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La médiation familiale : pas sans mon avocat ! Par Anne-Marion de Cayeux, Avocat.
Parution : mardi 3 octobre 2017
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La médiation familiale tend à s’imposer comme un préalable à la saisine du juge. Elle a la faveur du législateur et des juges aux affaires familiales. Avocats et médiateurs doivent accompagner le mouvement ensemble pour que la médiation soit une alternative sécurisante au judiciaire dans l’intérêt des parties et des enfants.

Nul n’ignore qu’11 juridictions ont été désignées par arrêté (du 16 mars 2017) pour que soit expérimentée, pour une période de 3 ans, une médiation préalable obligatoire avant toute saisine du Juge aux Affaires Familiales, pour les instances de modification de conventions ou de décisions judiciaires relatives à l’autorité parentale, la résidence des enfants, le droit de visite et d’hébergement, la contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants. Donc, les contentieux post-divorces ou post-séparations de partenaires de PACS ou concubins, relatifs aux enfants.

Pour pouvoir plaider devant ces juridictions, il sera nécessaire d’avoir participé à au moins une séance de médiation. Les protocoles signés entre les tribunaux concernés, les associations de médiation familiales locales et les barreaux, prévoient que les associations de médiation signataires devront donner des réunions d’information gratuites aux parties. Ensuite, une séance de médiation devra être organisée qui, elle, ne sera pas gratuite. La présence du demandeur seul suffira à justifier de la tentative de médiation – et heureusement car sans cela l’absence du défendeur permettrait de faire échec à l’accès au juge.

Les protocoles signés ne laissent, hélas ! qu’une place marginale aux avocats dans cette tentative. Il y est en général écrit que « la présence de l’avocat est autorisée » aux séances de médiation ! Comment ne pas craindre alors que les avocats des parties s’organisent pour envoyer le demandeur à la séance de médiation et voilà… l’affaire sera faite, en avant à l’audience.

Ce serait un immense gâchis. Il est urgent que les avocats et les médiateurs travaillent ensemble.

L’adoption par les avocats d’une nouvelle façon de travailler, et l’ouverture des cabinets de médiation aux avocats s’imposent. Pour que la médiation devienne une alternative sérieuse et sécurisante au contentieux. Pour que le droit et la protection des parties et de leurs enfants ne soient pas exclus de la résolution des litiges. Pour que les parties réticentes à la médiation acceptent d’y aller, accompagnées, encouragées, soutenues par leur avocat. Pour qu’elles persévèrent malgré la souffrance et le conflit, pour avancer dignement vers la mise en place d’un cadre librement choisi qui convienne à leur famille et à leurs enfants. Pour que cessent les chicanes dont les juges aux affaires familiales ont assez. Pour que l’office du juge retrouve sa pureté, celle de dire le droit, et que nos magistrats retrouvent le temps d’écouter les parties pour que leur libre appréciation soit éclairée.

Il est possible de mettre en place de façon effective de cette collaboration avocats – médiateurs existent. Notamment, une convention d’engagement au processus de médiation avec avocats a été modélisée qui est un outil particulièrement intéressant et novateur – on pourrait même dire, une révolution. Elle a été présentée le 20 septembre 2017 à l’occasion d’uncolloque commun Barreau de PARIS (commission MARD)Institut du Droit de la Famille et du Patrimoine, à une assistance composée d’avocats, de médiateurs, de magistrats.

Cette convention, à l’image des conventions de procédure participative et de droit collaboratif, est signée par les parties, les avocats, et le médiateur. Elle fixe le rôle et les engagements de chacun d’œuvrer à la recherche d’une solution apaisée, en s’abstenant autant que possible de saisir le juge.

Elle définit les règles de fonctionnement de cette médiation : organisation des séances, échanges de correspondances ou communication de pièces, durée du processus, effets sur la prescription, rédaction de l’accord par les avocats, homologation éventuelle.

Elle pose enfin le cadre de la médiation : confidentialité, principe du contradictoire aménagé, responsabilités de chacun.

Cette convention est le fruit d’un travail collaboratif entre avocats et médiateurs familiaux qui ont pu, à l’occasion de séances de travail successives, confronter leurs points de vue, langages, visions, expériences. Elle a vocation à être utilisée pour tous les dossiers en droit de la famille, dès lors qu’il s’agit d’éviter un contentieux, de rechercher un divorce par consentement mutuel, un partage amiable…

Alors avocats et médiateurs, n’hésitez plus à vous saisir de cette réforme, et apprenez à vous fédérer en équipe autour des parties, pour une plus grande paix sociale et la sécurité des enfants.

Tous les outils sont en place pour le permettre. Depuis plus de 20 ans, le législateur n’a eu de cesse que de chercher à promouvoir les modes amiables de résolution des différends, et plus particulièrement la médiation. Anoblie par une réforme tendant à la modernité (entrée de la médiation dans notre Code de procédure civile en 1995), la médiation a ensuite poursuivi sa pénétration dans le monde judiciaire, car elle est à la fois porteuse d’une meilleure prise en compte de l’autonomie des parties, mais aussi un moyen bien séduisant de libérer nos tribunaux d’une surcharge d’affaires.

Année après année, accompagnant ce mouvement, les associations et fédérations de médiation familiale se sont structurées et ont un rayonnement national. Un syndicat professionnel des médiateurs vient de voir le jour (SYME). La déontologie des médiateurs fait l’objet de chartes telles que le code national de déontologie des médiateurs. La formation des médiateurs s’est professionnalisée. Des centres et écoles délivrent des diplômes universitaires ou professionnels renommés de médiateur. Le médiateur familial lui, est soit titulaire d’un diplôme d’Etat du même nom (créé en 2003 par arrêté), soit membre d’une profession juridique ou judiciaire justifiant d’une formation de médiateur reconnu par sa profession. Le Conseil National des Barreaux a ainsi créé une plateforme de référencement des avocats médiateurs (CNMA), sur laquelle ne sont autorisés à figurer que des avocats justifiant de formations de médiateur répondant à des critères bien définis.

Les professions juridiques se sont dotées d’instances de médiation : avocats (notamment l’Association des Médiateurs Européens pour le Barreau de PARIS, et d’autres associations rattachées aux Barreaux de régions), notaires, huissiers de justices, ont leurs propres centres de médiation.

En matière familiale, la médiation est particulièrement appréciée des Juges aux Affaires Familiales, qui depuis quelques années adressent aux parties une note les invitant à se rendre à une réunion d’information à la médiation familiale, avant toute plaidoirie… quand ils n’insistent pas à l’audience pour qu’elles tentent une médiation afin de s’éviter un jugement qui serait nécessairement moins adapté à leur famille que leur accord.

La loi est de plus en plus ferme. Depuis mars 2015, il est nécessaire d’avoir tenté de parvenir à un accord amiable avant de saisir le juge. Et la médiation sera sans doute demain généralisée comme préalable obligatoire à toute instance.

Alors, avocats spécialistes et praticiens du droit de la famille, formez-vous, et prenez possession de la médiation avec avocats, mode amiable à part entière particulièrement efficace.

Anne Marion de CAYEUX, Avocat au barreau de Paris, spécialiste en droit de la famille, des personnes et de leur patrimoine Médiateur agréé CNMA _ [->contact@decayeux-avocat.com] blog : http://www.decayeux-avocat.com
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