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L’indemnisation de la victime en matière de CRPC. Par Matthieu Hy, Avocat.
Parution : jeudi 2 février 2017
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Contrairement aux craintes exprimées lors de l’introduction en droit français de ce type de « plaider-coupable », la procédure de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) garantit à la victime la sauvegarde de ses droits.

1 – L’information préalable de la victime

Lorsque le procureur de la République décide de mettre en œuvre une procédure de CRPC, l’article 495-13, alinéa 1er, du Code de procédure pénale exige que la victime en soit informée sans délai et par tout moyen.

En pratique, elle recevra un avis à victime l’invitant à comparaître à l’audience devant le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué à l’homologation. Les enquêteurs peuvent aussi procéder à l’information de la victime, particulièrement dans le cas où la procédure de CRPC est mise en œuvre au moment du défèrement de l’auteur des faits.

Dès que la victime est informée de la date de l’audience, elle doit réunir les éléments qui permettront de déterminer le montant du préjudice à réclamer (facture d’achat de l’objet volé, facture de réparation du bien dégradé,…).

2 – La phase de proposition devant le Procureur de la République

La procédure de CRPC se déroule en deux phases : la phase de proposition devant le Procureur de la République et la phase d’homologation.

La première consiste pour l’auteur des faits à se voir proposer une ou des peines par le procureur de la République. En cas d’acceptation, une requête en homologation est formalisée par le représentant du ministère public.

Dans l’hypothèse où l’auteur des faits refuse la ou les peines proposées par le procureur de la République, ce dernier doit, sauf élément nouveau, saisir le tribunal correctionnel ou requérir l’ouverture d’une information judiciaire.

La victime n’est pas convoquée à la phase de proposition devant le procureur de la République. Si cette phase échoue, elle sera informée de la date de jugement devant le tribunal correctionnel ou de l’ouverture d’une information judiciaire afin de faire valoir ses droits.

3 – La phase d’homologation

Lorsque l’auteur des faits a accepté la ou les peines proposées, l’accord entre celui-ci et le procureur de la République doit encore être homologué par un juge du fond, président du tribunal de grande instance ou juge délégué par lui.

La date, le lieu et l’heure de l’audience portés à la connaissance de la victime ont trait à l’audience d’homologation.

La victime ou son avocat pourra alors faire valoir ses prétentions indemnitaires.

L’article 495-13, alinéa 1er, du Code de procédure pénale offre la victime deux options.

D’une part, elle peut, le cas échéant accompagnée de son avocat ou représentée par celui-ci, comparaître en personne à l’audience d’homologation pour solliciter la restitution d’un objet ou des dommages et intérêts.

D’autre part, l’article 420-1 du Code de procédure pénale lui permet de formuler ses demandes, en joignant les pièces justificatives, par lettre recommandée avec avis de réception, à condition que la demande de dommages et intérêts n’excède pas 10.000 euros. Pour être recevable, cette constitution de partie civile doit parvenir au tribunal 24 heures au moins avant la date de l’audience.

Si l’existence de la phase d’homologation est subordonnée à l’acceptation préalable, par l’auteur des faits, de la peine proposée par la procureur de la République, les droits de la victime résultent de la culpabilité du prévenu qui n’a pas à donner son accord sur le montant des dommages et intérêts sollicités. A l’inverse, la victime n’a pas à se prononcer sur la ou les peines acceptées par l’auteur des faits.

4 – La décision du juge de l’homologation

Si le président du tribunal de grande instance ou le juge délégué à l’homologation décide d’homologuer la peine proposée par le procureur et acceptée par l’auteur des faits, il rendra une ordonnance se prononçant également sur les intérêts civils.

Le juge de l’homologation a la faculté d’assortir sa décision de l’exécution provisoire, permettant à la victime de recouvrer les dommages et intérêts malgré un appel du prévenu. Il peut également ordonner une expertise de la victime et lui allouer une provision tout en renvoyant au tribunal correctionnel pour la détermination définitive des dommages et intérêts accordés à la victime.

Conformément à l’article 498 du Code de procédure pénale, la victime qui ne serait pas satisfaite de la décision relative aux intérêts civils dispose de 10 jours pour interjeter appel. Ce droit d’appel est aussi ouvert au condamné.

Si le juge de l’homologation refuse de procéder à l’homologation de la peine proposée par le ministère public et acceptée par l’auteur des faits, il ne peut se prononcer sur les dommages et intérêts sollicités par la victime. Il sera alors procédé comme en cas d’échec de la phase de proposition (saisine du tribunal correctionnel ou ouverture d’une information judiciaire).

5 – Lorsque la victime n’a pas participé à la CRPC

Si la victime n’a pu participer à la CRPC, le second alinéa de l’article 495-13 du Code de procédure pénale lui offre la possibilité de demander au procureur de la République de citer le condamné à une audience du tribunal correctionnel afin qu’il soit statué uniquement sur les intérêts civils.

Dans ce cas, la victime sera informée de la date de l’audience, se tenant à juge uniquement conformément à l’article 464 du Code de procédure pénale. Elle pourra alors solliciter la réparation de son préjudice.

Matthieu Hy Avocat au Barreau de Paris www.matthieuhy.com [mail->contact@matthieuhy.com]