Village de la Justice www.village-justice.com

Votre avocat comprend-t-il quelque chose à la blockchain ? Par William O’Rorke.
Parution : lundi 2 octobre 2017
Adresse de l'article original :
https://www.village-justice.com/articles/votre-avocat-comprend-quelque-chose-blockchain,26022.html
Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

The next big thing ? Une révolution ? L’Internet de l’argent ? La blockchain est l’objet de tous les superlatifs. La curiosité croissante que suscite cette technologie s’accompagne de l’intérêt bien senti d’un nombre exponentiel d’experts fraîchement déclarés [1].

Si un avocat vous jure qu’il est la référence en blockchain ou qu’il maîtrise parfaitement les subtilités de cette technologie émergente, voici quelques indices qui vous permettront de déceler le « vendeur de cravates » du véritable expert :

1. Il vous affirme qu’il est dans la Blockchain depuis plus de 10 ans !

Problème : Satoshi Nakamoto n’a publié le “white paper” de Bitcoin le 31 octobre 2008 alors que le premier bloc date du 3 janvier 2009. Jusqu’en 2012, seule une poignée de gens s’intéressait aux crypto-monnaies et au Bitcoin. L’auteur de ces lignes avoue n’avoir commencé à croire au Bitcoin qu’à la fin de l’année 2013…

2. Il vous propose un template ou une “clause magique” pour votre projet blockchain ?

Trop beau pour être vrai : le droit applicable à la blockchain est un chantier qui commence seulement. Quelle valeur donner à un Token ? Comment qualifier les responsabilités des parties prenantes d’un smart contract ? Comment encadrer et sécuriser une ICO ?

Ces questions n’ont, aujourd’hui, pas de réponse « sur étagère ». C’est pourquoi plusieurs groupes de travail au sein de France Stratégie, de l’AMF et des initiatives comme la Smart Contract Academy réfléchissent actuellement à l’élaboration de concepts juridiques adaptés à la blockchain et aux applications décentralisées. A suivre donc.

3. Sûr de lui, il vous parle du Blockchain

On dit LA blockchain ! Environ 431 000 résultats dans Google pour le féminin contre seulement 23 200 pour le masculin. Par ailleurs, la blockchain se traduit en français par une chaîne de bloc. En effet, l’échange d’information sur cette technologie est regroupé par blocs qui, eux, sont arrimés les uns à la suite des autres pour former une chaîne. Si vous ne savez pas ce qu’est un altcoin, une sidechain ou un mineur, consultez le lexique de Blockchain France.

4. Il vous propose de protéger l’Intelligence artificielle de votre smart contract ?

L’IA est prometteuse, mais aucun rapport (pour le moment) avec un smart contrat. Ce dernier n’est ni smart, ni un contrat mais un programme qui s’auto-exécute sur la blockchain. Concernant sa protection, elle est envisageable mais le monde de la blockchain recourt massivement au code open source, notamment par sécurité. Or les licences libres empêchent bien souvent la protection privatives des œuvres qu’elles concernent. La propriété intellectuelle a, aujourd’hui, plus intérêt à utiliser les applications blockchain qu’à breveter celles-ci.

5. L’air faussement contrit, il vous affirme « dans 5 ans, même son activité n’existera plus ! »

On s’assoit et on respire. Pour l’instant, la blockchain donne plus de travail à l’avocat qui prend la peine de s’y intéresser qu’elle n’ubérise une quelconque profession juridique. Les notaires peuvent également reprendre leurs souffle : une blockchain n’est pas capable de créer un acte authentique, ni de gérer une succession qui dégénère ! En règle générale, les blockchain constituent un nouveau protocole d’échange de valeur ne nécessitant pas de faire confiance a priori à autrui (“trustless”). Par conséquent, les tiers de confiance seront toujours nécessaires en périphérie du réseau pour faire le lien entre monde réel et blockchain. Reste à savoir qui seront ces intermédiaires.

William O\'Rorke, Avocat associé chez ORWL Avocats www.orwl.fr

[1A tout seigneur, tout honneur, ce papier s’applique évidemment à toutes les professions de conseil et à aucune d’entre elles en particulier

Comentaires: