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Le non-respect des exigences posées par l’article L 341-2 du Code de la consommation sanctionné par la nullité du cautionnement. Par Nathalie Aflalo, Avocat.
Parution : mercredi 18 novembre 2015
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Ou lorsque du formalisme dépend la validité du cautionnement.

Dire que se porter caution constitue un acte sérieux, lourd de conséquences peut pour un profane paraître banal, prêter à sourire.

Et pourtant l’acte est grave, et lorsque la banque décide d’actionner la caution, le réveil peut se révéler brutal.

Ainsi lorsque l’article 11 de la loi du 1er août 2003 introduit dans le Code de la consommation les articles L.341-2 à L.341-6, il s’agit à n’en pas douter de renforcer le formalisme de protection.

Suivant un credo sans cesse réitéré, la caution doit être informée de ce à quoi elle s’engage, de la nature et de l’étendue de ses obligations.

La caution s’engage sur ses biens et revenus.

Le formalisme face au consensualisme, un formalisme « ad validem » qui conditionne la validité du contrat.

Ainsi et à peine de nullité, aux termes de l’article L.341-2 du Code de la Consommation :

Aux termes de l’article L.341-2 du Code de la Consommation, « toute personne physique qui s’engage par acte sous seing privé en qualité de caution envers un créancier professionnel doit, à peine de nullité de son engagement, faire précéder sa signature de la mention manuscrite suivante, et uniquement de celle-ci : "En me portant caution de X..., dans la limite de la somme de ... couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de ..., je m’engage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X... n’y satisfait pas lui-même."  »

Comme l’a clairement précisé la jurisprudence, ces dispositions s’appliquent à tout cautionnement souscrit par une personne physique envers un créancier professionnel.

La défense habituelle des établissements bancaires consiste à rechercher tant dans la fonction de la personne qui signe cet acte, dirigeant, que dans passé affairiste de cette dernière, un obstacle à l’application de cette nullité.

Mais peu importe que la caution soit avertie ou non, gérant ou non de la société débitrice, l’insuffisance de la mention manuscrite doit être sanctionnée automatiquement par la nullité du cautionnement, sans que le juge puisse apprécier la gravité ou la portée du manquement constaté.

Cour de cassation, chambre commerciale 17 septembre 2013, pourvoi n°12-13577, : « Ayant constaté que la caution avait apposé sa signature immédiatement sous les clauses pré-imprimées de l’acte et inscrit la mention manuscrite légalement requise sous sa signature, sans la réitérer sous cette mention, la cour d’appel en a exactement déduit que cet engagement était nul  ».

Bien plus, la Cour de cassation a jugé dans un arrêt en date du 28 avril 2009, que viole le texte de l’article L.341-2 du Code de la consommation, la Cour d’appel qui juge que l’aveu constitué par la reconnaissance implicite de son engagement par la caution a constitué un élément extrinsèque venant compléter le commencement de preuve par écrit résultant de l’acte.
Le « casier bancaire » de la caution n’existe pas, la mention manuscrite, uniquement la mention manuscrite.

Le 5 avril 2011, pourvoi n°10.16-426, la Chambre commerciale de la Cour de cassation rend un arrêt selon lequel, le défaut d’identité de la mention manuscrite portée sur l’acte de cautionnement avec les prescriptions du Code de la consommation est par principe sanctionné par la nullité, sauf s’il s’agit d’une simple erreur matérielle.

« L’apposition d’une virgule entre la formule caractérisant l’engagement de caution et celle relative à la solidarité n’affecte pas la portée des mentions manuscrites conformes aux dispositions légales. »

La Cour d’appel de Paris dans un arrêt en date du 5 novembre 2015, pôle 5, Chambre 6, 14/06285 confirme la nécessité de ce formalisme protecteur.

En l’espèce, le mot caution faisait défaut dans la mention manuscrite recopiée par la caution. Le juge de première instance, retenait quant à lui la simple erreur matérielle, et procédait à la constitution d’un « casier bancaire » de la caution : l’acte de cautionnement était paraphé par la caution, la caution avait déjà par le passé consenti un premier cautionnement, des lettres d’informations annuelles lui rappelant la nature et la portée de son engagement, aussi concluait-il au rejet de la caution dans sa demande sollicitant la nullité de l’acte.

La Cour d’appel de Paris fidèle à la philosophie de l’article L.341-2 du Code de la consommation et à son rôle protecteur, reconnaissait la non-conformité de la mention aux exigences légales.

« Il ne peut s’agir d’une simple omission matérielle, sauf à priver la mention manuscrite de toute sa pertinence, laquelle est justement de faire écrire à la personne physique qu’elle se porte caution d’un débiteur avec ses conséquences sur le paiement de la dette. »

« Considérant que l’omission du mot « caution » affecte en soi le sens et la portée de l’engagement ainsi privé de sa mention essentielle sur sa substance, que même si la partie dactylographiée de l’acte mentionne qu’il s’agit d’un cautionnement, elle n’est pas de nature à suppléer la carence de la mention manuscrite qui prime et qui est, à elle seule, sanctionnée à peine de nullité. »

Nathalie Aflalo, Avocat, Barreau de Paris 126, Boulevard Haussmann, 75008 Paris, www.aflalo-avocat.fr [->avocat.aflalo@yahoo.fr]
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