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Acte de cruauté sur animaux : intervention d’Eric Alligné, Avocat.
Parution : samedi 10 juin 2017
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Chevelu, un chat errant de Draguignan, a été torturé et tué dans la nuit de mardi à mercredi par un groupe de personnes. Me Eric Alligné, avocat spécialisé dans les droits des animaux, explique à RMC les peines que pourraient encourir les tortionnaires.

« Les actes de cruauté sont très très nombreux en France. Il y a souvent des actes très horribles, vis-à-vis de toutes sortes d’animaux, dans les foyers et les maisons françaises. Est-ce que les coupables sont tous poursuivis par la police ? Bien sûr que non. Est-ce que les actes sont tous rapportés à la police ? Bien sûr que non.

Mais quand ce genre d’affaires arrive devant les tribunaux, il y a des condamnations. Est-ce qu’elles sont suffisamment fermes, suffisamment dissuasives ? Je dirais malheureusement que non. Il y a des progrès, ça va beaucoup mieux, il y a une prise de conscience générale. La société française évolue, mais la justice évolue un petit peu plus lentement.

Dans le cas du chat torturé à Draguignan (Var), on est dans de la cruauté, de la torture volontaire, punie par l’article 521-1 du Code pénal. Ce n’est pas de la maltraitance, qui est elle codifiée par le Code rural. Les peines maximales prévues par le Code pénal dans ce cas sont deux ans de prison ferme et 30.000 euros d’amende. Ça fait écho à une affaire qui s’était passé à Marseille il y a trois ans, où un acte volontaire avait beaucoup choqué l’opinion publique. Les tribunaux avaient donné un an de prison ferme au prévenu. Souvent, les emprisonnements fermes ne sont pas prononcés au maximum donné par la loi.

Les témoins, s’il y en a, ne peuvent pas être poursuivis pour "non-assistance à personne en danger", mais cela peut relever de la "non-dénonciation de crimes".

Dans des cas comme à Draguignan, la police fait son enquête, on arrête les prévenus, puis l’affaire est transférée au parquet, qui décide ou non de poursuivre les prévenus. Il peut très bien ne pas poursuivre, mais je ne pense pas que ce sera le cas dans cette affaire.

Une fois que la personne est en correctionnelle, devant le tribunal, elle va être jugée et c’est là que la peine est décidée : un an, deux ans de prison ferme, six mois avec sursis, une amende, pas d’amende... Le juge a toute la latitude qu’il veut.

Ici, on a un acte fort de cruauté, avec des choses assez horribles, donc je ne pense pas que les circonstances atténuantes qu’on amène habituellement pourraient jouer. Il semblerait en plus qu’il y ait des psychotropes qui traînent dans ce dossier, ce qui pourrait plutôt aggraver les peines.

En 2015, on est passé d’un statut de "chose", de "meuble" à un statut d’être sensible et "irremplaçable". On va prendre en compte le fait que c’est un être unique. Par contre, avec le Code pénal et le Code rural, cela fait des années et des années qu’on pouvait et qu’on peut toujours poursuivre les contrevenants avec les mêmes peines.

Les peines sont suffisantes. Au fond, deux ans de prison ferme est une peine très dissuasive. Il n’y a pas besoin de les remonter. Par contre, il faudrait qu’elles soient appliquées régulièrement. »

Propos recueillis par Liv Audigane

Eric Alligné Avocat au Barreau de Paris