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Le juge des référés et la motocycliste éjectée de sa moto. Par Daphné Tapinos, Avocate.
Parution : jeudi 29 juin 2017
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Quels sont les pouvoirs du juge des référés appelé à statuer sur la demande de provision d’une motocycliste éjectée de sa moto ? En répondant à cette question l’arrêt du 18 mai 2017 est l’occasion de rappeler le contrôle qu’exerce la Cour de cassation sur la notion de contestation sérieuse au sens de l’article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile ainsi que le rôle toujours
central du critère de l’unité ou de la pluralité d’accident dans l’appréciation de la notion de conducteur au sens de la loi du 5 juillet 1985.

Cass. 2e civ., 18 mai 2017, n°16-18490

En dépit des objectifs affichés de la loi du 5 juillet 1985 d’améliorer et d’accélérer l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation, le parcours de ces victimes demeure souvent long et douloureux avant d’aboutir à la réparation effective et définitive de leurs préjudices [1].
Ceci est encore plus vrai lorsque le droit à indemnisation des victimes est susceptible d’être contesté. Tel est notamment le cas des conducteurs victimes, ces « victimes sacrifiées », dont on sait que le droit à réparation peut être réduit voir exclu, en raison d’une faute de leur part (article 4 de la loi du 1985).
La saisine du juge des référés peut alors, pour la victime conductrice, s’avérer utile pour faire rapidement trancher cette question [2] et obtenir une provision dans l’attente de la liquidation de ses préjudices.
L’arrêt de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, du 18 mai 2017, en offre un nouvel exemple.

En l’espèce, une femme, qui avait perdu le contrôle de la moto qu’elle pilotait et chuté sur la chaussée où elle avait été heurtée par celle d’une autre motocycliste, avait agi en référé afin d’obtenir une provision, sur le fondement de l’article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile. Le jugement allouant une provision de dix mille euros à la victime conductrice avait été confirmé par la Cour d’appel au motif que, compte tenu des circonstances, le second choc n’avait pu être concomitant au premier de sorte que, sans excéder ses pouvoirs, le juge des référés avait pu retenir que la victime « éjectée de sa moto et immobilisée au sol, avait perdu la qualité de conductrice lorsqu’elle avait été heurtée par la moto pilotée » par l’autre conductrice.
Son droit à indemnisation n’était donc pas contestable. Le pourvoi faisait notamment valoir qu’il existait une contestation sérieuse au motif que « le conducteur qui, dans un même trait de temps, est éjecté de son véhicule, puis percuté par un autre véhicule ne perd pas la qualité de conducteur au sens de la loi du 5 juillet 1985 ». Pour ce dernier, donc, l’accident n’avait pas eu lieu en deux temps mais constituait un événement « unique et indivisible ».

Ainsi deux questions se posaient devant la Cour de cassation.

D’une part, celle de savoir si la haute juridiction judicaire exerçait un contrôle sur le caractère non sérieusement contestable de l’obligation du créancier indemnitaire d’un accident de la circulation (I) et d’autre part, en cas de réponse positive, celle des modalités d’appréciation par le juge des référés de la qualité de conducteur victime au sens de la loi du 5 juillet 1985 (II).

Aux termes de son arrêt du 18 mai 2017, la deuxième chambre civile a répondu par l’affirmative à la première question retenant, pour répondre à la seconde question, que les juges d’appel avaient pu « sans se contredire » décider « qu’il ne s’agissait pas d’un accident unique et que [la victime] avait perdu la qualité de conducteur lorsqu’elle avait été heurtée par la moto conduite par [l’autre conductrice] ».

I – Le contrôle par la Cour de cassation du caractère non sérieusement contestable de l’obligation du créancier indemnitaire d’un accident de la circulation.

L’arrêt de la deuxième chambre civile du 18 mai 2017 rappelle que la Cour de cassation contrôle le caractère non sérieusement contestable (A) de l’obligation du créancier indemnitaire d’un accident de la circulation (B).

A – Le contrôle par la Cour de cassation de la notion de contestation sérieuse.

Il résulte des dispositions de l’article 809 alinéa 2 du Code de procédure civile que « dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable le [Président du Tribunal de grande instance] peut accorder une provision au créancier (…) ». La notion de contestation sérieuse, substituée en 1971 à l’interdiction faite au juge des référés de préjudicier au principal, n’a pas été définie par le législateur [3].
Toutefois, pour la doctrine, elle « doit s’apprécier selon le caractère manifeste, l’évidence des droits revendiqués par chacune des parties » [4].
A cet égard, il a été souligné que « comme le juge du fond, le juge des référés opère un constat, opération d’intelligence par laquelle il détermine laquelle des deux prétentions qui lui sont soumises, est conforme au droit. La différence, quant à ce constat, c’est l’évidence que doit présenter la conformité au droit de la prétention du demandeur » [5]. Depuis un arrêt de l’assemblée plénière du 16 novembre 2001, la Cour de cassation exerce son contrôle sur l’existence d’une obligation non sérieusement contestable [6].
Plusieurs raisons justifient ce contrôle, en particulier le caractère de « véritable préjugement » et « l’efficacité substantielle » de l’ordonnance de référé allouant une provision [7].

Tandis que le juge des référés ne saurait interpréter un contrat, relevant de l’intention des parties, sans trancher une contestation sérieuse, il ne se prive pas d’interpréter la loi, générale et impersonnelle, qu’il est chargé d’appliquer. Il est ainsi conduit à « apprécier la clarté d’une loi, c’est-à-dire procéder à l’analyse de son texte, ainsi que la quantité et la qualité de la jurisprudence qui l’accompagne, afin de savoir si l’interprétation en a déjà ou non été donnée et paraît s’imposer (…). Le juge des référés doit, comme pour toute contestation sérieuse, apprécier les thèses en présence avant de décliner ses pouvoirs » [8].

Le présent arrêt rappelle que la loi du 5 juillet 1985 n’échappe pas à cette logique, le juge des référés étant, en effet, fréquemment amené à en interpréter les dispositions lorsqu’il est saisi de la question de savoir si l’octroi d’une provision à une victime d’un accident de la circulation n’est pas sérieusement contestable.

B – L’interprétation, par le juge des référés, des conditions de mise en œuvre de la loi du 5 juillet 1985.

Comme il a pu être justement souligné, « la loi du 5 juillet 1985, pourtant destinée à réduire l’importance du contentieux, l’a moins diminué que déplacé » [9]. Nombreuses sont, en effet, les notions qui, faute d’être définies par le législateur ont donné lieu à des discussions byzantines tant doctrinales que jurisprudentielles. Chargé de se prononcer sur le caractère non sérieusement contestable d’une créance indemnitaire d’une victime d’un accident la circulation, le juge des référés se trouve ainsi souvent appelé à puiser dans le fonds jurisprudentiel acquis afférent à l’interprétation des notions d’implication, de conducteur, de piéton, de faute inexcusable, etc… En ce sens, si le débat entre les parties peut porter sur des éléments de droit, la contestation sérieuse ne saurait être de « pur droit », le juge étant tenu d’interpréter la loi [10] et de restituer aux faits leur exacte qualification [11]. On perçoit néanmoins ici toute la difficulté pour le juge des référés, et le subtil équilibre qu’il doit trouver pour statuer, conformément à l’exigence de l’article 4 du Code civil, sans résoudre le fond du litige mais tout en se prononçant sur l’évidence des droits des parties, ce qui suppose nécessairement un certain examen du fond du droit [12].

Ainsi, la Cour de cassation a eu l’occasion de juger qu’une cour d’appel avait pu déduire l’existence d’une implication entre deux véhicules compte tenu de la clarté et du caractère manifeste de la collision [13] ou, au contraire, de décider que des juges du fond avaient tranché une contestation sérieuse en retenant l’existence d’une implication alors qu’il existait une incertitude sur la position réelle d’un des deux véhicules intervenu dans l’accident [14]. De même, a tranché une contestation sérieuse la cour d’appel ayant retenu la qualité de piéton de la victime alors que les circonstances de faits rendaient contestable cette qualification [15]. En revanche, la Cour de cassation a relevé le défaut de toute contestation sérieuse quant à l’absence de faute du conducteur retenu par les juges du fond sur la base du rapport de l’expert chargé d’établir les circonstances de l’accident [16] ou encore sur celle des constatations de police et des témoignages recueillis [17].

Enfin, les juges du fond n’ont pas tranché une contestation sérieuse dès lors qu’il résultait manifestement des circonstances de l’accident que la faute de la victime ne présentait pas le caractère d’une faute inexcusable [18].
Dans le présent arrêt c’est la question de savoir si la victime éjectée de sa moto avait perdu la qualité de conducteur qui faisait l’objet d’une contestation par le pourvoi. Pour relever du juge des référés, il convenait que ce problème juridique puisse être tranché par ce dernier de manière évidente eu égard aux éléments de faits dans le débat. C’est ce qu’à jugé la Cour de cassation estimant que « par motifs propres et adoptés » la cour d’appel avait pu décider que l’obligation d’indemnisation de l’assureur n’était pas sérieusement contestable. Mais pour motiver sa décision encore fallait-il que la cour d’appel apprécie la qualité de conducteur victime au sens de la loi du 5 juillet 1985 [19].

II – L’appréciation par le juge des référés de la qualité de conducteur victime au sens de la loi du 5 juillet 1985.

Selon de la loi du 5 juillet 1985, la détermination de la qualité de conducteur de la victime permet à la fois de définir le débiteur de la dette de réparation (article 2 de la loi) et de fixer l’étendue de son droit à réparation (article 4 de la loi). Par hypothèse, la saisine du juge des référés implique qu’il existe un débat entre les parties sur l’existence d’une obligation de l’une d’entre elles [20]. Tel était le cas en l’espèce quant à la qualité de conducteur de la victime (A) mais l’existence même d’une telle contestation pourrait bien se trouver grandement limitée dans un avenir proche si la situation des victimes conductrices venait s’aligner sur celle des autres victimes (B).

A – L’examen des thèses en présence.

Aux termes de l’arrêt commenté la conductrice et son assureur, condamnés par les juges du fond à verser une provision à la motocycliste blessée [21] faisaient valoir tout d’abord que la chute de la victime sur la chaussée puis son heurt par l’autre moto constituait « un accident unique et indivisible » au cours duquel la victime avait conservé la qualité de conducteur. Selon eux, la conductrice blessée avait ainsi « dans un même trait de temps » été éjectée puis percutée. Le pourvoi estimait ensuite que les juges du fond s’étaient contredit en relevant d’une part, que la victime « s’est trop écartée sur l’extérieur à l’approche d’un virage, est sortie de la route, a heurté avec sa roue un parapet puis a rebondi et a été projetée au milieu de la voie, ses jambes se trouvant sur la bande centrale » et que « malgré des manœuvres d’évitement [l’autre conductrice auteur du pourvoi] qui la suivait en moto lui a roulé sur les jambes » et, d’autre part, que « le second choc n’a (…) pu être concomitant au premier ». C’était soutenir que la chute de la victime, toujours aux commandes de sa moto, et le choc avec l’autre motocycliste s’inscrivait dans le prolongement de l’énergie cinétique du véhicule de la blessée, constitutif d’un seul même événement.

De son côté, la cour d’appel, épousant la thèse de la victime, avait au contraire retenu « qu’il ne s’agissait pas d’un accident unique et que [la victime] avait perdu la qualité de conducteur lorsqu’elle avait été heurtée par la moto conduite par [l’autre conductrice], de sorte que l’obligation pour cette dernière et son assureur de l’indemniser de son préjudice n’était pas sérieusement contestable ». En rejetant le pourvoi la Cour de cassation estime donc que les circonstances de l’accident établissaient avec évidence l’existence de deux accidents confirmant ainsi la place du critère de l’unité ou de la pluralité d’accident, reposant lui même sur un critère temporel, pour déterminer la qualité de conducteur.
En principe, en effet, la notion de conducteur peut être définie comme la personne qui, au moment de l’accident, disposait de la maîtrise du véhicule avec lequel elle est en contact [22]. Il s’agit de celui « qui était aux commandes du véhicule au moment où l’accident a commencé à se produire », peu important que le véhicule soit en marche ou à l’arrêt [23]. Mais le cas du conducteur éjecté, en particulier du motocycliste, postule, selon la jurisprudence, d’analyser le déroulé de l’accident pour déterminer si l’on est en présence d’un seul et unique accident (avec la survenance d’un choc et une chute concomitante faisant partie du même processus) ou de deux accidents successifs (choc puis chute). Dans le premier cas le conducteur conserve cette qualité [24]. Dans le second, il perd cette qualité et bénéficie alors du régime protecteur des victimes non conductrices [25]. Plusieurs auteurs n’ont pas manqué de critiquer la pertinence de ce critère dans la mesure où le conducteur éjecté, alors même qu’il poursuivrait sa course sur le sol mu par la même énergie, n’a plus, par définition, la maîtrise de son véhicule [26]. Quand d’autres ont alors proposé un critère matériel plus équitable à savoir la distinction entre le conducteur ou motocycliste qui se trouve dans ou sur sa machine, qui conserve cette qualité, et celui qui se trouve à terre qui doit toujours être considéré comme un non conducteur [27]. Mais la plus vive des critiques consiste à souligner que le critère temporel [28], etenu en l’espèce, consiste à appliquer au conducteur éjecté le critère des accidents complexes [29], notion initialement conçue, en cas de collision multiples, pour favoriser la preuve de l’implication en permettant à la victime d’imputer le dommage à l’accident afin de pouvoir se tourner vers n’importe lequel des débiteurs d’indemnité. Or, lorsque la notion d’accident complexe est utilisée pour déterminer la qualité de la victime elle peut alors se retourner contre cette dernière [30]. C’était l’objectif du pourvoi dans le présent arrêt en présentant une analyse globalisée de la situation accidentelle afin de faire qualifier de « conducteur » la motocycliste blessée.

B – Vers la réduction des contestations.

L’injustice faite au sort des conducteurs se révèle particulièrement flagrante lorsqu’il s’agit d’un motocycliste à terre, dont le sort est pire que celui d’un piéton, alors même qu’il se trouve exposé à tous les dangers. En effet, la victime éjectée de sa moto et gisant désormais sur la chaussée n’est plus créatrice d’aucun risque et ne justifie plus qu’on lui applique le qualificatif de conducteur [31].
La qualifier de piéton n’est pas non plus totalement satisfaisante du point de vue linguistique [32].
Pourtant à ce jour deux catégories de victimes existent dans la loi 1985 : les conducteurs et les non-conducteurs et chaque victime est présumée appartenir à l’un ou à l’autre monde.
La suppression de cette distinction et la fin de la discrimination des victimes conductrices, souhaitée par beaucoup [33], sonnerait évidemment le glas de nombreuses contestations en référé portant sur la qualité de conducteur victime en évitant que le juge de l’évidence n’ait à se pencher sur la casuistique jurisprudentielle. Or si le conducteur victime a échoué devant la Constitution, son statut particulier n’ayant pas été jugé contraire au principe d’égalité [34], son sort devrait être considérablement amélioré en cas d’adoption du projet de réforme de la responsabilité civile présenté en mars 2017 par l’ancien garde des sceaux [35]. En effet, son article 1287 affirme que « En cas de dommage corporel, la faute de la victime est sans incidence sur son droit à réparation », supprimant ainsi l’ancienne summa divisio de la loi Badinter. Seule devrait pouvoir désormais être opposable au conducteur sa faute inexcusable lorsqu’elle n’est pas la cause exclusive de l’accident (art. 1287 al. 2). Il reste à savoir si ce texte sera repris par le nouveau gouvernement et dans quel délai.

Arrêt Cass. 2e civ., 18 mai 2017, n°16-18490 à lire dans le document ci-dessous.

Arrêt Cass. 2e civ 18 mai 2017
Daphné Tapinos, Avocate.

[1Ainsi et bien que les dispositions des articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des assurances imposent, sous peine de sanction, aux assureurs de faire des offres à la victime dans certains délais, la liquidation des préjudices ne peut intervenir qu’une fois la victime consolidée, soit, parfois, un voire deux ans après la date de l’accident. Entre temps la victime devra subir une ou plusieurs expertises physique, psychiatrique ou écologique, soit autant d’étapes souvent douloureuses à franchir avant de pouvoir tourner la page de son accident et de disposer librement des fonds qui lui seront alloués.

[2Même si l’ordonnance de référé n’a pas au principal l’autorité de la chose jugée (article 488 du Code de procédure civile) et ne lie donc pas le juge du fond, ce dernier ne manquera pas, en pratique, d’en tenir compte.

[3Cf. sans exhaustivité : R. Perrot, « L’évolution du référé », Mélanges Hébraud, Toulouse. Université des sciences sociales, 1981, p. 645 ; J. Vincent, « Les pouvoirs du juge en matière de provision », Etudes Kayser, PUAM, 1979, p. 417 ; C. Couchez, « Le référé-provision : mesure ou démesure ? », Mélanges P. Raynaud, Dalloz, 1985, p. 161.

[4X. Vuitton, Jurisclasseur, Référés, fasc. 1200-95, n°24, 1er novembre 2016. Cf. également X. et J. Vuitton, Les référés, Lexis Nexis, 2012, n°83 et s.

[5M.-C. Rondeau-Rivier, « L’évidence et la notion de contestation sérieuse devant le juge des référés », Gaz. Pal., 13 juillet 1991, doctr. 355.

[6Ass. plén. 16 novembre 2001, n°99-20114, Bull. AP., 2001, n°13 ; Resp. civ. et ass., mars 2002, com. 93, H. Groutel ; RGDA, 2002, p. 315, note J. Beauchard. Sur l’abandon antérieur de l’appréciation de cette notion au pouvoir souverain des juges du fond : Cass. 1ère civ., 4 octobre 2000, n°97-20867, Bull. civ., I, 2000, n°239.

[7A. Boujeka, « L’étendue du contrôle de la Cour de cassation en matière de référé-provision », D. 2001, chron., p. 1580.

[8X. Vuitton, Jurisclasseur, préc., n°32.

[9F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Droit civil. Les obligations, Dalloz, 2009, 10 éd., n°937.

[10X. et J. Vuitton, Les référés, op. cit., n°111 et s.

[11Article 12 du Code de procédure civile.

[12Pour juger de l’évidence des droits des parties encore faut-il que le juge soit en mesure de déterminer ces droits.

[13Cass. 2ème civ., 5 novembre 1998, n°96-20243, Bull. civ., II, 1998, n°156.

[14Cass. 2ème civ., 2 février 1994, n°92-16951. En revanche, le moyen tendant à contester l’implication d’un véhicule dans un accident ne peut être présenté pour la première fois devant la Cour de cassation car il est mélangé de fait et de droit (Cass. 2ème civ., 18 Mars 1999, n°97-17900).

[15Cass. 2ème civ., 19 juin 1991, n°90-13301, Bull. civ., II, 1991, n°188.

[16Cass. 2ème civ., 8 juin 1995, n°93-18524, Bull. civ., II, 1995, n°182.

[17Cass. 2ème civ., 27 mars 2003, n°02-10561. Dans le même sens, sur l’absence de contestation sérieuse sur l’exclusion ou la limitation du droit à indemnisation de la victime conductrice : Cass. 2ème civ., 10 juin 1999, n°97-20252.

[18Cass. 2ème, civ. 20 janvier 2000, n°98-14490, Bull. civ., II, 2000, n°13.

[19Une telle appréciation n’étant d’ailleurs pas nécessairement exempt de considérations d’opportunité, tel que le sort réservé en l’espèce par la loi de 1985 au conducteur victime. En ce sens cf. R. Tendler (« Le juge des référés, "une procédure ordinaire" ? », D., 1991, chron. p. 139) qui relève que « La tentation est grande pour le juge de trancher le litige, même en présence d’une contestation difficile à évaluer immédiatement lorsqu’il lui apparaîtra opportun de "dégeler" une situation figée ».

[20A la victime demanderesse d’apporter la preuve de l’existence et de la réalité de sa créance d’indemnisation, à l’assureur défendeur de démontrer que cette dernière est sérieusement contestable.

[21Et à qui incombait la charge de la preuve de la qualité de conducteur de cette dernière : Cass. 2ème civ., 16 octobre 1991, n°90-14564, Bull. civ., 1991, II, n°255.

[22En ce sens : F. Terré, Ph. Simler, Y. Lequette, Droit civil. Les obligations, op. cit., n°962.

[23G. Viney et P. Jourdain, Les conditions de la responsabilité, LGDJ, 2006, 3ème éd., n°1025.

[24Cass. 2ème civ., 4 octobre 1989, n°88-15800, Bull. civ., 1989, I, n°153, RTD civ. 1990, p. 510, note P. Jourdain (chute survenue « au moment même » de l’arrivée de la voiture) ; Cass., 2ème civ., 31 mars 1993, n°91-12353, Bull. civ., 1993, II, n°133 (chute sur la chaussée et choc avec l’automobile survenus « de façon presque simultanée ») ; Cass. 2ème civ., 8 décembre 1993, n°92-13452, Bull. civ., 1993, II, n°351 (la succession des chocs avait été « quasi immédiate ») ; Cass. 2ème civ., 11 janvier 1995, n°93-15766, Bull. civ., 1995, II, n°1, P.A., 1995, n°138, p. 20, note C. Filios (victime tombée de sa motocyclette et « venue en glissant sur la chaussée heurter » un ensemble routier) ; Cass. 2ème civ., 29 avril 1998, n°96-18622 (« dans le même temps » chute et glissement sur la chaussée pour passer sous le véhicule adverse) ; Cass., 2ème, 5 juin 2003, n°01-17486, Bull. civ., 2003, II, n°168 (« le heurt a suivi immédiatement la chute de la victime ») ; Cass. 2ème civ., 8 octobre 2009, n°08-16915, Bull. civ., 2009, II, n°236 (le choc du véhicule avec la victime a suivi « immédiatement » la chute de celle-ci) ; Cass. 2ème civ., 24 mars 2016, n°15-19416, Resp. civ. et ass., 2016, com. 191, H. Groutel (la chute sur la chaussée puis la collision avec le véhicule adverse « s’étaient succédé dans un enchaînement continu et dans un laps de temps extrêmement bref »).

[25Cass. 2ème civ., 2 décembre 1987, n°86-15035, Bull. civ., 1987, n°257 (la victime « gisait depuis un certain temps sur la chaussée à quinze mètres de son cyclomoteur » lorsqu’elle a été heurtée par l’automobile adverse) ; Cass. 2ème civ., 8 novembre 1995, n°93-11891, Bull. civ., 1995, II, n°269 (victime « déjà immobilisée à terre » lorsque la roue du véhicule adverse est passée sur son bras) ; Cass., 2ème civ., 29 juin 2000, n°98-19234, P.A., 2000, n°217 p. 20, note M. Leroy (la victime après avoir été « désarçonnée » de son cyclomoteur par suite du choc avec une première voiture « se trouvait étendue sur la chaussée » lorsqu’elle a été écrasée par une seconde voiture) ; Cass. crim., 9 mars 2004, n°03-84991, Bull. crim., 2004, n°59 (chute et glissement de la victime sur la chaussée où son corps s’est immobilisé avant le heurt avec le véhicule adverse).

[26En ce sens : Y. Dagorne-Labbe, JCP, éd. G., 1993, II, 21987 ; M. Leroy, note préc. ; C. Maury, « Controverse sur la notion de conducteur », D. 2005, p. 938 qui évoque le « désintérêt manifeste de la Cour de cassation pour le critère de la maîtrise effective du véhicule ».

[27En ce sens : P. Jourdain, RTD civ., 2002, p. 827 ; C. Filios, note préc. ; R.-F. Rastoul, « Le conducteur éjecté est-il un non-conducteur ? », Gaz. Pal., 27 juillet 2000, n°209, p. 7.

[28Au demeurant particulièrement délicat à mettre en œuvre : à partir de combien de secondes ou de minutes doit- on estimer que le conducteur éjecté se trouvant au sol perd cette qualité ?

[29Il y a accident complexe « lorsque sont réunies les conditions d’unités de temps et de lieu, et de continuité de l’enchaînement des collisions » (H. Groutel, « Les accidents complexes », Resp. civ. et ass., 2012, dossier 19). Désormais, la succession d’accidents est appréhendée par la jurisprudence de manière globale et non plus séquentielle. Sur cette évolution, cf. J. Flour, J.-L. Aubert et E. Savaux, Les obligations. Le fait juridique, 2011, 14ème éd., n°337 et s ; G. Viney et P. Jourdain, Les conditions de la responsabilité, préc. n°1001 et s.

[30En ce sens : P. Jourdain, RTD civ., 1998, p. 922 ; F. Leduc, « Le cœur et la raison en droit des accidents de la circulation », Resp. civ. et ass., 2009, dossier 4 ; H. Groutel, « Les accidents complexes », préc.

[31En ce sens : F. Chabas, « L’interprétation des art. 2 à 6 de la loi du 5 juillet 1985 et la question des recours », Gaz. Pal., 20 juin 1995, doctr. p. 656 ; P. Jourdain, RTD civ., 2002, préc.

[32En ce sens, S. Bories, JCP, éd. G ; 1993, II, 22016.

[33P. Catala, Avant projet de réforme du droit des obligations et de la prescription, La documentation française, 2006, article 1385-2 ; F. Terré (dir) Pour une réforme du droit de la responsabilité civile, Dalloz, 2011, article 26. Dans le même sens : G. Viney, « Conclusions du colloque sur les accidents de la circulation », Resp. civ. et ass., mai 2012, dossier 29 ; S. Hocquet-Berg, « Les inégalités entre les victimes », Resp. civ. et ass., septembre 2015, dossier 14.

[34Cass. 2 civ., 9 septembre 2010, n°10-12732, Resp. civ. et ass., octobre 2010, repère 9, H. Groutel.

[35Sur ce projet, cf. notamment : J.-S. Borghetti, « Un pas de plus vers la réforme de la responsabilité civile : présentation du projet de réforme rendu public le 13 mars 2017 », D., 2017, p. 770 ; L. Bloch, « Ne l’appelez plus loi Badinter (à propos du projet de réforme du droit de la responsabilité civile) », Resp. civ. et ass., mai 2017, alerte 11.