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Pour une profession d’avocat ouverte à la diversité des profils. Par Yanis Mebtouche, Avocat.
Parution : vendredi 23 octobre 2015
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Ce mois d’octobre est comme chaque année la période de la remise des CAPA, sésame d’entrée à la profession d’avocat. Néanmoins, si le CAPA et un master 2 ont pu longtemps être les diplômes nécessaires et suffisants à cette entrée, l’apparition des LLM et autres diplômes d’écoles de commerce semble entraver ce principe au risque de voir la profession glisser dangereusement vers un monolithisme mortifère pour l’avenir.

A partir des années 2000, on a pu observer l’apparition de grands cabinets d’avocats anglo-saxons sur le marché du droit français.
Ces cabinets ont dans un premier temps eu tendance à recruter les avocats issus de pays anglo-saxons puis ont, dans un second temps, entrepris un recrutement plus orienté vers des avocats locaux. Toutefois, ces recrutements ont visé principalement les avocats français ayant eu, dans leur cursus universitaire, un rapport direct avec la culture juridique anglo-saxonne et, pour se faire, privilégiés grandement ceux ayant effectués des LLM ou des études en école de commerce tournées vers cette culture juridique.
A défaut d’avoir entrepris de telles études ou des stages au sein de ces structures, il devient extrêmement improbable de pouvoir être recruté dans ces cabinets.

Cette position est éminemment critiquable.

En effet, par son dogmatisme elle fait fi de la diversité des parcours : études universitaires multiples (économie et droit, philo et droit, etc.), parcours accéléré (obtention de l’examen du crfpa dès le master 1) ou tout simplement parcours de droit classique. Or, en excluant dé facto ces profils, on appauvrit la profession de certains de ces talents.

De plus, cette situation est de nature à entraver la diversité des origines sociales des avocats. Effectuer un LLM ou une école commerce relève d’un coût financier certain (de l’ordre de plus de 10.000 euros l’année de frais de scolarité pour un LLM).
En somme cette privatisation des études de droit pose un vrai problème d’égalité des chances si de telles études venaient à constituer un passage obligé vers la profession d’avocat.

Malheureusement, cette position tend à devenir aussi celle des grands cabinets d’avocats français mais aussi, étonnement, de plus petites structures.

Il convient que les cabinets d’avocats se sortent de cette logique mortifère pour la profession.
Pour être innovant, productif et efficace, la profession a besoin de tous les jeunes qui ont envie de mettre leurs compétences et leurs motivations au service du droit.
Dans cette optique il est impératif de considérer chaque candidat à un poste de collaborateur non en tant que détenteur d’un diplôme en particulier ou en sa qualité d’ancien stagiaire d’un grand cabinet mais en fonction de son mérite et de sa capacité à exercer convenablement le métier au sein dudit cabinet.

Pour que la profession d’avocat conserve sa vitalité, il est aujourd’hui plus que nécessaire de passer d’une logique d’uniformisation des profils d’avocats à une logique de diversité des profils, seule politique à même de favoriser l’éclosion des talents présents et futurs !

Yanis Mebtouche Avocat au barreau de Paris
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