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Garde à vue : un nouveau droit de communication pour le mis en cause. Par Sabrina Gabteni, Avocat.
Parution : jeudi 8 décembre 2016
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La loi n°2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, a modifié plusieurs dispositions du Code de procédure pénale.
Le décret d’application n°2016-1455 du 28 octobre 2016 prévoit un nouveau droit de communication pour le gardé à vue.

Depuis le 15 novembre 2016, date de l’entrée en vigueur du décret n°2016-1455 du 28 octobre 2016, l’article 63-2 du Code de procédure pénale a été modifié.

La personne gardée à vue s’est vue conférer un nouveau droit, et pas des moindres, celui de pouvoir communiquer par écrit, par téléphone ou lors d’un entretien physique avec un tiers.

Les tiers concernés sont classiquement :
- La personne avec laquelle elle vit habituellement,
- L’un de ses parents en ligne directe,
- L’un de ses frères et sœurs,
- Son curateur ou son tuteur de la mesure dont elle est l’objet,
- Son employeur,
- Les autorités consulaires de son pays si elle est étrangère.

Il faut souligner que l’exercice de ce droit de communication ne peut se faire qu’à la demande du gardé à vue. Il est donc primordial que, dès l’entretien, l’avocat informe son client de l’existence de ce droit.

En outre, le texte prévoit les modalités de cette communication.

Il donne à l’officier ou l’agent de police judiciaire de nombreuses prérogatives pour décider de la manière dont ce droit va s’exercer.

Ainsi, il est prévu que l’officier ou l’agent de police judiciaire détermine le moment, la durée et les modalités de cette communication :
- Il a le pouvoir de contrôler cette communication en étant présent ou en désignant une personne de son choix pour ce faire ;
- Il détermine la durée de cette communication qui ne peut excéder trente minutes.

Notons toutefois que l’exercice de ce droit de communication n’est pas absolu puisque le texte offre à l’officier ou l’agent de police judiciaire la possibilité de le refuser.

Cela sera notamment le cas lorsqu’il lui apparaîtra qu’il existe un risque de commission d’une infraction ou lorsque les objectifs de l’article 62-2 du Code de procédure pénale ne peuvent être assurés, à savoir :

  1. Permettre l’exécution des investigations impliquant la présence ou la participation de la personne ;
  2. Garantir la présentation de la personne devant le procureur de la République afin que ce magistrat puisse apprécier la suite à donner à l’enquête ;
  3. Empêcher que la personne ne modifie les preuves ou indices matériels ;
  4. Empêcher que la personne ne fasse pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ou leurs proches ;
  5. Empêcher que la personne ne se concerte avec d’autres personnes susceptibles d’être ses coauteurs ou complices ;
  6. Garantir la mise en œuvre des mesures destinées à faire cesser le crime ou le délit.

Nous ne pouvons que craindre que ce refus se fasse sur la base d’une appréciation hâtive du dossier. Et il est certain qu’en présence du moindre doute, l’officier de police judiciaire va préférer refuser l’exercice de ce droit.
C’est en pareil cas que l’avocat doit intervenir en formulant des observations au procureur de la République.

Nul doute que l’exercice de ce nouveau droit va donner lieu à une jurisprudence abondante.

Sabrina GABTENI, Avocat www.gabteni-avocat.com
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