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La réforme du divorce par consentement mutuel : un divorce sans juge. Par Agathe Mouillac-Delage, Avocat.
Parution : mardi 4 avril 2017
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Le divorce par consentement mutuel sans juge est entré en vigueur le 1er janvier 2017, en application des dispositions de la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, publiée au Journal officiel le 19 novembre 2016.

Les procédures en cours à cette date (hypothèse ou la requête en divorce a été déposée avant le 1er janvier 2017) se verront appliquer l’ancien régime et seront donc soumises au contrôle du juge.

- Un divorce contractuel

Le nouveau divorce par consentement mutuel devient contractuel.

Il s’agit d’une procédure non soumise au contrôle du juge, c’est-à-dire une procédure non juridictionnelle (article 229 du Code civil).

- Champ d’application

Ce type de divorce est applicable aux époux qui s’accordent sur le principe et les conséquences de la rupture.

Il est néanmoins exclu dans deux cas (article 229-2 du Code civil) :
- L’un des enfants mineurs du couple demande à être entendu par le juge : le divorce par consentement reste alors possible, mais selon la procédure judiciaire actuellement en vigueur (c’est à dire sous le contrôle du juge).
- L’un des époux fait l’objet d’une mesure de protection : en telle hypothèse, le divorce par consentement mutuel, même judiciaire, est exclu (Ce qui était déjà le cas dans le cadre de l’ancienne procédure de divorce par consentement mutuel : article 249-4 du Code civil).

Il en résulte que le divorce par consentement mutuel par voie judiciaire n’est possible qu’en présence d’un enfant mineur qui demande à être entendu (Article 230 du Code civil).

En effet, les règles des passerelles entre divorces contentieux et consentement mutuel permettent en cours de procédure, d’opter pour un consentement mutuel qui sera contractuel ou judiciaire en application des principes énoncés ci-dessus (article 247 du Code civil)

- Le rôle renforcé des avocats

En l’absence de juge, le rôle des avocats est nécessairement renforcé, dans le cadre de cette nouvelle procédure.

Il ne sera d’ailleurs plus possible pour les deux époux d’avoir le même avocat. Chacun devra avoir son propre conseil (article 229-1 du Code civil).
Le devoir de conseil des avocats sera par conséquent nécessairement accru, notamment en présence d’un patrimoine immobilier.

- Formalisme

Tout d’abord, les avocats établiront ensemble une convention de divorce : il s’agit d’un acte sous signature privée contresigné par avocats (article 229-1 du Code civil).

La convention devra comporter les mentions obligatoires suivantes :
- l’état civil complet des époux et celui de leurs enfants ;
- l’identité des avocats ainsi que la structure dans laquelle ceux-ci exercent ;
- la mention de l’accord des époux sur la rupture du mariage et sur ses effets tels que définis dans leur convention ;
- les modalités du règlement complet des effets du divorce, notamment s’il y a lieu au versement d’une prestation compensatoire ;
- l’état liquidatif du régime matrimonial, le cas échéant en la forme authentique devant notaire lorsque la liquidation porte sur des biens soumis à publicité foncière, ou la déclaration qu’il n’y a pas lieu à liquidation.

(Article 229-3 du Code civil)

La convention de divorce devra également préciser que les enfants mineurs ont été informés par leurs parents de leur droit à être entendus par le juge et qu’ils ne souhaitent pas faire usage de cette faculté (article 229-3 du Code civil).

L’absence d’une des mentions obligatoires entraine la nullité de la convention.

- Délai de réflexion

En premier lieu, les époux bénéficie d’un délai de 15 jours leur permettant de confirmer leur consentement, quant au contenu de la convention de divorce.

Pour faire courir ce délai de réflexion, chaque avocat adresse à son client le projet de convention, par lettre recommandée avec accusé de réception.

Les époux ne peuvent pas signer la convention au cours de ce délai de réflexion. A défaut, la convention est nulle. Divorce consentement mutuel.

- Le rôle du notaire

La convention est déposée au rang des minutes d’un notaire ce qui lui confère date certaine et force exécutoire (Article 229-1 du Code civil).

Du reste le coût de cet enregistrement serait fixé à 50 €.

Le notaire contrôle que toutes les mentions prescrites à peine de nullité y figurent et que le délai de réflexion a bien été respecté.

Il n’est donc tenu que d’un contrôle formel, se limitant à un rôle d’enregistrement.

Sans autre précision, on peut en déduire qu’il n’a pas la faculté de refuser son concours pour des motifs d’ordre public ou des motifs tirés d’illégalités autres que formelles.

Les avocats seraient donc seuls tenus responsable dans le cadre de leur devoir de conseil.

- Les effets du divorce par consentement mutuel contractuel

S’agissant des époux :

La dissolution du mariage prend effet à la date à laquelle la convention acquiert force exécutoire, c’est-à-dire à la date à laquelle elle a été déposée au rang des minutes du notaire.

S’agissant des biens :

La dissolution du mariage prend effet à la date à laquelle la convention acquiert force exécutoire, c’est-à-dire à la date à laquelle elle a été déposée au rang des minutes du notaire, à moins que la Convention n’en stipule autrement (Article 262-1 du Code civil).

S’agissant des tiers :

Ainsi, la convention est opposable aux tiers, en ce qui concerne les biens des époux, à compter de l’accomplissement de transcription du divorce sur les actes d’état civil (Article 262 du Code civil).

Maître Agathe Mouillac-Delage