Village de la Justice www.village-justice.com

Procédures de contentieux administratif général et de contentieux administratif fiscal au Cameroun : quelles frontières ? Par Samuel Stéphane Tchidjo.
Parution : vendredi 15 avril 2016
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/Procedures-contentieux,21927.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

Le contentieux administratif peut s’appréhender comme l’ensemble des règles juridiques, ayant pour but la résolution de litiges nés de l’action administrative et relevant de la compétence du juge administratif. Le contentieux administratif est aussi une branche du droit public. C’est la branche qui vise la protection des règles du droit administratif et qui assure de ce fait, la sanction de leur violation. C’est donc un corps de règles juridiques qui constitue ce que les technocrates appellent le droit administratif processuel. Car, il vise la mise en œuvre de procédures devant aboutir à la résolution définitive de litiges administratifs devant les autorités compétentes.

Son cadre général est dressé au Cameroun par la loi no 2006/022 du 29/12/2006 fixant l’organisation et le fonctionnement des tribunaux administratifs. Ladite loi, fixe ce qu’on pourrait appeler la procédure de principe, en matière de contentieux administratif dans notre pays. Ainsi, le juge administratif et tous les intervenants à un contentieux administratif doivent s’y référer en l’absence de dispositions contraires prévues par un texte particulier.
Autrement dit, cette loi institue ce qu’on pourrait considérer comme le cadre juridique du contentieux administratif général (CAG), auquel ne peut déroger qu’un ou plusieurs contentieux administratif(s) spéciaux, à raison de textes particuliers qui fixent leur régime.

C’est le cas sous nos cieux du contentieux administratif fiscal (CAF). Sous branche du contentieux fiscal au même titre que le contentieux répressif fiscal et le contentieux judiciaire fiscal, il est institué par le Code général des impôts (CGI), et connu par le juge administratif en vertu des dispositions dudit Code et non de la loi de 2006 précitée.
C’est d’ailleurs cet encadrement textuel distinct, existant entre le CAG et le CAF qui justifie la présente étude du fait des interrogations qu’il soulève. Ces deux types de contentieux administratif partage t-il un régime juridique commun ? Où alors existe-t-il des points de démarcation entre eux ? Pour qu’une telle étude soit menée de façon pertinente, nous devons garder à l’esprit qu’elle porte sur l’examen procédures contentieuses. De ce fait, elles connaissent nécessairement un début, un cours et une fin, marquée par de grandes séquences qui comportent tantôt des points communs, tantôt des points de démarcation.
Par ailleurs, la nature administrative desdites procédures contentieuses leur confère un point commun qui servira de fil conducteur à notre étude. Il s’agit de leur subdivision en deux grandes phases obligatoires et successives que sont la phase précontentieuse (I) et la phase contentieuse (II), dont l’étude précèdera celle des points de controverse existant entre ces deux procédures (III).

I) L’étude des phases précontentieuses du CAG et du CAF

La phase précontentieuse ou pré-juridictionnelle de tout contentieux administratif est jonchée de diverses étapes, mettant en scène divers acteurs. C’est une phase obligatoire, qui possède certaines caractéristiques spécifiques. Son examen commande que l’on s’attarde sur les acteurs ou parties prenantes à cette phase (A) et les délais qui entourent sa mise en œuvre (B) dans un premier temps.

Passé ces développements, l’on déclinera les recours précontentieux proprement dits de chacune de ces procédures (C), avant de boucler avec l’étude des mesures d’urgence invocables (D).

A) L’identification des parties prenantes au litige

L’étude des acteurs ou parties prenante à la phase précontentieuse d’un CAG ou d’un CAF nous semble intéressante, car elle nous révèle un premier élément de distinction entre les deux contentieux étudiés. Ainsi, si au premier abord, les deux types de contentieux mettent en relief une opposition banale entre l’administration et son usager. Une observation minutieuse permet de constater que le CAG brille par la pléthore atypique de ses acteurs (1), tandis que le CAF se démarque par le cadre restreint, voire figé des siens (2).

1) Le CAG et son cadre large de parties prenantes

Il faut le dire d’emblée, les acteurs ou parties prenantes de la phase précontentieuse d’un contentieux administratif lambda sont l’administration et un administré. Or, peu de problèmes se posent s’il s’agit d’identifier l’administré, car c’est soit une personne physique, soit une personne morale, et quel qu’il soit, cela n’a pas de réelle incidence sur la résolution du litige. L’équation est plus complexe par contre, si l’on doit déterminer l’administration, partie au litige ou à la procédure.

En effet, si l’on fait une lecture extensive des textes , l’on se rend compte de ce que toutes les administrations publiques, centrales ou décentralisées, peuvent être partie à un contentieux administratif. Ainsi, aussi bien les ministères, les mairies, « les régions », les établissements publics administratifs et certains services administratifs « autonomes » ou « semi-autonomes » (l’office du baccalauréat, la douane…) peuvent être partie à un litige administratif.

C’est donc à une administration extrêmement variée que l’on a à faire dans le CAG. Car si l’on peut avoir à faire à l’administration des postes un jour, demain ça peut être l’administration des domaines… Réalité tout à fait différente en CAF.

2) Le CAF et son cadre restreint de parties prenantes

Le CAF met également en opposition l’administration et un administré, mais à la différence du CAG, il oppose systématiquement l’administration fiscale ou fisc, à un administré encore appelé contribuable. Ce dernier, comme tout autre administré, peut être une personne physique ou une personne morale, mais cela n’a pas de réelle incidence sur la procédure. Or, d’un point de vu procédurale, il est quasi vital de ne point se tromper sur l’identité de l’administration avec laquelle nous sommes en conflit. Et ce, ne serait-ce que pour une bonne adresse de notre recours précontentieux (recours gracieux préalable ou réclamation préalable).

Ainsi, si l’éventail des administrations « fautives » est assez large dans le CAG, cela n’est point le cas en matière fiscale. Le CGI a en effet, pris la peine de déterminer restrictivement, à quelles autorités l’on peut s’adresser en matière précontentieuse fiscale. Il s’agit en premier lieu, du chef du Centre régional des impôts (CCRI), du directeur des grandes entreprises (DGE) et du directeur général des impôts (DGI) . Ces autorités sont en principe saisissables une seule fois, et chacune, par une catégorie de réclamation précise. La saisine de l’une de ces autorités est exclusive des autres.

Si le contribuable est insatisfait par la décision de l’autorité qu’il a saisi parmi les trois précitées, il s’adresse en second lieu au ministre des Finances (MINFI) qui se prononce en dernier ressort. Cette saisine du MINFI vaut recours gracieux préalable, et sa décision ouvre la voie au juge administratif pour le contribuable si besoin s’en faut.

Ce paysage ne change que dans l’hypothèse d’un contentieux administratif fiscal local, c’est-à-dire celui qui met en scène l’administration fiscale communale ou d’une communauté urbaine et le contribuable. Ici, ce dernier doit saisir le maire ou le délégué du gouvernement au premier niveau, et en cas d’insatisfaction, saisir le préfet au second degré avant d’ester en justice le cas échéant.

En définitive, contrairement au CAG, c’est donc à des acteurs clairement définis que l’on a à faire dans le CAF, et notamment en ce qui concerne l’administration ou l’autorité administrative à saisir de sa réclamation préalable (RP). Ce voile levé, l’on doit maintenant s’intéresser aux délais prévus dans les deux types de procédure à la phase précontentieuse.

B) Le régime des délais dans le CAG et le CAF

Les délais jouent un rôle primordial dans toute action en contestation ou en réclamation. Ils limitent la possibilité d’exercer l’action dans le temps. De ce fait, leur non maitrise peut s’avérer fatale pour chacune des parties au litige. Pour chacun des contentieux étudiés, il est consacré à la phase précontentieuse un délai de saisine (1), prévu à l’endroit des administrés et un délai de réponse (2), institué en faveur de l’administration.

1) Les délais de saisine de l’administration

Les délais de saisine en contentieux administratif doivent s’entendre comme des délais prévus à l’endroit des administrés pour adresser leurs requêtes aux autorités administratives et judiciaires. Ils en existent aussi bien en CAG qu’en CAF à la phase précontentieuse.

Il faut le dire clairement, les délais de saisine prévus dans ces deux types de contentieux à la phase précontentieuse sont tout à fait différents. Car à ladite phase, le CAF connait un double degré de juridiction administrative alors que le CAG n’en connait qu’un seul.

Ainsi, la loi no 2006/022 qui définit le cadre du CAG consacre des délais qui varient selon la nature du contentieux. Ces délais s’appliquent à la phase précontentieuse de tous contentieux qui relève de la compétence du juge administratif en l’absence de disposition(s) contraire(s) prévu(s) par un texte particulier.
C’est cette hypothèse qui se produit en CAF, dans la mesure où, un texte particulier, à savoir le CGI, prévoit des délais de saisine distincts de ceux prévus par la loi de 2006 en matière précontentieuse.

De plus, dans le CAF local, ces délais sont tout aussi différents, à la fois de ceux consacrés dans le CAG, que de ceux consacrés par le LPF, exclusivement applicables devant le MINFI et ses démembrements.
Ici, le contribuable dispose d’un délai de 30 jours à compter de la date d’émission du titre de créance ou de la connaissance certaine de l’imposition, pour saisir le chef de l’exécutif municipal de sa réclamation préalable. En cas d’insatisfaction, il peut saisir le préfet. Cependant, le CGI est muet sur le délai de saisine du préfet.

Toutefois, au terme d’un raisonnement par analogie, l’on peut penser que, si la saisine du préfet tient lieu de recours gracieux préalable dans le CAF local comme c’est le cas avec la saisine du MINFI prévu à l’article L119 du LPF. Alors, affirmer que les délais institués en la matière, par l’article 17(3) de la loi 2006/022 sont applicables, ne nous semble pas dénué de sens.

En définitive, les délais de saisine, et c’est le moins que l’on puisse dire, sont marqués du sceau de la divergence entre les deux procédures étudiées. Reste à examiner les délais de réponse.

2) Les délais de réponse de l’administration

Comme relevé plus haut, ce sont des délais prévus en faveur de l’administration pour donner sa réponse sur les réclamations faites par les administrés dans leur recours précontentieux. Dans la pratique, l’intérêt de ce délai réside dans le fait qu’à son expiration, s’ouvre la computation du délai de saisine de la juridiction administrative compétente.

Les délais de réponse tout comme ceux de saisine, varient clairement d’une procédure à l’autre. Ainsi, la loi de 2006 précitée reconnait en son article 17(2), un délai de trois mois aux autorités administratives pour se prononcer sur un recours gracieux préalable à elles adressé.

Or, ce délai est inapplicable dans le CAF, dans la mesure où le CGI prévoit un délai de trente jours à la faveur du chef du Centre régional des impôts, du directeur des grandes entreprises et du directeur général des impôts pour se prononcer sur la réclamation préalable à eux adressée. Si le MINFI est saisi, il dispose d’un délai de deux mois pour statuer à compter de la date de réception de la réclamation préalable du contribuable.

Dans le CAF local, le maire et le délégué du gouvernement disposent d’un délai de 15 jours, tandis que le préfet dispose d’un délai de 90 jours .
Il faut dire qu’en ce qui concerne la technique de computation de ces délais, il n’y a point de différence, les délais étant en contentieux administratif camerounais, des délais francs.

Si la question des délais révèle une nette ligne de démarcation entre les deux procédures, l’on ne saurait toutefois s’en contenter. Nous devons alors poursuivre notre étude par une mise en relief des recours précontentieux institués dans chacune des procédures étudiées.

C) Les recours précontentieux consacrés dans le CAG et le CAF

Il s’agit dans le cadre du CAG, du recours gracieux préalable (RGP) prévu par l’article 17 de la loi no2006/022, et dans le cadre du CAF, de la réclamation préalable (RP) instituée par l’art L116 du Livre de procédures fiscales. L’exercice régulier de ces recours suppose qu’ils soient recevables (1), alors, ils suivront la procédure d’examen devant conduire à leur aboutissement (2). Lesdits recours, possèdent par ailleurs certains caractères importants qu’il convient d’examiner (3).

1) Les conditions de recevabilité du RGP et de la RP

Toute requête adressée à une autorité pour examen, doit en principe être recevable pour que cette dernière puisse se prononcer sur son contenu. Cela signifie que, la recevabilité peut se comprendre comme un ensemble d’exigences légales qu’une requête doit satisfaire pour être connue dans son fond par l’autorité compétente. Au stade des recours précontentieux, lesdites exigences sont triples : la saisine des autorités compétentes (a), le respect des délais, et enfin, la forme et au fond de la requête (b).

a) L’obligation de saisir les autorités compétentes

Les délais ayant déjà été abordés, l’on précisera juste qu’il s’agit ici, des délais de saisine examinés supra. Relativement aux autorités compétentes, leur détermination est fonction du type de contentieux dans lequel on se trouve.

Ainsi, en ce qui concerne les autorités administratives saisissables dans le cadre d’un CAG, l’on doit juste se référer à l’article 17(1) de la loi de 2006 qui dispose que « le recours devant…qu’après rejet d’un recours gracieux adressé à l’autorité auteur de l’acte attaqué ou à celle statutairement habilitée à représenter la collectivité publique ou l’établissement public en cause ».

Dès lors, l’on se doit d’adresser son recours gracieux préalable à l’autorité ayant prise la décision qui nous fait grief. Cette prescription légale semble aujourd’hui satisfaire les praticiens et la doctrine spécialisée en contentieux administratif au Cameroun .
Si cependant, l’auteur de l’acte attaqué est membre d’une administration décentralisée, alors l’on adresse son recours gracieux préalable à la personne qui selon les statuts de cette administration décentralisée, est son représentant dans sa vie civile et juridique. Il s’agit très souvent du maire dans une commune, du recteur dans une Université, du directeur ou directeur général dans un établissement public administratif…

Dans le CAF par contre, la démarche est plus simple dans la mesure où, comme on l’a démontré précédemment, les autorités administratives intervenant à l’occasion d’une réclamation préalable sont circonscrites par le CGI. Ainsi, selon le montant de notre réclamation, l’on peut adresser sa réclamation préalable au CCRI, au DGE ou au DGI au premier stade. En cas d’insatisfaction, l’on s’adresse directement au MINFI.
Par contre, si l’on fait face à l’administration fiscale locale, alors l’on doit s’adresser au maire (commune) ou au délégué du gouvernement (communauté urbaine) dans un premier temps. En cas d’insatisfaction, l’on saisi le préfet.

Toutefois, pour que notre requête puisse être examinée par chacune de ces autorités, il faut qu’elle satisfasse à certaines exigences relativement à sa forme et à son fond.

b) Le respect des conditions de forme et de fond dans le RGP et la RP

Relativement à leur forme, le recours gracieux préalable et la réclamation préalable en tant que des lettres officielles, obéissent aux canons littéraires de la présentation d’une lettre formelle.

Le recours gracieux préalable à la différence de la réclamation préalable, ne fait pas l’objet d’une description de son contenu par la loi de 2006 précitée. Toutefois, l’on peut penser qu’en tant que recours précontentieux, le recours gracieux préalable est assez proche dans son élaboration, du recours qu’il précède. Ainsi, il nous semble juste d’affirmer que les prescriptions de l’article 35 de la loi de 2006 précitée relatives aux exigences de forme et de fond que doit respecter un recours contentieux, sont applicables à l’élaboration du recours gracieux préalable.

En ce qui concerne la réclamation préalable, le CGI a pris la peine d’énumérer à travers son article L116, les conditions de forme qu’elle doit respecter pour être recevable devant les autorités fiscales compétentes.
Bien que ces conditions soient nombreuses, l’on doit relever que l’obligation d’appuyer sa réclamation préalable des justificatifs du paiement de la partie non contestée de l’impôt et l’obligation de signature de la requête, sont les plus importantes conditions de recevabilité de la réclamation préalable.

Passée la détermination de l’autorité destinataire du recours précontentieux et la satisfaction des exigences liées à sa recevabilité, le recours précontentieux quel qu’il soit, peut suivre la procédure relative à son examen.

2) La procédure suivie par le RGP et la RP

Cette procédure est marquée par deux phases principales que sont la phase de l’examen, et celle de la réponse de l’administration saisie. Si la phase de l’examen dans les deux procédures révèle une différence notoire (a), celle de la réponse de l’administration apparait comme quasi identique (b).

a) La phase d’examen du RGP et de la RP

Saisi d’un recours précontentieux régulièrement adressé, l’administration se doit de l’examiner. S’il est vrai que ni la loi de 2006, ni le CGI ne révèle comment doit être conduit cet examen par l’administration compétente, alors il n’est pas possible de dire objectivement si cet examen varie d’une procédure à une autre.

Toutefois, une différence importante existe au stade de l’examen du recours précontentieux entre le CAG et le CAF. Il s’agit du fait que la loi no 2006/022 n’institue qu’un seul degré d’examen du recours gracieux préalable dans le cadre du CAG alors que le CGI consacre un double degré d’examen aussi bien devant l’administration fiscale centrale que devant l’administration fiscale locale dans le cadre du CAF.

Ainsi, si l’on ne peut en principe saisir qu’une seule autorité pour examen de notre recours gracieux préalable, l’on se doit en principe d’en saisir deux, pour connaitre de notre réclamation préalable. Telle est la volonté du législateur fiscal au Cameroun.

La requête précontentieuse examinée, l’administration se prononce sur la demande du requérant. Plusieurs modalités s’offre à elle.

b) La réponse de l’administration au RGP et à la RP

Régulièrement adressée, le recours gracieux préalable ou la réclamation préalable est examiné(e) par l’administration compétente, après quoi elle se prononce sur le fond. Elle peut également garder le silence durant la période à elle octroyée pour statuer, à l’expiration de ce délai de réponse, ce silence vaudra rejet implicite du recours précontentieux.
Cette hypothèse est possible dans les deux types de contentieux étudiés. Ainsi, le silence gardé pendant trois mois par l’autorité administrative mise en cause dans un recours gracieux préalable à compter de sa date de réception équivaut à son rejet implicite.

De même, dans le CAF, le silence gardé par le CCRI, le DGE ou le DGI pendant un mois à compter de la date de réception de la réclamation préalable équivaut à son rejet implicite. Pareil, si le MINFI garde le silence pendant deux mois après réception de la réclamation préalable.
Cette modalité de réponse ne signifie pas cependant que ces diverses autorités administratives ne puissent pas répondre de façon explicite aux requérants, et ce faisant, elles peuvent accéder ou non à leurs demandes.

Si la procédure suivie par le recours gracieux préalable et la réclamation préalable semble receler des éléments de similitude d’une part, et des éléments de distinction d’autre part. Les caractéristiques attachées à ces deux recours précontentieux sont parfaitement identiques.

3) Les caractéristiques du RGP et de la RP

Ces caractéristiques sont triples et s’appliquent aussi bien au recours gracieux préalable qu’a la réclamation préalable. Il s’agit de leur caractère obligatoire, d’ordre public et du fait qu’il lie chacun leur recours contentieux.

Relativement à leur caractère obligatoire, cela signifie qu’aussi bien le recours gracieux préalable que la réclamation préalable doit être impérativement adressé(e) par tout administré à l’administration compétente avant que ce dernier ne porte sa contestation devant le juge administratif. Par conséquent, si l’administré ne satisfait pas à cette obligation, son recours contentieux sera déclaré irrecevable pour défaut de recours gracieux préalable ou de réclamation préalable par la juridiction compétente. Le requérant n’est dispensé de cette obligation qu’en cas d’exception prévue expressément par les textes ou la jurisprudence.

Leur caractère d’ordre public par contre signifie qu’il n’est pas nécessaire que l’État relève le défaut de recours gracieux préalable ou de réclamation préalable pour que le juge prononce l’irrecevabilité du recours contentieux. Le juge peut le relever de lui-même et à tout stade du procès. Il peut même le faire lors du procès en appel, nonobstant le fait que le juge d’instance ne l’ait pas relevé. Le cas échéant, il rejette de suite le recours contentieux de l’administré et donne automatiquement gain de cause à l’administration. On dit alors que le recours gracieux préalable ou la réclamation préalable est un moyen d’ordre public.

Ces deux recours précontentieux possèdent un dernier caractère, c’est la liaison qu’elles opèrent sur le recours contentieux. Autrement dit, c’est l’identité d’objet qui doit exister entre eux et le recours contentieux qui leur est postérieur. Ainsi, seules les demandes mentionnées dans le recours gracieux préalable ou dans la réclamation préalable peuvent être reconduites dans le recours contentieux y afférent. Toute demande non formulée préalablement dans le recours gracieux préalable ou dans la réclamation préalable sera rejeté par le juge en tant que demande nouvelle.

Le CGI apporte toutefois un petit bémol à ce principe en CAF. En effet, l’article L 130 du LPF donne droit au requérant ayant formulé une demande dans sa réclamation préalable, de pouvoir formuler explicitement une demande nouvelle dans sa requête introductive d’instance. Mais uniquement dans la limite du dégrèvement primitivement sollicité.

La phase précontentieuse du CAG et du CAF quasi entièrement dévoilée, il nous reste à examiner la question des mesures d’urgence. Ainsi, que prévoit les textes pour parer à l’urgence à la phase précontentieuse des procédures étudiées ?

D) Le sort des mesures d’urgence

Il faut dire que c’est sans doute relativement à ce dernier élément de comparaison, qu’existe la plus grosse différence entre le CAG et le CAF à leur phase précontentieuse. En effet, si aucune mesure d’urgence n’est prévue par la loi de 2006 précitée dans le cadre du CAG (1), le CGI par contre, prévoit le sursis de paiement au stade de la réclamation préalable (2).

1) Le CAG et l’absence de mesure d’urgence à la phase précontentieuse

Bien que la loi de 2006 reconnaisse deux types de mesure d’urgence effectuables au cours d’un contentieux administratif quelconque, ni le sursis à exécution, ni le référé administratif ne peuvent être en principe ordonnés par l’administration saisie d’un recours gracieux préalable.

Dans le cadre du CAG, l’administration peut à la phase précontentieuse sursoir à exécuter sa décision par sa seule volonté, nul ne peut l’y contraindre. Si elle venait à le faire pour une raison quelconque, l’on ne peut parler que de clémence, voire de prudence administrative selon le cas. La situation est tout à fait différente dans le CAF.

2) Le CAF et la présence du sursis de paiement à la phase précontentieuse

La réclamation préalable tout comme le recours gracieux préalable ne dispense pas le contribuable du paiement de l’impôt mis en cause, elle n’a pas d’effet suspensif. Mais au regard de l’enjeu financier pour les parties à un litige fiscal, notamment pour les contribuables. Le législateur fiscal a prévu une mesure exceptionnelle qu’est le sursis de paiement, disponible aussi bien à la phase précontentieuse qu’a la phase contentieuse du CAF.
Son régime assez simple en ce qui concerne ses modalités d’octroi, témoigne de la volonté du législateur d’en faire un réel moyen de protection du contribuable.

Ainsi, le contribuable qui entend bénéficier du sursis de paiement durant l’exercice de sa réclamation préalable, doit se référer aux prescriptions des articles L 121 et L116 du LPF. Le silence du MINFI pendant 15 jours à compter de la réception de la demande de sursis de paiement équivaut une décision d’acceptation tacite. En cas de rejet, le MINFI prend une décision écrite et motivée qu’il notifie au requérant.

L’on peut se rendre compte de ce que, contrairement à ce que l’on peut penser, le CAG et le CAF, ne serait-ce que relativement à leur phase précontentieuse respectives, recèlent de nombreux points de divergence. Ainsi, la nature administrative de ces deux contentieux et la présence commune d’une phase précontentieuse dans chacun d’eux, ne suffit pas à en faire des contentieux identiques. Examinons à présent leur phase contentieuse.

II) L’étude des phases contentieuses du CAG et du CAF

Cette phase n’est que la suite de la procédure entamée devant l’administration, elle se déroule devant le juge administratif. La phase contentieuse de chacune des procédures étudiées obéit à une logique temporelle qu’il convient de suivre au cours de notre analyse afin qu’elle soit pertinente et aboutie. Ce faisant, la mise en relief de leurs éléments de démarcation ainsi que de leurs éléments de rapprochement sera plus aisée. De ce fait, nos développements doivent décliner les phases contentieuses du CAG et du CAF relativement à leur ouverture (A), leur instruction (C), leur jugement (D) et aux mesures d’urgence prévues pour parer à tout préjudice imminent encouru par le requérant (B).

A) L’ouverture de la phase contentieuse

Pour chacune des procédures étudiées, elle consiste en la saisine régulière de la juridiction administrative compétente après échec du recours précontentieux. Que l’on se situe alors dans le cadre du CAG ou du CAF, cette saisine n’est possible que si la requête introductive d’instance satisfait à certaines exigences légales dites de fond (1) et de forme (2).

1) La requête introductive d’instance et les exigences de fond

Ces exigences de fond sont les mêmes en ce qui concerne le CAG et le CAF. Il s’agit du problème des délais d’une part (a), et de celui de la détermination de la juridiction administrative compétente d’autre part (b).

a) Les délais d’introduction de la requête introductive d’instance

Relativement aux délais, l’on doit d’abord dire qu’il s’agit des délais d’introduction de la requête introductive d’instance. Ainsi, que l’on se situe dans le cadre du CAG ou du CAF, les textes prévoient un délai de 60 jours à compter du lendemain de la notification de la décision de rejet du recours gracieux préalable ou de la réclamation préalable. Ou en cas de décision de rejet implicite (l’administration garde le silence), à partir du lendemain de l’expiration du délai de trois mois prévu pour qu’elle se prononce sur le recours gracieux préalable.

Toutefois, cette dernière hypothèse n’est pas possible en CAF, et là, réside la principale différence entre ces deux contentieux en matière de délai de saisine du Tribunal administratif (TA) compétent.

En effet, en cas de silence gardé par le MINFI à l’issue des deux mois dont il disposait pour se prononcer sur la réclamation préalable, l’État ne pourra point opposer la forclusion au requérant qui a saisi le TA au-delà du délai de soixante jours prévu pour l’exercice de son recours contentieux. La computation du délai de recours contentieux n’étant possible qu’en cas de réponse écrite du MINFI dument notifiée au contribuable.

Ainsi, si la durée du délai d’introduction d’instance est commune aux deux procédures, la computation peut varier selon la modalité d’intervention de la réponse du MINFI à la réclamation préalable.
Si l’on doit introduire son recours contentieux dans les délais sous peine que notre recours soit jugé irrecevable, il est tout aussi important de l’adresser au TA compétent.

b) La détermination du TA compétent pour recevoir le recours contentieux

Que l’on soit en matière contentieuse fiscale ou dans toute autre matière contentieuse administrative, l’on se doit d’adresser son recours contentieux ou sa requête introductive d’instance après échec du recours précontentieux au TA compétent. Car les TA connaissent selon la loi, du contentieux administratif en premier et dernier ressort.

La compétence dont il s’agit est de deux ordres. De ce fait, que l’on soit dans le cadre d’un CAG ou d’un CAF, l’on doit préalablement à l’adresse de notre requête introductive d’instance, vérifier la compétence matérielle et territoriale du TA destinataire de notre recours.

La compétence matérielle renvoi aux éléments de droit sur lesquels se fonde le pouvoir du Tribunal de connaitre d’un cas à lui soumis. Elle est circonscrite dans le cadre du CAG par l’article 2(2) et 2(3) de la loi no 2006/022 . En ce qui concerne le CAF par contre, la compétence matérielle du TA se fonde sur les griefs commis par l’administration fiscale aux contribuables par le biais d’un acte administratif (avis à tiers détenteur, blocage des comptes, avis de mise en recouvrement…) .

La compétence territoriale quant à elle renvoi aux éléments de droit qui fondent le pouvoir du tribunal d’une aire géographique donnée et d’un degré de juridiction précis, de connaitre d’un cas qui lui est soumis, au détriment d’un tribunal d’une autre aire géographique, de même degré de juridiction que lui et appartenant au même ordre de juridiction que lui.

Dans le cadre du CAG, les règles de détermination du tribunal administratif territorialement compétent sont posées par l’article 15 (1) (2). Tandis que dans le cadre du CAF, ledit tribunal territorialement compétent est celui du Centre des impôts de rattachement. Ainsi, si votre Centre des impôts de rattachement est celui territorialement compétent dans l’arrondissement de Bafoussam II, alors le tribunal administratif compétent pour connaitre de votre requête introductive d’instance sera celui de la région de l’Ouest, car ledit arrondissement est situé dans cette région.
Les questions de délai et de compétence évacuées, l’on peut à présent s’attarder sur la recevabilité formelle de la requête introductive d’instance.

2) La requête introductive d’instance et les exigences de forme

La forme de la requête introductive d’instance a principalement trait à son contenu, lequel ne varie pas tellement d’une procédure à une autre (a). Mais aussi, à certaines exigences matérielles et subjectives (b).

a) Les exigences relatives à son contenu

Le contenu de la requête introductive d’instance s’entend principalement de l’argumentaire qui y est développé et des prétentions qui les accompagnent. Il renvoie aussi à certaines indications qui doivent être mentionnées dans ladite requête. La loi de 2006 énumère lesdites indications et elles sont applicables également au CAF.
Toutefois, le contribuable requérant, devra y ajouter la copie de la décision attaquée et mentionner le montant des dégrèvements sollicités en droits et pénalités. De plus, il doit aussi satisfaire à certaines exigences matérielles et subjectives.

b) Les exigences d’ordre matériel et subjectif

Les exigences d’ordre matériel et subjectif sont comme les précédentes, marquées du sceau de la proximité entre les deux procédures. Ainsi, le paiement de la consigne est obligatoire et fixé au même tarif de vingt milles francs cfa (20.000F) dans les deux types de contentieux. Le requérant doit également timbrer sa demande. Sur le plan subjectif, le requérant doit remplir les conditions d’intérêt, de qualité et de capacité. Si le requérant à satisfait à toutes les conditions de recevabilité de sa requête, le TA est alors régulièrement saisi. Il peut le cas échéant, parer à toute situation d’urgence à laquelle il fait face du fait de la décision administrative querellée.

B) Les mesures d’urgence

Les mesures d’urgence peuvent s’entendre comme des mesures exceptionnelles, accordables à titre provisoire à un requérant en attendant que soit vidé le contentieux de fond.
Devant le juge administratif il en existe deux, consacrées par la loi 2006/022 (1) et une, consacrée par le CGI (2). Elles ne se confondent pas et s’appliquent chacune, à un des types de contentieux étudiés.

1) Le CAG et ses mesures d’urgence aux modalités d’octroi complexes

La loi de 2006 consacre comme mesure d’urgence invocable à l’occasion de tout contentieux administratif, le référé administratif et le sursis à exécution. L’étude de cette dernière seule, nous intéresse. Car, dans l’esprit de sa mise en œuvre, elle est assez proche du sursis de paiement institué dans le CAF.

Le sursis à exécution se définit comme une procédure ayant pour objet de permettre au président d’une juridiction administrative d’ordonner la suspension de l’exécution d’une décision administrative dont l’application pourrait entrainer des conséquences irréparables. Son régime juridique est l’œuvre des articles 30 et 31 de la loi de 2006 précitée.

Une lecture attentive de ces articles et de la doctrine, nous laisse penser que le juge ( président de la juridiction administratif ou le magistrat qu’il délègue) serait le vrai maitre de cette procédure. Car lui seul détermine au finish, au vu de l’argumentaire déployé par les parties, si urgence il y a, si un doute sérieux pèse sur la légalité de la décision administrative, si le préjudice encouru par le requérant est irréparable et surtout si l’ordre public n’est pas mis en cause. Rien, mais absolument rien ne garanti au requérant que sa demande de sursis sera reçue et accordée par le juge.

C’est tous le contraire dans le CAF.qui brille par la simplicité voire l’automaticité de sa mesure d’urgence.

2) Le CAF et la simplicité d’octroi du sursis de paiement

Dans son esprit, le sursis de paiement peut être défini comme le sursis à exécution, dans la mesure où, tout comme ce dernier, il vise la suspension de l’applicabilité de la décision de l’administration fiscale par le président d’une juridiction administrative, afin que ladite décision n’entraine pas des conséquences irréparables à l’endroit du contribuable. Son régime est défini par les articles L 121 et L 129 du CGI .

Une lecture minutieuse desdits articles et une observation attentive de la jurisprudence permet de constater que devant le juge, le sursis de paiement est d’application automatique si le requérant qui en fait la demande, satisfait aux exigences posées les articles précitées et l’article L 116 du CGI.

Ainsi, si le contribuable a effectué une demande de sursis de paiement régulière devant l’administration et s’il l’en refait la demande expresse au juge, appuyée du justificatif du paiement de dix pourcents supplémentaires de la partie contestée de l’impôt, alors le juge le lui accordera.

Ici, aucune réelle marge d’appréciation n’est laissée au juge administratif. Il se contente en principe de vérifier que le requérant remplit les exigences posées par le LPF et le cas échéant, il accorde le sursis de paiement.

L’urgence résolue, le juge et les parties peuvent à nouveau s’atteler à solutionner le contentieux de fond. La recherche de la solution passe par l’instruction du recours contentieux, dans chacune des procédures étudiées.

C) L’instruction du recours contentieux

Aussi bien dans l’hypothèse du CAG que du CAF, l’instruction du recours contentieux s’impose au Tribunal administratif. Dans les deux types de contentieux, elle est faite par un magistrat rapporteur sous l’autorité du président du tribunal administratif. Ladite instruction est conduite dans le respect des caractéristiques de l’instruction en contentieux administratif (1). Elle est marquée par deux grandes séquences que sont l’échange des mémoires et des pièces (2) et l’effectuation éventuelle d’une mesure d’instruction (3). Dans tous les cas, l’importance des pouvoirs du magistrat rapporteur dans chacune des procédures est déterminant à la bonne conduite de l’instruction du recours contentieux.

1) Les caractéristiques de l’instruction du recours contentieux

L’instruction de toute requête introductive d’instance dans un contentieux administratif est conduite que l’on soit en CAF ou dans le cadre du CAG, dans le respect de certaines règles. Ces règles qui encadrent l’instruction sont encore appelées ses caractéristiques. Ces caractéristiques sont parfaitement communes aux deux types de contentieux étudiés. Ainsi, l’instruction du recours contentieux aussi bien en CAF qu’en CAG, est écrite, sécrète contradictoire et inquisitoriale.

Le caractère écrit de l’instruction signifie que la communication se fait entre les parties au litige et entre la juridiction et les parties de façon écrite.
Ces communications sont par ailleurs sécrètes dans la mesure où, les parties au litige et même la juridiction administrative ne doivent les divulguer aux entités extérieures à la procédure, sauf autorisation expresse des textes.
Le contradictoire signifie que chaque partie au litige doit en temps utile, avoir connaissance des pièces et mémoires produits par son adversaire, et disposer d’un temps raisonnable pour pouvoir y répondre.

Enfin, le caractère inquisitorial signifie que le magistrat rapporteur dispose d’importants pouvoirs pour conduire l’instruction . A cet effet, il fixe les délais de réponse au mémoire, renverse la charge de la preuve, détermine la valeur de chaque preuve…

Les caractères sus déclinés encadrent l’instruction du recours contentieux dans toute sa durée et notamment, durant la phase très importante de l’échange des mémoires et des pièces.

2) L’échange des mémoires et des pièces

C’est une phase décisive de toute instruction d’un procès administratif. Son principe est simple. Après réception de la requête introductive d’instance, copie est envoyé à l’Etat avec fixation d’un délai de réponse. En cas de réponse de l’administration, copie est envoyée au requérant avec fixation d’un délai de réponse et ainsi de suite. Ce principe s’applique aux deux types de contentieux étudiés. Toutefois, une divergence existe quant à la durée des délais de réponse aux mémoires (a) et quant à l’impérativité de ceux-ci (b).

a) Les délais d’échange des mémoires

Ici, le CGI brille par la clarté et la simplicité de ses dispositions, tandis que la loi de 2006 fait preuve de lourdeur. Ainsi, le CGI reconnait un délai de trois mois au MINFI pour répondre à la requête introductive d’instance du requérant, mais est silencieux quant au délai de réponse des mémoires additifs. Toutefois, l’on peut penser au regard du caractère inquisitorial de l’instruction en contentieux administratif sus décliné, que ce délai est fixé librement par le magistrat rapporteur. Relativement aux trois mois accordés par la loi au MINFI pour répondre à la requête introductive d’instance, l’on doit noter que deux, de ces trois mois sont accordés au directeur général des impôts pour instruction. Le MINFI peut solliciter une rallonge de deux mois à son délai initial de trois mois en cas de circonstance exceptionnelle via une demande motivée adressée au tribunal administratif.

Le requérant quant à lui, dispose d’un délai d’un mois pour répondre au mémoire en réplique de l’administration et l’on peut penser, aux mémoires additifs aussi. Aucune disposition ne prévoit en sa faveur, la possibilité de demander une prorogation de son délai de réponse au mémoire de l’État.

Toutefois, cela ne signifie pas que dans la pratique, une pareille demande soit impossible. Le requérant qui fait une telle demande en arguant de circonstances exceptionnelle, peut obtenir une prorogation des délais en vertu de la nature inquisitoriale de l’instruction en contentieux administratif. Ce qui donne le pouvoir au juge s’il l’estime nécessaire, de pouvoir proroger les délais prévus initialement par les textes.

Dans le cadre du CAG, la loi de 2006 prévoit divers délais selon le stade de l’échange des mémoires. Ainsi, après communication de la requête introductive d’instance au défendeur, une ordonnance est prise par le magistrat rapporteur pour informer ledit défendeur, qu’il dispose d’un délai de 30 jours à compter du lendemain de la notification à lui faite de ladite ordonnance pour produire son mémoire en réplique. Après production dudit mémoire en réplique, le demandeur et le défendeur disposent dorénavant d’un délai de quinze jours chacun pour produire leurs mémoires additifs .

Chacune des parties peut solliciter une prorogation de ce délai de 15 jours auprès du magistrat rapporteur sur demande justifiée. Le magistrat rapporteur peut aussi mettre en demeure, toute partie au litige de lui fournir dans un délai de quinze jours, toutes explications ou documents utiles à l’émergence d’une solution au litige. Les autres parties reçoivent communication du document produit et disposent de quinze jours pour fournir leur observation.

Dans tous les cas, une question assez importante demeure. Celle de l’incidence réelle de ces délais sur l’instruction en cours.

b) L’incidence des délais d’échange des mémoires et des pièces sur l’instruction

Il s’agit en fait, de savoir si ces délais sont impératifs ou non. Bien que ni la loi no 2006/022, ni le CGI n’aient formellement employé le terme impératif, l’on doit cependant avouer que dans l’esprit du législateur, il s’agit clairement de délais impératifs. C’est-à-dire, de délais dont le respect s’impose de façon stricte aux parties au litige sous peine de sanction.

A cet effet, le CGI pour signifier l’impérativité de ses délais, prévoit la conséquence à tirer de leur non respect. Ainsi, le MINFI resté silencieux à l’issue du délai à lui imparti pour produire son mémoire est réputé avoir acquiescé aux dires du requérant. Dans la même logique, si le requérant ne produit pas son mémoire à l’expiration du délai à lui imparti, alors il est considéré comme s’être désisté de son action.

La loi de 2006, quant à elle, est plus souple. Elle précise en son article 43 que tous les délais prévus relativement à la phase d’échange des mémoires et des pièces sont, sauf dispositions contraires prescrits sous peine de déchéance. Il s’agit de la déchéance du mémoire/pièce et non de la cause. Cela signifie que tout mémoire produit hors délai est en principe irrecevable, sans entrainer pour autant la déchéance de la cause de la partie concernée. Ainsi, si le mémoire hors délai est un mémoire additif, la juridiction statuera en tenant compte de tous les mémoires précédents réguliers. En définitive, dans le CAG, seul le mémoire hors délai peut être mis hors jeu, et à la différence du CAF le juge ne pourrai conclure à la déchéance automatique de la cause de la partie défaillante.

Les présents développements nous poussent à conclure que les délais sont d’application plus stricte en CAF qu’en CAG.
Lesdits délais existent aussi en cas de mesures d’instruction, peu importe le type de contentieux.

3) Les mesures d’instruction

Ce sont des mesures ou techniques d’enquête assez particulières qui peuvent nécessiter un recours à des experts, chargés de mettre leurs connaissances au service du Tribunal et de l’éclairer sur des questions assez complexes. La loi de 2006 en reconnait une variété (a) tandis que le CGI ne consacre qu’une seule (b).

a) Le CAG, et l’institution d’une diversité de mesures d’instruction

La loi de 2006 qui définit le cadre général du contentieux administratif institue en son chapitre quatre, cinq mesures d’instruction. Leur déclinaison détaillée n’est pas nécessaire dans le cadre de la présente étude, ainsi nous nous contenterons de les énumérer.

Il s’agit de l’enquête, la descente sur les lieux, la vérification des écritures, l’expertise et l’audition des témoins. Toutes ces mesures peuvent, soit être demandées par une partie au litige, soit être provoquées d’office par le Tribunal administratif. Ces hypothèses sont aussi possibles en CAF.

b) Le CAF, et l’expertise comme mesure d’instruction unique

Dans le CAF, le CGI ne consacre que l’expertise comme mesure d’instruction effectuable durant l’instruction. Son régime est défini par les articles L 134 à L 139 du LPF et une certaine adaptation lui est faite en rapport avec les spécificités du CAF. Elle n’est donc point un « copier coller » de l’expertise prévue par la loi de 2006 précitée.

Une question se pose cependant, les mesures d’instruction reconnues par la loi de 2006 mais méconnues du LPF, ne sont-elles point applicables en CAF ? La jurisprudence nous le dira.

Les mesures d’instruction constituent donc un réel point de divergence entre les deux types de contentieux qui nous intéressent. Qu’en es-il de la phase de jugement ?

D) Le jugement

Le jugement marque la clôture de toute procédure contentieuse, au moins devant la juridiction qui statue. Il faut dire d’emblée, que relativement au déroulement de l’audience de jugement, seules les dispositions du chapitre 03 de la loi de 2006 sont applicables, peu importe que l’on soit dans le cadre d’un CAG ou d’un CAF. Ce voile levé, il nous reste à nous intéresser à la question voies de recours (2) qui sera précédée d’un examen des pouvoirs du juge (1).

1) Les pouvoirs du juge

L’intérêt de cette analyse est assez particulier, dans la mesure où, si l’on se réfère à la classification des recours en contentieux administratif. L’on se rendra compte de ce que le CAF est le contentieux par excellence, de la catégorie des contentieux de pleine juridiction.

De ce fait, dans un CAF et notamment celui pour excès de pouvoir, les juges de siège qui doivent délibérer sur l’affaire connue par leur juridiction, peuvent non seulement annuler la décision querellée de l’administration fiscale, mais aussi la modifier ou la remplacer intégralement par une autre.

Si ce pouvoir du juge est systématique en CAF, cela n’est point le cas dans tous les contentieux relevant exclusivement de la loi de 2006 sur le plan processuel.
Ainsi, dans le cadre du CAG, le juge est très souvent un juge de l’annulation ou un juge qui ne peut faire mieux, sinon plus que ce qui lui a été demandé par les parties. Ici, le juge est limité dans son office et dans le jugement qu’il peut rendre.

Des contentieux relevant expressément de la loi de 2006, seul le contentieux électoral, en tant que contentieux de pleine juridiction, bénéficie tout comme le CAF, d’un office mené par un juge du jugement aux pouvoirs étendus.

Le CAF est donc marqué par l’office d’un juge aux pouvoirs étendus, tandis que le CAG oscille selon le cas entre l’office d’un juge aux pouvoirs larges et celui d’un juge aux pouvoirs restreints. Les pouvoirs du juge constituent de ce fait une relative ligne de démarcation entre les deux contentieux étudiés.

Dans tous les cas, juges aux pouvoirs larges ou restreints, ils doivent rendre un jugement à l’issue de leur office. Ledit jugement peut être attaqué par l’exercice d’une voie de recours.

2) Les voies de recours

Aucune distinction majeure n’est à signaler sous ce prisme, relativement au CAG et au CAF. D’ailleurs, le CGI ne traite même pas des voies de recours. C’est dire qu’il laisse le soin aux dispositions appropriées de la loi de 2006, d’être appliquées en la matière.
Ainsi, que l’on soit dans le cadre du CAG ou du CAF, les seules voies de recours possibles sont celles prévues par le chapitre VI de la loi de 2006. Il s’agit de l’opposition, l’appel , la tierce opposition, le pourvoi en cassation, la révision et le recours en rectification d’erreur matérielle. Leur examen détaillé n’est point nécessaire.

Les délais d’exercice de ces divers recours sont prévus par la loi no 2006/016 portant organisation de la Cour Suprême et sont les exactement les mêmes, que l’on soit dans un CAF ou dans un contentieux relevant du CAG.

L’étude des voies des recours nous dévoile donc en ce qui les concerne, une identité parfaite entre les deux types de contentieux étudiés.

III) L’étude des points de controverse existants entre le CAG et le CAF

On entend par point de controverse dans le cadre de cette étude, les points de droit régulièrement débattus par les parties devant le juge administratif.
Malgré l’important effort de clarté dont fait preuve législateur camerounais en matière de droit administratif processuel, force est de constater que certains praticiens, très souvent des représentants de l’Etat, Invoquent des dispositions d’un texte et demande au juge de l’appliquer au détriment ou en plus des dispositions d’un autre.

De ce fait, des dispositions de la loi de 2006 et des dispositions du CGI se cognent les têtes de façon assez inexplicables et plutôt récurrentes devant les juges administratifs.
L’analyse de la jurisprudence récente des Tribunal administratif, nous a permis de constater que les principaux points de controverse concernent l’article 31 de la loi de 2006 (A), l’article L 129 du LPF (B) et de la procédure de la réclamation préalable (C).

A) La controverse née de l’article 30.2 de la loi no 2006/022

1) L’exposé de la controverse

Une observation minutieuse du CAF tel que pratiqué actuellement devant les Tribunaux administratifs révèle une certaine curiosité. En effet, plusieurs représentants de l’État invoquent très souvent l’article 31 de la loi no 2006/022, pour faire échec à la demande de sursis de paiement intentée par le demandeur au procès. Ce faisant, ils créent une confusion entre le sursis de paiement et le sursis à exécution.

Ces représentants de l’État estiment en fait, qu’en plus des exigences posées par les articles L121, L116, L128 et L129 du LPF, le juge de l’urgence doit vérifier en sus, qu’il y a en l’espèce une urgence avérée et une sérieuse éventualité de préjudice irréparable comme l’exige la loi de 2006 en matière de sursis à exécution à travers son article 30 (2).

Ainsi, dans l’affaire OSP/PTA/DLA no 43 du 18/12/2014, ECA-ERNST et YOUNG c/ État du Cameroun (MINFI). Le représentant de l’Etat conclura devant le TA en ces termes : « Mais attendu que l’article 30(2) de la loi 2006/022 dispose que : Lorsque l’exécution est de nature à causer… ; (…) Qu’aux termes de l’article précité le requérant doit rapporter la preuve que la décision querellée lui causerait un préjudice irréparable ; Que le requérant sollicite le sursis de paiement mais ne rapporte pas la preuve du caractère irréparable du préjudice que pourrait lui causer les mesures de recouvrement envisagées. »

Cette lecture combinée de la loi de 2006 et du CGI est-elle juste en la matière ? Le sursis de paiement serait-il le fruit d’un régime mixte ? En tout cas, cette dualité assez curieuse du régime juridique du sursis de paiement invoquée par certains praticiens, demandait une clarification des juges administratifs à l’occasion des litiges soumis à leur juridiction.

2) La position de la jurisprudence

Il faut le dire d’emblée, puisqu’une fois n’est pas coutume, la position du juge administratif sur la question du régime applicable au sursis de paiement, et notamment ses conditions d’octroi, est une position fixe. C’est à dire identique d’un cas à un autre et d’un tribunal administratif à un autre.

Le juge administratif régional dans sa jurisprudence relativement jeune sur la question mais suffisamment abondante est assez clair. Il n’y a point de dualité et surtout pas de confusion pour ce qui est du régime applicable au sursis de paiement. Seules les dispositions du LPF y afférentes sont d’application.

Dans l’espèce Ernst et Young précitée, le juge fera échec aux arguments de l’État et s’inscrit en faux contre cette théorie du régime hybride du sursis de paiement. Rappelant les articles L121 et L129 du LPF, il précise que seules ces dispositions sont applicables en matière de sursis de paiement sollicité à la phase juridictionnelle.
L’on peut donc conclure que seuls les articles L116 L129, L128 et L121 du LPF précités, sont applicables en ce qui concerne les modalités d’octroi du sursis de paiement devant le juge administratif.

En définitive, les régimes juridiques du sursis de paiement et du sursis à exécution sont parfaitement distincts et relèvent de deux textes différents qui ne sauraient se confondre.

B) La controverse née de l’article L129 du LPF

1) L’exposé de la controverse

En effet, ledit article dispose que : « Le requérant qui entend bénéficier devant le juge administratif du sursis de paiement déjà appliqué au stade de la réclamation, doit… ».
Cette disposition en apparence simple, recèle pourtant une ambigüité importante. Que veut dire déjà appliqué ? Déjà demandé, ou déjà octroyé ? Une observation vigilante de la pratique contentieuse montre que, tandis que les requérants optent très souvent pour la théorie de déjà demandé, les concluants de l’État par contre, penchent pour celle de déjà octroyé.

Ainsi, dans l’affaire OSP/PTA/DLA no 44 du 18/12/2014, Sté Sonam Cameroun LTD c/État du Cameroun (MINFI). Le représentant du MINFI conclura en ces termes dans son mémoire : « Qu’il ressort des pièces jointes au dossier que la requérante a sollicité du MINFI un sursis de paiement… ; (…) Que ladite réclamation a été rejetée par le MINFI ; Que le sursis de paiement n’ayant pas été octroyé par le MINFI, le TA se doit de rejeter cette réclamation... ; »
En effet, pour les représentants de l’Etat, un requérant débouté de sa demande de sursis de paiement devant l’administration fiscale ne peut l’obtenir devant le tribunal administratif.

Il y aurait donc selon eux, une liaison stricte entre le sort du sursis de paiement à la réclamation préalable et celui du sursis de paiement au recours contentieux. Le ministre des finances serait-il donc, le vrai et unique juge du sursis de paiement ? Le juge de l’urgence n’exercerait alors qu’un pouvoir restreint et lié ? C’est tout l’enjeu de ce débat contentieux qu’il appartient toutefois, au seul juge du fond de trancher.

2) La position de la jurisprudence

Le juge administratif agissant en matière fiscale comme dans toute autre matière relevant de sa compétence, se doit d’interpréter les dispositions équivoques des textes soumis à son office afin de leur donner une application aisée et compréhensible par tous.

C’est ainsi qu’à l’occasion de certaines espèces soumis au juge administratif régional, ce dernier a été amené à interpréter de façon extensive l’article L129 controversé du LPF. Il dit in fine, que l’expression déjà appliqué doit être entendue comme « déjà régulièrement demandé ».

En fait, le régime d’octroi du sursis de paiement devant le MINFI étant plutôt clair, et ne laissant point de place à un réel débat juridique, les juges du tribunal administratif pensent que dans l’hypothèse où le requérant justifie d’une demande de sursis de paiement effectuée devant l’administration fiscale de façon conforme aux exigences des articles L 116 et 121 du LPF. Même si ce dernier se voit débouté par le ministre des finances à travers une réponse motivée, le requérant peut valablement à nouveau formuler une demande de sursis de paiement dans son recours contentieux. Elle lui sera octroyée de plein droit s’il satisfait aux exigences légales prévues en la matière.
Ainsi, dans l’espèce précitée, le juge ne fera pas droit à la demande de l’Etat, et rappelant les termes de l’article L129 du LPF il accordera le sursis de paiement à la requérante.

C) La controverse née de la procédure de la réclamation préalable

1) L’exposé de la controverse

A la réalité, deux problèmes se posent à ce niveau. Le premier est dû à l’ignorance de certains praticiens, et le second est né de la pratique. Toutefois, ces deux problèmes sont relatifs aux autorités destinataires de la réclamation préalable et notamment à leur ordre de saisine et la valeur de la saisine de chacune d’entre elles.

Le CGI institue quatre autorités saisissables en matière de réclamation préalable, reparties en deux strates. Trois autorités sont prévues au niveau de la première strate et connaissent chacune de la réclamation préalable d’une catégorie bien précise de contribuable en fonction du montant de leur réclamation.

Cependant, le lien hiérarchique existant entre ces trois autorités prête très souvent à confusion dans la pratique, et pousse certains contribuables à les saisir les unes après les autres avant de se porter devant le MINFI. Ce dernier se situe à la seconde strate de la réclamation préalable et connait en dernier ressort de toute réclamation préalable primitivement adressée au chef de Centre régional des impôts, au directeur des grandes entreprises ou au directeur général des impôts.

Les problèmes qui se posent à ce niveau, peuvent être convertis en les questions suivantes : Peut-on saisir le juge administratif sans saisir le ministre des finances ? Doit-on d’abord saisir toutes les trois autorités se situant au premier degré de la réclamation préalable avant de saisir le ministre des finances ?

2) La position de la jurisprudence

A ce niveau, il s’agissait à la réalité pour le juge administratif, de boucler l’édifice de la réclamation préalable dessiné par le LPF, sinon de le consolider, afin d’éviter tout champ fertile à l’instabilité juridique et notamment au désordre jurisprudentiel.
Il fallait alors déterminer l’ordre de saisine des autorités compétentes en matière de réclamation préalable, et la valeur processuelle de la saisine de chacune d’entre elles.

En bref, deux questions principales se posaient : y a-t-il juxtaposition ou superposition entre les trois autorités instituées au premier degré ? Et, peut-on saisir le juge administratif sans évacuer nécessairement les deux degrés de juridiction administrative prévus par le LPF ?
Le juge administratif, à l’occasion d’espèces soumis à son office, va vider ce débat contentieux.

Il consacre de façon implicite dans l’espèce Sonam Cameroun Ltd précitée la juxtaposition entre les autorités situées au premier degré de la réclamation préalable, en faisant droit au recours contentieux de la requérante qui n’avait saisi que le chef de Centre régional des impôts et ensuite le MINFI de ladite réclamation.

Cela signifie en principe, qu’après saisine du chef de Centre régional des impôts, nul besoin n’est en cas d’insatisfaction, de saisir son supérieur hiérarchique qu’est le directeur des grandes entreprises ou le directeur général des impôts avant de saisir le MINFI. Le principe est donc celui de la saisine directe du MINFI si l’on n’est point satisfait par la décision de l’autorité préalablement saisie. Les autorités situés au premier degré de la réclamation préalable sont donc juxtaposées et le MINFI leur est superposé.

Pour ce qui est de la deuxième question, plus porteuse d’intérêt. Le juge va avoir une réponse une réponse assez libérale et audacieuse.
Dans l’espèce Eca-Ernst et Young Cameroon précitée, le président du tribunal administratif du Littoral a estimé qu’une réclamation préalable adressée au Directeur général des impôts et répondue par le MINFI et ce, à travers l’apposition de ses visas sur la lettre de réponse, ne nécessitait plus que le requérant saisisse ledit ministre, car ladite réponse arrêtait déjà sa position sur le litige.

Il faut donc penser que si la décision n’émane pas expressément du MINFI, le requérant se doit obligatoirement de le saisir avant de saisir le juge, sous peine de voir son recours contentieux être déclaré irrecevable.

On peut donc conclure qu’il est possible de saisir valablement le juge administratif sans évacuer les deux degrés de administrative prévus par le LPF dans la procédure de réclamation préalable.

S’il est vrai que de nombreux textes juridiques peuvent traiter de la même matière, chaque texte régira cependant un pan bien précis de la matière concernée. Ainsi, si la loi no 2006/022 définit le cadre général du contentieux administratif, Il n’est pas incompatible avec de nombreux autres textes qui régissent intégralement ou partiellement des contentieux spécifiques appartenant à la famille du contentieux administratif.

Dans cette hypothèse, les dispositions contraires ou concurrentes des textes particuliers l’emportent sur celles de la loi de 2006. La loi de 2006 quant à elle, continue de s’appliquer à tous les éléments de la procédure qui n’ont point été régi par le texte particulier.

Il faut noter que lorsqu’un texte particulier, régi en grande partie la procédure contentieuse dune matière donnée devant la juridiction administrative, Il crée automatiquement un régime contentieux dérogatoire de celui édicté par la loi de 2006 précitée. C’est le cas avec le CGI en contentieux administratif fiscal.

Dans ce cas de figure, malgré les nombreux points de rapprochement qui apparaissent au premier abord, l’on doit procéder à un examen minutieux des deux procédures contentieuses avant de se livrer à toute conclusion. Ce faisant, l’on découvrira systématiquement de nombreuses lignes de démarcation, lesquelles justifient d’ailleurs, l’établissement d’une procédure distincte de la procédure générale.

Cette situation est normale, car la procédure dérogatoire est une procédure adaptée aux spécificités de la matière qu’elle régie. Ce qui commande qu’on ne puisse lui appliquer en totalité les dispositions d’un texte pris dans un cadre plutôt large.
Bien que les points de controverse ne puissent manquer dans de telle situation entre la loi cadre et le texte particulier, le juge, arbitre des débats, devra au cours de son office, se souvenir de ce que, chaque texte en présence à un fondement ou une raison d’être bien précise.

Ainsi, il lui sera plus facile de dire avec assurance, le moment venu, la disposition de quel texte doit s’appliquer au détriment de la disposition d’un autre ou en complément de celle-ci. Afin que règne un droit harmonieux aussi bien dans les textes que dans la jurisprudence.

TCHIDJO TCHIDJO Samuel Stéphane
Comentaires: