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De l’importance d’inscrire la modification d’une dénomination sociale auprès des Registres de marque. Par Nathalie Dreyfus, CPI.
Parution : lundi 20 mars 2017
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Une ordonnance de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) en date du 8 septembre 2016 met l’accent sur l’intérêt pour les entreprises titulaires de marques d’inscrire tous les changements les concernant auprès des Registres de marque.

Une ordonnance de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) en date du 8 septembre 2016 met l’accent sur l’intérêt pour les entreprises titulaires de marques d’inscrire tous les changements les concernant auprès des Registres de marque.

Le changement de dénomination sociale nécessite l’accomplissement de diverses formalités, comme la modification des statuts ou encore une publicité dans un Journal d’annonces légales. Dès lors que l’entreprise est titulaire d’une marque, il faudra ajouter à ces formalités une inscription de la modification auprès du registre des marques.

Ce conseil résulte d’une ordonnance de la CJUE en date du 8 septembre 2016. A cette occasion, une société s’est vue rejeter son opposition à un dépôt de marque au motif que son changement de dénomination sociale ne lui permettait pas d’opposer ses marques déposées aux tiers dans la mesure où il n’avait pas été inscrit au Registre des marques. Cette position de la CJUE prend le contre-pied du cadre juridique français existant en matière de marques.

La réglementation française actuelle

Conformément à l’article L714-7 du Code de la propriété intellectuelle, seules certaines modifications contraignent le titulaire d’une marque à procéder à une inscription auprès de l’INPI.

Cet article est à l’origine de la distinction faite en pratique entre les inscriptions « incontournables », visant les cas de changement visant la propriété de la marque (cession, fusion…), et les inscriptions « facultatives » affectant le titulaire de la marque (nouvelle forme juridique, nouveau siège social, nouvelle dénomination sociale).

Cette distinction importante permettait aux entreprises de prioriser les formalités à effectuer. Dès lors qu’une entreprise était confrontée à un cas d’inscription « incontournable », l’inscription de la modification auprès de l’INPI est fortement recommandée. A défaut, la titularité des droits n’était pas opposable aux tiers. A l’inverse, en cas d’inscription « facultatives », l’absence d’inscription auprès du registre des marques de l’INPI était en principe sans conséquence pour les droits existants.

Cette stratégie est néanmoins remises en question par la récente décision de la CJUE qui semble exiger une adéquation entre les informations relatives à la société au registre du commerce et celles relatives aux marques dans les différents Offices de marque.

Une stratégie ébranlée par la CJUE

Si la CJUE a récemment amoindri ses exigences concernant l’inscription au registre des marques de licences de marque ou de dessins et modèles, tel n’est pas le cas s’agissant de l’inscription des modifications concernant le titulaire d’une marque.

Le 8 septembre 2016, la CJUE a en effet rejeté l’opposition de la société Real Express SRL au dépôt d’une marque de l’Union Européenne par MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co KG. La Cour confirme alors la position adoptée par les précédentes institutions européennes saisies, à savoir l’EUIPO et le Tribunal de l’Union Européenne, et considère que la requérante ne justifie pas être titulaire de droits sur les enregistrements de marques roumaines à la base de l’opposition.

Ce débat intervient suite à un changement de dénomination sociale, la société Real Express SRL se dénommant SC Unibrand SRL au moment du dépôt. La demande d’inscription auprès de l’Office roumain (OSIM) n’est intervenue que quelques jours avant l’opposition. Les différentes instances européennes vont juger cette demande d’inscription tardive insuffisante et considérer que la société Real Express SRL n’établit pas l’existence de droits des marques antérieures à l’origine de l’opposition.

La production tardive et après le dépôt de l’opposition d’un simple fax envoyé par l’OSIM attestant de la demande d’inscription du changement de la dénomination et confirmant la titularité des marques depuis juin 2011 sera jugée insuffisante. La CJUE impose donc que la situation du demandeur soit régulière au jour de la demande, sous peine de voir son opposition rejetée.

Cette solution devrait naturellement s’appliquer aussi bien aux changement de dénomination sociale, mais également aux modifications de siège social ou de forme juridique.

Enjeux et incertitudes

Les conséquences de cette décision sont importantes pour les titulaires de marques. Dès lors que les informations sur le titulaire d’une marque ne sont pas à jour, la défense d’un droit de marque devient à risque.

Bien évidemment une simple demande d’inscription au registre des marques est insuffisante, l’enregistrement de l’inscription doit être effective. Or en fonction des pays, cet enregistrement peut prendre du temps. Il existe certes des procédures accélérées.

Cette décision incite à anticiper et sécuriser les droits de marques en procédant aux inscriptions de toutes les modifications pouvant affecter une marque.

Nathalie Dreyfus _ Conseil en Propriété Industrielle _https://www.dreyfus.fr/