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Rétrospective du droit de la mode 2015. Par Charlotte Galichet, Avocat.
Parution : mardi 2 février 2016
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Ce panorama de jurisprudence, non exhaustif, porte sur tous les secteurs de l’industrie de la mode : vêtements, bijoux, chaussures, maroquinerie, ...

Arrêt de la cour d’appel de Paris du 20 novembre 2015  : l’importance d’une description précise des œuvres dans le cadre d’une action en contrefaçon

La cour d’appel de Paris, dans un arrêt du 20 novembre 2015, a jugé que des bijoux représentant des fruits, des légumes, des animaux, pouvaient être protégés par le droit d’auteur bien qu’il s’agisse d’objets de la vie courante.

La Cour a considéré que l’agencement particulier des bijoux de la société JLN permettait de conférer aux œuvres une physionomie propre. Elle précise que la description des choix de l’objet ou du personnage, du mode de réalisation coloré et humoristique, du point de vue adopté, des couleurs, des matières, des volumes, de leur proportion et des détails d’exécution reflète la personnalité de l’auteur.

Ces bijoux sont ainsi protégés par le droit d’auteur en tant que « créations des industries saisonnières de la mode et de la parure ».

La société C&C est ainsi reconnue coupable de contrefaçon d’une trentaine de bijoux.

Sur le fondement des dessins et modèles communautaires non enregistrés, il est rappelé dans cet arrêt que cette protection n’est accordée qu’en cas de reproduction à l’identique. La société JLN est donc déboutée de ses demandes pour certains bijoux représentant des théières, des fleurs etc, qui n’étaient reproduits que partiellement.

Une condamnation sur le fondement de la concurrence déloyale est également prononcée en raison de la reprise de certains thèmes et de l’effet de gamme créé par la société C&C (42 références litigieuses différentes).

Au final, la société C&C est condamnée à 50.000 euros de dommages et intérêts au titre de la contrefaçon (pour 2200 articles contrefaisants vendus) et 40.000 euros sur le fondement de la concurrence déloyale.

Il faut donc retenir qu’un objet de la vie courante peut tout à fait être le fondement d’une action en contrefaçon, si son originalité est démontrée et s’il est reproduit à l’identique.

Arrêt du 29 mai 2015 de la cour d’appel de Paris : marque ou ornement ?

Dans un arrêt du 29 mai 2015 , la cour d’appel de Paris s’est prononcée sur le point de savoir si l’usage d’un signe à titre d’ornement sur un modèle de chaussures de sport était constitutif de contrefaçon.

La société Jacobson & Son, titulaire de la marque figurative communautaire « Gola » sous laquelle elle exploite le modèle de baskets « Quota », a considéré que la société Jules commercialisait un modèle de chaussures reprenant les caractéristiques de son modèle, sur lequel était apposé un signe similaire à sa marque.

Assignée en contrefaçon de marque, de droits d’auteur et en concurrence déloyale, les arguments de la société Jules consistaient à prétendre que de nombreux modèles de chaussures de sport comportaient des décorations consistant en des bandes parallèles, plus ou moins contrastées et que ladite marque était uniquement perçue comme un ornement, sans permettre l’identification d’origine des produits visés.

La Cour a au contraire considéré que la marque Gola relevait d’un choix arbitraire et qu’en conséquence, son apposition sur des modèles de chaussures permettait au public d’en identifier l’origine commerciale.

Pour autant, les magistrats ont rejeté l’action en contrefaçon de la société Jacobson & Son, considérant que :
• l’ornement était apposé sur la chaussure d’une façon très particulière ;
• l’identité de couleur entre ledit signe et la chaussure produisait une impression d’ensemble distincte, excluant tout risque de confusion avec la marque Gola dont les bandes contrastaient avec la couleur de la chaussure ;
• il était d’usage que de nombreux signes aux formes géométriques soient apposés sur la partie latérale des chaussures de sport, de sorte que le public pertinent était en mesure de les distinguer.

Notons que la Cour avait précédemment statué en sens contraire dans une affaire similaire, considérant que l’apposition d’une décoration sur un modèle de baskets était constitutive de contrefaçon de marque (Affaire GEOX c/ INDIGO et autres ).

Il convient de retenir que les juges procèdent à une appréciation restrictive du risque de confusion en présence d’une marque figurative et de l’apposition d’un signe à titre d’ornement.

Outre les similarités des signes en présence, le risque de confusion s’appréciera au regard de la mise en valeur du signe litigieux, de nature à attirer l’attention du consommateur qui percevra ledit signe comme une indication de l’origine commerciale du produit désigné.

Pour prendre connaissance de l’intégralité de la rétrospective, consultez notre document PDF :

Charlotte Galichet Avocat au Barreau de Paris [->c.galichet@avocatspi.com] www.avocatspi.com