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Accident du travail et formalisme. Par Patrice Duponchelle, Avocat.
Parution : mercredi 1er mars 2017
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L’accident du travail pour l’employeur comme pour le salarié victime impose des procédures spécifiques rigoureuses dont le non respect peut être lourd de conséquences.

C’est quoi un accident du travail ? Comme aurait dit M De Lapalisse, un accident qui survient au cours du travail.

Le salarié doit donc démontrer que le fait accidentel est survenu dans le cadre de son activité professionnelle (à distinguer de l’accident de trajet) et qu’il en est résulté une lésion, il en résulte une présomption d’imputabilité c’est-à-dire que l’accident est présumé dans ce cas être un accident du travail.

Il en informe son employeur ou son préposé au plus tard dans les 24 heures sauf cas de force majeure, d’impossibilité absolue ou de motif légitime. Le salarié doit par ailleurs faire constater par le médecin de son choix les lésions en utilisant la feuille d’accident du travail formulaire fourni par les caisses de sécurité sociale et remis par l’employeur au salarié.

L’employeur doit quant à lui adresser à la caisse dans les 48 h à compter du jour où il en a été informé une déclaration sur formulaire spécial avec une attestation de salaire en cas d’arrêt de travail. L’employeur peut éventuellement faire part de ses réserves quant à la qualification en accident de travail.

En cas de carence de l’employeur le salarié victime ou son représentant peut le faire dans un délai de deux ans.

La caisse dès qu’elle a connaissance de l’accident informe l’inspecteur du travail et vérifie la matérialité de l’accident et le maintien de la présomption d’imputabilité. La caisse peut mener une enquête en demandant aux éventuels témoins d’attester, ou adresser un questionnaire à l’employeur et à la victime. En cas de décès de la victime de l’accident l’enquête est obligatoire.

10 jours francs avant de prendre sa décision la Caisse doit informer l’employeur. La victime et ses ayants droits des éléments recueillis susceptibles de leur faire grief et de la possibilité de consulter le dossier.

La caisse doit prendre sa décision dans les 30 jours de la déclaration d’accident du travail si une enquête complémentaire s’avérait nécessaire l’employeur. La victime et ses ayants droits en sont informés par lettre recommandée avec accusé de réception et la décision interviendra dans les deux mois de cette notification.

La décision est ensuite notifiée à l’employeur, à la victime si elle fait grief par LRAR si elle ne fait pas grief par lettre simple. Le médecin traitant du salarié victime est averti de la décision de la caisse.

En cas d’absence de décision dans le délai (30 jours plus éventuellement 2 mois ) l’accident est reconnu implicitement accident du travail.

L’employeur peut avoir intérêt à contester le caractère professionnel de l’accident car cela influe sur le taux de cotisation accident du travail surtout pour les entreprises de plus de 150 salariés.

L’employeur a tout intérêt à déposer des réserves lors de la déclaration d’accident mais même en l’absence de réserves il peut contester en saisissant la commission de recours amiable dans le délai de deux mois de la notification puis ensuite le Tribunal des Affaires de Sécurité sociale dans le même délai puis éventuellement la chambre sociale de la cour d’appel.

La reconnaissance de la prise en charge par la caisse est définitive pour le salarié même si l’employeur forme un recours.
Le salarié reconnu en accident du travail peut engager dans un délai de deux ans une action contre son employeur en reconnaissance de la faute inexcusable ce qui entraîne une majoration de la rente versée par la caisse au salarié ainsi que l’indemnisation par l’employeur des chefs de préjudice non pris en charge par la caisse. La caisse pourra recouvrer les sommes versées contre l’employeur en conséquence l’employeur condamné pour faute inexcusable ne peut plus contester le caractère professionnel de l’accident car il y a sur ce point précis autorité de la chose jugée.

Le salarié licencié car son reclassement est impossible pour inaptitude due à un accident du travail doit percevoir une indemnité de licenciement doublée.

D’autre part si la faute inexcusable est retenue le salarié pourra contester son licenciement qui s’il est jugé abusif lui vaudra une indemnité de 12 mois de salaire.

Il faut toutefois noter que depuis un arrêt du 6 octobre 2015 la chambre sociale de la Cour de cassation revenant sur une jurisprudence établie depuis 2006 considère que la réparation des conséquences de l’accident du travail, y compris en cas de licenciement pour inaptitude physique, relève de la compétence exclusive des juridictions de sécurité sociale.
L’indemnisation de la perte de l’emploi et des droits à la retraite consécutive à l’accident du travail dû à la faute inexcusable de l’employeur ne peut plus être demandée devant le juge prud’homal la Cour de cassation considérant que ces préjudices sont indemnisés par la sécurité sociale et notamment par la majoration de la rente.

Patrice DUPONCHELLE avocat spécialiste en droit social avocat.vmd@wanadoo.fr avocats.fr/space/patrice.duponchelle