Village de la Justice www.village-justice.com

Actualité des procédures d’appel et du RPVA. Par Alexis Devauchelle, Avocat.
Parution : jeudi 12 novembre 2015
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/Actualite-des-procedures-appel,20843.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

L’appel en matière civile, avec représentation obligatoire, amène au maniement d’outils informatiques complexes qui peuvent parfois troubler l’utilisateur et oblige celui-ci à conformer sa pratique avec les règles de la procédure d’appel.

Ces contraintes additionnées se traduisent par des difficultés nouvelles que la Cour de cassation connaît et auxquelles elles donnent des solutions variées.

Ces derniers mois, divers arrêts ont été rendus dans cette matière sur les difficultés rencontrées. Nous tenterons d’en faire une courte analyse.

Sur le refus par le Greffe du message contenant les conclusions [1]

A peine de caducité de sa déclaration d’appel, l’appelant dispose d’un délai de trois mois à compter de cette déclaration pour conclure. Il doit remettre ses conclusions au greffe par la voie électronique et les notifier à la partie qui a constitué avocat.
Dans le cas d’espèce, l’appelant avait adressé ses conclusions dans le délai de trois mois à la Cour, mais le Greffe de la Cour d’appel avait rejeté le message à raison de l’absence de référence du numéro de rôle qui lui avait été communiqué préalablement.
La caducité de la déclaration d’appel avait été prononcée ensuite.
La Cour de cassation estime que l’envoi par l’appelante au greffe du fichier contenant ses conclusions, selon les règles de la communication par voie électronique, effectué dans le délai de trois mois de la déclaration d’appel, et parvenu au greffe ainsi que l’établissait l’avis de refus, valait à son égard remise au greffe. L’appel est donc sauvé.

Sur le défaut de signification des conclusions à la partie défaillante  [2]

A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les conclusions sont notifiées aux avocats des parties dans le délai de leur remise au greffe de la cour ou sont signifiées dans le mois suivant l’expiration de ce délai aux parties qui n’ont pas constitué avocat.
Une partie au litige s’est limitée à transmettre ses conclusions au greffe de la cour d’appel par voie électronique, puis à signifier à son adversaire une demande tendant à ce que celle-ci constitue avocat.
L’arrêt de la Cour d’appel qui se fonde sur les conclusions transmises est cassé, la Cour de cassation jugeant ces conclusions n’avaient pas été signifiées à la partie, qui n’avait pas constitué avocat au moment de leur remise au greffe.
Le RPVA n’interdit évidemment pas le respect du principe contradictoire.

Sur la méconnaissance par l’appelant de la constitution d’avocat de son adversaire  [3]

Lorsqu’elle est accomplie par la voie électronique, la notification entre avocats d’un acte de constitution doit faire l’objet d’un avis électronique de réception, indiquant la date de cette réception et valant visa par l’avocat destinataire de l’acte de constitution.
Ainsi, la caducité de la déclaration d’appel faute de notification par l’appelant de ses conclusions à l’avocat de l’intimé dans un délai de trois mois suivant la déclaration d’appel n’est encourue qu’en cas de constitution par l’intimé d’un avocat, notifiée à l’avocat de l’appelant, régulièrement et préalablement à la remise par ce dernier de ses conclusions au greffe de la cour d’appel.
En l’espèce, l’appelant avait reçu l’acte de constitution de l’intimé, mais celui-ci avait été transmis à une adresse ne correspondant pas à l’adresse électronique utilisée par son avocat pour le réseau privé virtuel avocat (RPVA).
La Cour de cassation considère que l’appel ne pouvait être jugé caduc, faute de notification, dans le délai de l’article 908 du code de procédure civile, par l’appelant de ses conclusions à l’intimé ayant préalablement constitué un avocat, tandis qu’il n’ était établi pas que le courrier électronique en pièce jointe duquel figurait la constitution d’avocat de l’intimé avait été reçu par l’avocat de l’appelant (ce que ce dernier avait contesté d’ailleurs).

Sur la forme de l’envoi des conclusions d’appel [4]

Une partie auteur d’un recours en annulation contre une sentence arbitrale avait adressé ses conclusions au fond à la Cour, mais sous forme d’une communication de pièce dans le cadre d’un incident d’irrecevabilité du recours soulevé par son adversaire.
La Cour de cassation juge que cette forme de transmission des conclusions ne peut être tenue pour équivalente ni à la remise au greffe de ces conclusions ni à leur notification aux avocats des autres parties au sens des articles 908 et 911 du code de procédure civile.
La caducité de la déclaration d’appel était donc encourue.

Sur la nature des conclusions d’appel [5]

Les conclusions exigées par les articles 908 et 909 du Code de procédure civile sont toutes celles remises au greffe et notifiées dans les délais prévus par ces textes, qui déterminent l’objet du litige ou soulèvent un incident de nature à mettre fin à l’instance.
Dès lors, les conclusions de l’appelant en réponse à un incident de nature à mettre fin à l’instance soulevé par l’intimé ne répondent pas à cette définition.
L’appelant doit donc conclure au fond dans les délais requis, alors même qu’il défend sur un incident initiée par son adversaire intimé.

Sur la prorogation du délai pour conclure en suite d’une décision d’octroi ou de rejet d’une demande d’aide juridictionnelle  [6]

Aucun texte n’impose au greffe de la cour d’appel, lorsqu’il reçoit la copie de la décision du bureau d’aide juridictionnelle, d’aviser les parties du nouveau cours du délai imparti pour signifier la déclaration d’appel.
Help yourself…

Sur le défaut de respect des formes de transmission des conclusions d’appel [7]

Les appelants avaient irrégulièrement notifié leurs conclusions aux intimés. La Cour d’appel en a déduit que ces écritures étaient irrecevables de sorte que les appelants s’étaient abstenus de conclure dans le délai légal et que la caducité de leur déclaration d’appel devait être prononcée.
La Cour de cassation retient que la cour d’appel n’avait pas à rechercher si cette irrégularité avait causé un grief aux intimés dès lors que la caducité était encourue au titre, non pas d’un vice de forme de la notification des conclusions entre avocats, mais de l’absence de conclusions remises au greffe dans les délais requis.

Sur le délai de dépôt des conclusions d’appel [8]

La caducité de l’appel est encourue faute pour l’appelant d’avoir déposé ses conclusions au greffe de la cour d’appel dans le délai de trois mois de la déclaration d’appel et ce, malgré la signification à l’intimé de ses conclusions dans le délai de l’article 908.
La Cour de cassation a écarté le moyen du pourvoi qui développait qu’en cause d’appel, lorsque la représentation est obligatoire, l’appelant est seulement tenu de conclure dans les trois mois de la déclaration d’appel et de notifier ses conclusions et pièces aux avocats des parties avant de les remettre au greffe de la cour d’appel.
Elle ajoute ainsi aux dispositions des articles 906 et 908 du code de procédure civile.

Alexis Devauchelle, Avocat à la Cour, spécialiste de la procédure d\'appel Ancien avoué à la Cour http://www.avocat-devauchelle-orleans.fr [mail-> avocat-devauchelle@orange.fr]

[1Civ. 2ème 24 septembre 2015 pourvoi n°14-20212.

[2Civ. 2ème 15 octobre 2015 pourvoi n°14-11869.

[3Civ. 2ème 15 octobre 2015, pourvoi n°14-24322.

[4Civ. 2ème 28 mai 2015 pourvoi n°14-28233.

[5Civ. 2ème 28 mai 2015 pourvoi n°14-28233.

[6Civ. 2ème 24 septembre 2015 pourvoi n°14-22945.

[7Civ. 2ème 24 septembre 2015 pourvoi n°13-28017.

[8Civ. 2ème 29 janvier 2015 pourvoi n°13-19861 - 19 février 2015 pourvoi n°14-11551.