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Pacte d’actionnaires et libre révocabilité des administrateurs de sociétés anonymes. Par Alexandre Peron, Legal Counsel.
Parution : jeudi 15 juin 2017
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Par un arrêt en date du 26 avril 2017, la chambre commerciale de la Cour de cassation est venue réaffirmer sa position sur le principe de libre révocabilité des administrateurs dans les sociétés anonymes.

En effet, ce principe fondamental du droit des sociétés constitue également une jurisprudence constante de la Cour de cassation.

Dans cette affaire, il s’agissait d’une fusion de deux sociétés avec conclusion d’un pacte d’actionnaires par les actionnaires majoritaires de chacune des deux sociétés. Ce pacte prévoyait notamment que le Conseil d’administration de la société anonyme issue de la fusion serait composé entre autres de chacun des deux actionnaires majoritaires (personnes physiques) des sociétés fusionnées dont l’un serait nommé Président et l’autre Directeur Général.

Quelques temps plus tard l’administrateur occupant le poste de Directeur Général était révoqué de son mandat d’administrateur, ce qui lui fit perdre automatiquement par application des statuts, son mandat de Directeur général.

Considérant que l’autre actionnaire majoritaire s’étant vu confié le mandat de Président, n’avait pas respecté les clauses du pacte d’actionnaires, il décida de l’assigner en justice afin d’obtenir réparation de son préjudice.

Dès lors, une question s’est posée. La liberté contractuelle régissant la conclusion d’un pacte d’actionnaires peut-elle permettre aux signataires dudit pacte d’aller à l’encontre du principe de libre révocabilité des administrateurs des sociétés anonymes ?

Non a répondu la chambre commerciale, en jugeant illicite toute stipulation ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la libre révocabilité de l’administrateur d’une société anonyme, ce qui était le cas en l’espèce.

Effectivement, comme cela est également le cas dans de nombreuses situations, les statuts prévoyaient une lourde indemnité à verser aux dirigeants s’il était mis fin à leur mandat avant terme. Ceci ayant pour effet premier de dissuader car le montant de l’indemnité était particulièrement élevé. Ainsi en incluant dans le pacte d’actionnaires que la nomination en qualité d’administrateur de l’un des deux actionnaires majoritaires entrainait également sa nomination au poste de Directeur Général, cela venait rendre difficile la révocation de ce dernier en sa qualité d’administrateur, car cela entrainait automatiquement la révocation de son mandat de dirigeant et donc le paiement de l’indemnité très élevée.

Cette jurisprudence constante respecte les dispositions de l’article L. 225-18 alinéa 2 qui sont non supplétives de volonté. Dès lors, le respect de l’ordre public impose de ne pas porter atteinte à la libre révocabilité d’un administrateur dans une société anonyme uniquement. En effet, ce principe ne trouve pas à s’appliquer au sein des sociétés en commandite par actions et au sein des sociétés par actions simplifiées.

Alexandre Peron Legal Counsel