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De l’obligation de reclassement en matière d’inaptitude physique constatée par la médecine du travail : actualités récentes. Par Pierre-Damien Venton, Avocat.
Parution : jeudi 15 octobre 2015
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La jurisprudence a posé depuis longtemps le principe juridique selon lequel lorsqu’un salarié est déclaré physiquement inapte par le médecin du travail, l’employeur est soumis à une obligation de reclassement dans l’entreprise et le cas échéant le groupe -lorsqu’il en existe un-, en fonction des préconisations médicales formulées.

Aux termes de deux actualités récentes, des précisions intéressantes pour les entreprises, viennent d’être fournies en la matière par la loi et la jurisprudence.

I – Sur la loi « Rebsamen »

Aux termes de la loi 2015-994 du 17 août 2015 entrée en vigueur le 19 août 2015, le législateur a expressément instauré une exception légale à l’obligation de reclassement pesant en principe sur l’employeur.

Il est en effet désormais prévu par ce texte que :

-  Le médecin du travail déclarant un salarié physiquement inapte à son emploi à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, peut indiquer dans son avis d’inaptitude que le maintien de l’intéressé dans l’entreprise serait « gravement préjudiciable à sa santé. »
-  En pareille situation -et seulement dans ce cas particulier-, l’employeur dispose de la faculté d’engager la procédure de licenciement pour inaptitude physique, sans être tenu de chercher un poste de reclassement au bénéfice du salarié.

II – Sur les arrêts rendus par la Cour de cassation le 24 juin 2015 (Cass. soc. 24-6-2015 n°13-27.875 et n°14-10.163)

En dehors de l’hypothèse prévue par la loi « Rebsamen », la recherche d’un reclassement s’impose à l’employeur lorsque le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail -que cette inaptitude soit d’origine professionnelle ou non-.

Pour satisfaire à cette exigence, l’employeur doit tenir compte des préconisations formulées par le médecin du travail.

Pour autant, il existe parfois des situations dans lesquelles cette obligation de reclassement est difficilement conciliable avec l’obligation de sécurité de résultat pesant également sur l’employeur.

Pris en étau entre ces obligations contradictoires, les entreprises attendaient depuis un certain temps des précisions de la part de la Cour de cassation sur la marche à suivre dans l’hypothèse où :

-  le salarié a été déclaré inapte à tout emploi dans l’entreprise ;
-  le médecin du travail a précisé dans l’avis d’inaptitude que le maintien du salarié dans l’entreprise présente un danger pour sa santé.

C’est désormais chose faite avec les deux arrêts rendus par la Cour de cassation le 24 juin 2015 (Cass. soc. 24-6-2015 n°13-27.875 ; n°14-10.163).

Aux termes de ces deux décisions, la Haute Cour précise qu’en présence de telles mentions sur l’avis d’inaptitude, l’employeur doit impérativement solliciter le médecin du travail en vue d’obtenir des précisions.

Si le médecin du travail envisage des possibilités de reclassement, des recherches doivent être diligentées par l’employeur en ce sens.

Si en revanche, le médecin exclut expressément toute possibilité de reclassement dans l’entreprise, l’employeur est réputé avoir satisfait à son obligation et peut engager la procédure de licenciement.

Pierre-Damien VENTON Avocat à la Cour VENTON AVOCATS CONSEIL ET CONTENTIEUX EN DROIT SOCIAL E-mail : pierre.venton@venton-avocats.fr Site internet : www.venton-avocats.fr