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Négociation vs Adhésion à un pacte d’actionnaires ? Par Laura Podjarny Faerman, Avocat.
Parution : vendredi 20 octobre 2017
Adresse de l'article original :
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Vous êtes associé historique d’une start-up et l’un de vos associés vend ses titres à un nouvel entrant : quelles précautions doit-on prendre vis-à-vis de l’adhésion au pacte et aux statuts ?

Vous êtes associé fondateur et/ou dirigeant d’une startup et l’un de vos associés souhaitent quitter le navire.
Vous avez le remplaçant idéal à qui vous proposez d’entrer au capital.

Hypothèse 1 : vous lui proposez de négocier son entrée et la documentation juridique. Il ne souhaite pas discuter, quelle chance, tout lui convient, vous êtes ravi.

Attention, dans ce cas, précisez d’emblée dans votre pacte que celui-ci a fait l’objet de négociations, librement menées par les parties pour éviter tout risque défini ci-dessous dans l’article.

Hypothèse 2 : zut, il veut négocier, vous refusez : il entre mais il ne négocie pas pour ne pas remettre en cause l’équilibre social déjà fragilisé. Il est nouveau, c’est à prendre ou à laisser.

Réponse n°1 : vous changez d’avis et vous lui laissez (une petite) marge de manœuvre de négociation pour retomber dans l’hypothèse 1 (vous me suivez ?).

Réponse n°2 : Vous refusez de négocier, et vous vous attaquez à la suite de cet article avec courage.

Attention, votre candidat idéal, déçu de l’absence de négociation lors de son entrée au capital, pourrait se prévaloir des nouveaux textes et remettre en cause les documents qu’il a signé pour déstabiliser la société et demander à ce que tout soit modifié.

La réforme du droit commun des contrats a introduit la notion de contrat d’adhésion qui se définit par l’absence de négociation de clauses déterminées à l’avance par les associés historiques.

Or, le nouvel associé pourrait faire supprimer par un juge les clauses qui créeraient un déséquilibre significatif en sa défaveur et demander l’interprétation en sa faveur du contrat.

Pour contourner le risque de qualification de contrat d’adhésion, il est possible d’imaginer d’utiliser le mécanisme de la cession de contrat dans le cadre duquel le nouvel arrivant se substituerait aux droits de celui qui s’en va.

Aussi, il conviendrait de prévoir :
- une clause qui autorise les associés à céder le pacte conformément à l’article 1216 du Code civil qui a consacré la notion de cession de contrat ;
- une clause qui selon l’article 1216-1 du Code civil libérerait celui qui vend ses actions ou parts sociales de toute obligation à l’égard du nouvel entrant,
- et en tout état de cause de le rédiger avec une grande précaution.

Pour aller plus loin, l’article 1216 du Code civil a consacré la notion de la cession de contrat qui s’avère être un argument utile pour éviter le risque de requalification en contrat d’adhésion. La cession de contrat implique en effet la poursuite du contrat pour le nouvel entrant, et ne crée pas de nouveau contrat. Il n’y a certes pas de négociation, mais en se plaçant sur ce terrain-là, on minimise les possibilités de qualifier de contrat d’adhésion la signature d’un pacte en l’état, sinon toutes les cessions de contrat seraient des contrats d’adhésion, car a fortiori ils ne se négocient pas !

L’article 1216-1 du Code civil prévoit quant à lui « si le cédé y a expressément consenti, la cession de contrat libère le cédant pour l’avenir. A défaut, et sauf clause contraire, le cédant est tenu solidairement à l’exécution du contrat ».

(pour plus de références, voir Recueil Dalloz 2017, p. 171, Antoine Tadros).

Laura Podjarny Faerman LPF AVOCATS www.lpf-avocats.com