous peine de devoir verser une contribution compensatrice à l’Agefiph. Ce quota pouvant être atteint en faisant appel à des travailleurs indépendants handicapés, en accueillant des personnes handicapées pour des périodes de mise en situation en milieu professionnel, ainsi que des collégiens ou lycéens handicapés en stage d’observation.

17. Renforcement des pouvoirs de l’Inspection du travail

Par ordonnance et dans les 9 mois, il pourra être renforcé le rôle de surveillance et les prérogatives du système d’inspection du travail, étendu et coordonné les différents modes de sanction, et, en matière de santé et de sécurité au travail, révisé l’échelle des peines.

18. Relations commerciales

L’ensemble des contrats conclus entre un exploitant et un réseau (sélectif) et qui comportent des clauses susceptibles de limiter la liberté d’exercice de l’exploitant, doit désormais prévoir une échéance commune. En cas de pratiques abusives entre partenaires commerciaux, l’amende civile peut désormais aller jusqu’à 5 % du chiffre d’affaires réalisé en France par l’auteur des pratiques incriminées.

19. Facturation électronique

A partir de 2017, et afin de diminuer les délais de paiement, les entreprises de toute taille vont devoir accepter les factures émises sous forme dématérialisée.

Arnaud Boix, Avocat Cabinet Eloquence Avocats Associés www.eloquence-avocats.com