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La contribution spéciale de l’OFII pour travail illégal. Par Francis Senyurek.
Parution : jeudi 15 octobre 2015
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Les sanctions pécuniaires concernant le travail illégal peuvent parfois atteindre des montants particulièrement élevés, au point de mettre en péril la vie des petites entreprises. En effet, pour combattre le recours au travail au noir les sanctions deviennent de plus en plus dissuasives pour les employeurs. C’est le cas en particulier de la contribution spéciale prévue dans le Code du travail au profit de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).

La notion de travail illégal

Cette contribution spéciale, prévue à l’article L.8253-1 du Code du travail, a pour but de sanctionner le recours au travail illégal qui n’est pas seulement le recours à des sans-papiers. La loi est plus large et prévoit plusieurs cas de travail illégal.

Le premier cas est celui où l’étranger ne dispose pas d’une autorisation pour travailler en France. En langage courant, le travail illégal consiste à faire travailler un sans-papiers.

Le deuxième cas est celui où l’employeur fait travailler un étranger en dehors de la catégorie professionnelle, de la profession ou de la zone géographique autorisées par son titre.

Enfin, le troisième cas est le fait de recourir directement ou indirectement mais sciemment aux services d’un employeur d’un étranger sans titre.

Le montant de la contribution spéciale

L’employeur qui a recours à un étranger qui n’a pas d’autorisation de travail peut être amené à payer une amende administrative d’un montant qui est fixé à 5.000 fois le taux horaire du minimum garanti.

En août 2015, le taux horaire du minimum garanti est de 3,52 euros.

Ainsi l’emploi d’un étranger sans autorisation de travail peut donner lieu au paiement d’une amende administrative d’un montant de 17.600 euros.

Ce montant peut être minoré dans deux cas précis.

D’une part, s’il n’y pas de cumuls d’infractions ou si l’employeur paie spontanément les salaires et indemnités dus au salarié étranger. Le montant sera alors égal à 2.000 fois le taux horaire du minimum garanti, soit 7.040 euros.

Une minoration plus importante est également possible si l’employeur n’occupait qu’un seul salarié étranger sans titre et qu’il lui a payé spontanément ses salaires et indemnités. Alors le montant sera égal à 1.000 fois le taux horaire du minimum garanti, soit 3.520 euros.

Mais ce montant peut être aussi majoré en cas de réitération c’est-à-dire si l’employeur a déjà eu recours à un étranger sans titre au cours des cinq dernières années. Le montant sera alors égal à 15.000 fois le taux horaire du minimum garanti, soit 52.800 euros.

Le rôle de l’OFII

La loi prévoit que l’Office français de l’immigration et de l’intégration est chargé de constater et de liquider la contribution spéciale.

Pour la constater, l’OFII reçoit la copie des procès-verbaux relevant l’infraction d’emploi d’étrangers sans titre par des agents de contrôle dont les plus connus sont les inspecteurs et les contrôleurs du travail, les officiers de police judiciaire, les agents des impôts et des douanes.

Au vu du procès-verbal le directeur général de l’OFII indique à l’employeur, par lettre recommandée avec avis de réception ou par tout autre moyen permettant de faire la preuve de sa date de réception par le destinataire, que la contribution spéciale est susceptible de lui être appliquée et qu’il peut présenter ses observations dans un délai de 15 jours.

Après ce délai, le directeur général de l’OFII décide, au vu des observations éventuelles de l’employeur, de l’application de la contribution spéciale.

L’employeur peut contester la décision du directeur général de l’OFII devant le Tribunal administratif dans le ressort duquel est constatée l’infraction.

Une sanction particulièrement dissuasive… qui peut avoir des conséquences sévères

D’abord le montant de 17.600 euros par infraction est un forfait. Le directeur général de l’OFII n’a pas de pouvoir de personnalisation de la sanction. S’il constate l’infraction, il applique la contribution spéciale dans son ensemble et l’employeur devra alors s’acquitter de la somme de 17.600 euros.

Ensuite, la contribution spéciale est due sans tenir compte de la durée de l’infraction. Que l’étranger ait été occupé depuis une semaine ou plusieurs mois, la sanction est la même.

De troisième part, les infractions se cumulent c’est-à-dire que la sanction est due pour chaque étranger employé. Ainsi s’il y a deux travailleurs sans-papiers, alors la sanction sera doublée et l’employeur devra payer la somme de 35.200 euros.

De quatrième part, le délai de 15 jours laissé à l’employeur pour faire des observations au directeur général de l’OFII est assez bref.

De cinquième part, en plus de la contribution spéciale, l’employeur peut être poursuivi devant le tribunal correctionnel pour les mêmes faits. Et parfois, l’URSSAF se manifeste pour redresser l’employeur.

Enfin, en cas de réitération, c’est-à-dire si l’employeur a déjà été condamné pour des faits similaires au cours des cinq dernières années, alors il devra payer la somme de 105.600 euros.

A ce niveau de sanction, la plupart des petites entreprises ont une forte probabilité de déposer leur bilan et d’être liquidées dans la foulée.

Ainsi en cas de contrôle, les employeurs ont tout intérêt à réagir assez vite, à préparer leurs observations et à effectuer un certain nombre de démarches adéquates.

Francis SENYUREK Avocat au Barreau de Paris 125, rue de Tolbiac 75013 Paris Tél.: 06.63.27.81.97. Fax : 01.70.71.96.61. Courriel: senyurek.francis@gmail.com