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Après les lois Pinel de 2014 et Macron de 2015, quelles formes à donner à son congé ou sa demande de renouvellement de bail commercial ? Par Arnaud Boix, Avocat.
Parution : vendredi 16 octobre 2015
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Compte tenu des enjeux économiques, et bien souvent stratégiques, qui s’inscrivent dans un acte de congé ou de renouvellement de bail commercial, il est plus qu’indispensable, après la promulgation des lois « Pinel » du 18 juin n°2014-626 et « Macron » n°2015-990 du 6 août 2015 de se rassurer quant à la bonne forme à donner à un acte de congé ou de demande de renouvellement.

A défaut la sanction est lourde : votre acte risquerait d’être nul et sans effet !

I – La forme de l’acte de congé du bailleur ou du preneur :

L’article L. 145-9 du Code de commerce, d’abord modifié pour des raisons purement économiques par l’article 20 de la loi Pinel, autorisait le bailleur ou le preneur à notifier congé des lieux loués par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou par acte extra-judiciaire, au libre choix de chacune des parties, alors que, jusqu’à présent, seul l’acte extrajudiciaire était obligatoire pour les baux soumis au statut.

Cette disposition, d’ordre public, avait été adoptée au motif que le coût des congés par acte extrajudiciaire s’avérait plus élevé que celui d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Ce qui économiquement évidemment n’était pas totalement faux !

Mais il y de petites économies dont il conviendrait bien de se passer.

En effet, l’économie engendrée par la délivrance d’une LRAR ne justifiait en aucun cas de prendre le risque de voir son congé déclaré nul :

-  Soit à raison des simples différends possibles sur la date et la réception de la lettre recommandée avec demande d’avis de réception ;
-  Soit à raison de l’absence des mentions légales requises.

C’est ainsi que nombre de preneurs ont été condamné à régler leurs loyers jusqu’au terme d’une nouvelle période triennale alors qu’ils avaient délivré congé par lettre recommandée et ce alors même qu’elle était parfois stipulée par le bail.

Un autre risque de l’usage de la forme en LRAR demeurait alors quant à savoir si c’était la date d’émission de la LRAR ou la date de sa présentation ou sa réception qui déterminait si le congé avait été délivré en temps utile.

Après quelques atermoiements, ce fut donc la date de première présentation qui fut retenue !

Compte tenu des multiples risques de contentieux engendrés par l’usage permis de la LRAR et ce pour de prétendues économies sous le régime de la Loi Pinel, l’ensemble des acteurs du droit ont maintenu l’usage de l’acte extrajudiciaire.

La loi Macron est venue remettre du bon sens et diminuer le risque, pour le bailleur exclusivement, en modifiant l’article L 145-9 et en disposant : « Le congé doit être donné par acte extrajudiciaire ».

Depuis le 8 aout 2015, pour un bailleur, donnez un congé sous une autre forme qu’un acte extrajudiciaire est nul et sans aucun effet de droit.

Le locataire quant à lui peut toujours opter, à ses risques et périls, pour la LRAR ou l’acte extrajudiciaire.

Il fera l’économie d’un acte mais peut-être pas celui d’un contentieux !

II- La forme de la demande de renouvellement du preneur.

Curieusement, la loi Pinel n’avait pas modifié symétriquement l’article L.145-10 du Code de commerce sur la demande de renouvellement de bail alors que ce sont précisément les locataires, les moins fortunés et les moins avisés, qui étaient à même de solliciter le renouvellement de leur bail par lettre recommandée avec accusé de réception, mais avec le risque que cette lettre demeure sans effet et que les bailleurs s’abstiennent de relever en espérant que leur bail dépassera douze années, entraînant ainsi des déplafonnements d’office.

Ce que la loi Pinel n’avait pas fait, la loi Macron l’a fait :

Ainsi l’art L 145-10 dispose désormais : « La demande en renouvellement doit être notifiée au bailleur par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. »

Depuis le 8 août 2015, la demande de renouvellement du locataire peut donc être faite au bailleur par LRAR ou par acte extrajudiciaire.

Mais quid alors de la computation des délais, de la date retenir envoi ou réception de la LRAR, en cas de pluralité de bailleurs, en présence d’un gérant, des mentions obligatoires….

On peut rappeler que le bailleur doit quant à lui répondre à cette demande par acte extrajudiciaire.

Une économie de principe au choix du locataire qui augure de mauvaises surprises pour les locataires qui privilégieraient l’économie sur la sécurité juridique.

Vous l’aurez compris tous les cadeaux « politiques » du législateur, aux locataires, ne sont pas bon à prendre. Alors, prenez les conseils d’un avocat quel que soit l’acte que vous entendez délivrer en matière de bail commercial et laisser lui endosser la responsabilité de vous éclairer afin de conférer toute la portée juridique aux actes qui traduisent vos décisions. A défaut, vous pouvez mettre en péril toute une stratégie de gestion patrimoniale.

Arnaud Boix, Avocat Cabinet Eloquence Avocats Associés www.eloquence-avocats.com